La corde à noeuds

Les cours de sport étaient à la ronde ce que les contrôles de maths sont aux nuls en algèbre ou les dictées aux dislexiques: un enfer. Et le mot n'est pas assez fort.

Le calvaire commençait dès les vestiaires où il fallait enfiler l'atroce survêtement. La ronde se changeait dans un coin, le plus vite possible, tremblant à l'idée que les garçons, craints et haïs de la 6ème à la terminale, fassent leur apparition. Ces derniers, atroces avortons boutonneux, cherchaient en effet par tous les moyens à reluquer les filles en culottes et s'introduisaient régulièrement et illicitement dans leur coin réservé. Ils ne se privaient alors pas au passage de s'acharner sur la ronde qui n'en demandait évidemment pas tant. Elle sortait du vestiaire sous les quolibets, rasant les murs et ravalant ses sanglots, rouge de honte et de colère.

Les cours d'athlétisme étaient ceux qu'elle appréhendait le plus. Elle y vivait une succession d'humiliations. Au sprint, elle ne sut jamais démarrer sur les starting-blocks. Au coup de sifflet, ses fesses se levaient, mais ses jambes refusaient de suivre l'impulsion, résultat, la ronde mangeait littéralement la poussière une fois sur deux. En ce qui concerne le saut en hauteur, elle cherche encore à déterminer lequel du droit ou du gauche était son pied d'appel. Est-ce pour cela ou parce que son corps était trop dûr à soulever, mais pas une seule fois elle ne franchit la barre, même lorsque celle-ci était au niveau du matelas.

 

Un jour, au lancer de poids, le prof de gym suggéra aux autres élèves, avec cet humour qui le caractérisait, de la lancer elle.

 

Passons sur les heures passées accrochée en bas d'une corde impossible à monter. Le prof avait ce jour là décidé qu'on y passerait le cours s'il fallait, mais qu'elle grimperait. Dans l'hilarité générale, ses mains glissèrent des dizaines de fois jusqu'à en être brûlées sans jamais arriver à la hisser. Elle aurait voulu étrangler son bourreau avec la corde à noeuds.

 

Les sports collectifs ne lui réussissaient pas plus. Elle fit perdre tous les relais auxquels elle participa et fût invariablement la dernière à être choisie dans les équipes de volley, handball ou basket.

 

Réalisant très vite qu'elle ne s'améliorerait jamais et que le professeur de gym ne ferait rien pour la faire progresser, bien au contraire, la ronde étudia alors les divers moyens de sécher les cours. C'est à cette époque qu'elle eut ses premières règles. Si ses amies en étaient incommodées, elle bénit pour sa part le ciel de l'avoir faite femme. Invoquant des cycles anarchiques, elle multiplia les dispenses, marquées de ce mot adoré: "INDISPOSEE"…

4 comments sur “La corde à noeuds”

  1. malou88 a dit…

    Ah ça les cours de sport…je n’ai jamais pu supporter. Je n’étais pas plus ronde que ça mais j’étais tout simplement nulle en sport, c’était inné si l’on peut dire. Enfin c’était, c’est plutôt car le sport et moi encore aujourd’hui ça fait deux.
    Bref j’étais nulle en sport, je détestais le sport, que dis-je? je l’execrais et j’étais en plus dotée d’une maladresse légendaire et d’une timidité maladive, plus les lunettes de myope et les boutons ( dès la primaire oui oui ), un vrai cliché de film américain débile.
    Ma nullité en sport a toujour beaucoup énervé mes profs ( n’a pas compris l’art subtil qu’est la danse contemporaine hmm hmm ) mes camarades qui, quand il daignaient me parler, me lançaient des mais t’es trop nulle, fais un effort quand même! Bouge toi ( ben j’essaie qu’est-ce que tu crois) . Evidemment j’étais toujours choisie en dernier pour toutes les équipes, et c’était non c’est toi qui la prend! Non je l’ai déjà eu dans mon équipe la semaine dernière! etc avec le/la prof qui se veut compatissant(e) mais qui ne fait qu’enfoncer le clou allez soyez sympa prenez la dans une équipe . Je ne parcourais pas plus de 50 cm sur la corde à noeuds, je ne rattrapais jamais le ballon, je finissais toujours dernière en endurance, je me prenais les balles de jonglage dans la tête, mon javelot ne parcourait aussi qu’une cinquantaine de centimètres…
    Sans parler de la gymnastique, du cheval d’arçon!!
    Maintenant j’en ris presque mais à l’époque je n’étais pas fière et pour cause, au collège tu es nulle en sport tu es finie!! aah les adolescents sont formidable…
    Je lis ton blog avec beaucoup d’intérêt, tes posts sont bien écrits, subtils, tu peux décrire les petites choses du quotidien ou les sujets plus graves avec tout autant de talent, bravo!!

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  2. titefée a dit…

    Ah, les cours de sport!! Je détestais ça, particulièrement le 1er trimestre gym-athlétisme. Que du bonheur!! Heureusement, je n’ai jamais été mise à l’écart pour ça car j’étais loin d’être la seule à être aussi nulle!

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  3. Cookie a dit…

    J’ai découvert ton blog suite à un article paru dans le Esprit Femme de juillet 2008. L’article à était un apéritif et je voulais en savoir plus. En plus je me trouve moi aussi ronde et m’appelle aussi caroline :-).

    je parcours donc ton blog en compagnie de ma mère (qui est toujours aussi patiente malgré tous les essayages que je lui fait subir et qui se terminent souvent par des crises de larmes…)

    Le sport pour moi à était une hantise de la primaire au lycée. Je pleurait le matin pour ne pas y aller. Et quand l’heure du cours arrivait j’inventai des excuses comme J me sens pas bien j’ai envie de vomir et autres du même style.
    Je me reconnais donc entièrement dans ton article ^__^.

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  4. Ninitiou a dit…

    Cette matière debile et sois disant indispensables a bien faillit me faire louper mon bac. Comme si le fait de savoir courrir vite alors qu’on est pas fait pour etait indispensable pour reussir dans la vie alors que nous sommes de plus en plus sendentaires (a tord?) Et il faut voir les bareme!! J’ai passé mon enfance a me plaindre de souffle au coeur et de tete qui tourne.. on me repondait qu’il me fallait juste d l’entrainement et de la volonté. J’ai decouvert enceinte que j’étais tachycarde. Et que mon coeur au repos etait a 120 pulsations minutes. J’ai faillit retourner voir mon prof de gym, ce bourreau d’enfant pour lui dire, le doigt sous le menton: Et toc…

    Bandes de débile musculeux, je vous haie…

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