Il y a vingt ans, après des mois allongée pour cause de col mou (quelle partie de mon corps ne l’est pas), la sage-femme qui me suivait a commis l’erreur de m’autoriser à me lever. Une salade césar plus tard, les contractions sont arrivées. Bien trop tôt. Le churros, appelé au secours, a déboulé paniqué et nous voilà partis à la maternité dans une bagnole prêtée par un ami, qui roulait par je ne sais quel miracle. Je ne m’étendrai pas sur la grâce avec laquelle je m’en suis extirpée. Très vite, j’ai compris que pour l’accouchement rêvé, il faudrait repasser. Non seulement les deux bébés étaient en siège mais pour une raison toujours pas vraiment élucidée (mais à priori une erreur de l’anesthésiste de garde) il a été décrété que je ne pouvais pas me voir administrer une péridurale pour la césarienne qui elle était non négociable. Ce serait donc une anesthésie générale, en urgence, à 34 semaines de grossesse, dans une clinique dépourvue de département néonat. La fête. Je me souviens avoir pleuré avant qu’on m’endorme et d’avoir crié que je ne voulais pas mourir sans voir mes enfants. Je ne suis pas morte ce jour là mais je n’ai pas vu mes enfants. J’ai pu toucher le pied de mon fils juste avant que la double couveuse soit emmenée par le Samu à l’autre bout de Paris. Je ne verrais le visage de mes bébés que trois jours plus tard, trois jours à me lyophiliser, à me vider de larmes qui semblaient se régénérer au fur et à mesure que les heures passaient. En lire plus »
Mois : avril 2020
Confinement d’une hypocondriaque J34
Je sais que beaucoup ont commencé le compte à rebours jusqu’au 11 mai. Vous serez sans doute étonnés (ah, non ?) d’apprendre que je ne suis pas de ces gens là. Non, moi, quand le président a annoncé le déconfinement dans un mois, mon premier réflexe a été de me demander si genre on serait obligés.
C’est à dire qu’en gros, dans trois semaines, le virus sera toujours là, pour l’immunité collective on peut aller se faire cuire le cul et apparemment concernant les anticorps de ceux qui comme moi l’ont pourtant attrapé dix fois, rien n’est moins sûr. (en vrai je suis prête à parier que le jour où les tests sérologiques seront sur le marché (sans doute jamais vu qu’en gros, donc, cette saloperie peut se choper ad vitam) (oui je suis devenue épidémiologiste, foutez moi la paix) la seule imbécile du quartier qui sera négative, ça sera moi. Je préviens, je mentirai. Pas question d’admettre que j’ai fait chier tout mon entourage avec des symptômes qui n’en étaient pas. En lire plus »
Confinement d’une hypocondriaque – J30
Parmi les obsessions étranges générées par ce confinement, j’ai donc attrapé celle de la farine. Entendons nous bien, je suis consciente de ne pas être la seule, cette névrose est d’ailleurs la résultante d’une pénurie dans ma ville – et qui semble être assez généralisée – ce qui signifie sans doute que beaucoup ont eu ce réflexe d’en emmagasiner un maximum, au nom du sacro-saint « au cas où ». Dans mon Monoprix, seul supermarché à proximité de chez moi (je sais j’ai pas de bol), les approvisionnements se font le lundi matin. Et une caissière nous a expliqué que la file d’attente ce jour là commençait à se former à 7h pour une ouverture à 9h. Et en une heure, tout le rayon farine, levure, préparations toutes faites pour flans et gâteaux est dévalisé. Une information qui a fait naitre en moi une espèce de fureur. Bande de bâtards, allez tous crever bouffés par vos mites alimentaires, avec votre quintal de farine qui pourrit dans vos placards. Et de rabâcher à qui veut bien m’entendre (j’ai déjà tendance à ne pas lâcher le morceau mais alors en confinement, call me the fox terrier) que c’est un scandaaaaaale de se comporter aussi égoïstement, on devrait rationner la farine, c’est dégueulasse d’en prendre dix paquets, comment je fais moi pour mon Banana bread hein ? Parce que j’en ai VRAIMENT besoin, MOI. Pas comme tous ces connards qui n’en font rien à tous les coups. En lire plus »
Confinement d’une hypocondriaque- J25
Autant vous dire que j’ai écrit J25 mais ça pourrait être J32 ou J18, je ne compte définitivement plus. Je suis désolée pour l’interruption de ce journal, la semaine dernière je n’étais pas assez en forme pour être en verve. Outre le fait que j’ai très probablement contracté le Covid19 pour la 6ème fois – un peu de fièvre (oui, 37,8 c’est de la fièvre), des frissons, des courbatures et une sensation de souffle court – (il est probable que si le corona se manifestait par un panari ou une crise d’hémorroïdes, j’en aurais également à mon actif, call me the Queen of the somatisation), j’avoue avoir eu l’impression que tout cela ne menait à rien, qu’il n’y avait plus d’avenir et qu’on n’en sortirait pas indemnes. A quoi bon dans ces conditions venir vous faire part de ces pensées un brin pessimistes alors que vous êtes sans doute exactement comme moi, en train de lutter contre les baisses de moral ? Je vous le demande.
Certes c’est exactement finalement ce que je suis en train de faire, mais vous noterez que j’ai l’élégance de parler à l’imparfait (après tout, ce qui a eu lieu il y a un quart d’heure appartient déjà au passé). Plus sérieusement, pour être très honnête, je ne gère pas très bien tout ça. Et je me sens d’autant plus indécente que je fais partie des plus privilégiés, vivant un confinement trois étoiles (je réserve les 4 étoiles à tous ceux dotés d’une résidence proche de la mer même si les plages sont fermées (le bruit de mon lave vaisselle m’a arraché quelques larmes hier parce qu’il m’évoquait celui des vagues donc laissez moi tranquille) et/ou dotée d’une piscine. Mais l’existence de notre mini jardin et le fait de pouvoir confiner chacun des membres de ma famille dans une pièce dédiée est en soi une donnée qui devrait m’interdire de geindre. Ayant encore du travail – ce qui est également précieux – je devrais donc me contenter de la boucler. En lire plus »