Articles par : Caroline

Vol de nuit – premier épisode

avion

Hier, j'étais à Turin. En Italie. ça n'a l'air de rien comme ça mais il faut savoir qu'outre ma petite tendance à la compulsion alimentaire et ma très très légère hypocondrie, je suis frappée d'un autre mal: la phobie de l'avion. Autant dire que le moindre déplacement se transforme en épopée pathétique… Je vous raconte ?

MARDI

-14h: Mon patron arrive dans mon bureau, l'air très content de lui. Je connais ce sourire, j'ai peur.

– 14h01: "Tu pars demain à Turin jusqu'à jeudi. Génial hein ?!"

– 14h02: C'est vrai que c'est génial. Je suis une vraie baroudeuse, j'adore l'image de moi même que ça donne: "Mercredi, un ciné ? Ah, non, excuse, je suis à Turin, mercredi". En plus j'adore l'Italie. Les Italiens aussi. De toutes façons, je suis comme ça moi, je ne tiens pas en place. La vie de bureau non merci.

– 14h03: Je demande à mon patron si je pars de la gare de Lyon ou d'Austerlitz. C'est pour m'organiser.

– 14h04: Je pars de Roissy.

– 14h05: J'ignorais qu'il y avait des TGV qui partaient de Roissy pour l'Italie.

– 14h06: C'est pas un TGV c'est un Boeing, se marre mon patron.

– 14h07: Je vais prendre l'avion.

– 14h08: Mes enfants sont trop jeunes pour perdre leur mère. Tout ça pour aller en Italie. Alors que tout le monde sait bien que l'Italien est un voleur. Y'a qu'à voir la coupe du monde.

– 14h10: Je tente le coup du rendez-vous chez le dentiste impossible à reporter. Sans compter que j'ai des dossiers en retard. Mon patron n'a plus l'air content de lui. Encore moins de moi. Je fais genre que je rigolais.

– 14h15: J'appelle l'homme pour l'avertir que je pars à Turin demain. En avion.

– 14h16: L'homme trouve ça super.

– 14h17: Je lui raccroche au nez, je n'y crois pas qu'il puisse trouver super que je risque ma vie.

– 20h00: Je suis prostrée sur mon canapé, je regarde mon appartement avec la détresse d'une condamnée à mort.

– 20h10: Je demande pardon à l'homme de lui infliger une vie pareille. Je lui promets que si je m'en sors je démissionne. Quand on devient mère on ne peut plus se permettre d'avoir un métier aussi dangereux.

– 20h11: L'homme pense que documentaliste n'est pas un métier dangereux.

– 20h12: Le pauvre. Il fait tout pour cacher sa douleur. Je prends une vraie claque, là. S'il devait partir demain à l'autre bout de la planète, je ne suis pas sûre que j'aurais sa dignité.

– 20h13: L'homme me demande de faire le chèque pour le loyer.

– 20h14: Je trouve ça assez mesquin de penser à des choses aussi petites alors que c'est peut-être la dernière nuit que nous passons ensemble. En même temps je dois penser aux enfants. Ils n'auront peut-être plus de mère, la moindre des choses c'est que je leur assure un toit.

– 20h15: L'homme m'assure que ça n'a rien à voir avec Turin, c'est juste qu'on a deux semaines de retard pour le loyer et qu'on va payer une majoration.

– 20h16: C'est fou comme tout semble dérisoire quand on va mourir. Je lui fais son chèque quand même. Je sens une grande sagesse s'emparer de moi. Je suis complètement détachée des contingences matérielles.

– 20h20: L'homme me rappelle que c'est mon tour de lave-vaisselle.

– 20h22: C'est lui qui a raison. La vie continue. Il est d'un courage, je suis bluffée. J'espère malgré tout que quand on est mort on ne vide plus le lave-vaisselle.

– 2h00: Je me réveille en sueur. Je mets dix minutes à réaliser que je ne suis pas enfermée dans la soute.

– 2h15: Je respire avec mon ventre.

– 2h30: J'ai trop respiré avec mon ventre, j'ai envie de vomir.

– 4h00: Je vais regarder mes enfants dormir. Il sont tellement beaux. Ils ne se doutent de rien en plus. Je n'ai pas le droit de leur faire ça. C'est dégueulasse.

– 6h00: Je prie.

– 7h00: Le réveil sonne. Je ne veux pas partir. Je veux ma maman.

– 7h30: L'homme me serre fort il m'assure que tout va bien se passer.

– 8h00: Je dis au revoir à ma famille et à ma maison. Je m'envole ce soir à 19h00, je ne les reverrai pas.

– 8h01: Je réalise qu'à 19h00 il fera NUIT.

– 8h12: Alors là ça change tout. Il est hors de question que je monte dans un avion qui va décoller A L'AVEUGLE. Casse-cou d'accord, suicidaire, non.

A suivre…

Où sont passées les rondes ?

ellescarlettIl y a des événements qui passent à la trappe. L'actualité est parfois sélective et c'est dégueulasse. Non, vraiment. Parce que cette info valait la une des journaux, tout au moins celle de mon blog. Et je l'ai passée sous silence, comme ça, pour des raisons que moi même j'ignore, privant le monde entier – ouais, j'ai le melon grave, c'est comme ça, on est célèbre ou on l'est pas et moi je vous rappelle que je… ne le suis pas mais presque – de ce scoop capital: le Elle de cette semaine ne parle pas des rondes.

 

Si.

 

Ah ! ça vous sèche hein !

 

Il fallait bien que ça arrive, après sept semaines consécutives d'enquêtes fouillées sur le mal du siècle, Elle a jeté son tablier.

 

Pas de conseil minceur. Pas de page "spécial soutien gorges grandes tailles, osez le 85 C". Pas de recettes sympa et faciles pour ne pas reprendre les kilos de cet été. Pas de conseils, deux mois à l'avance, pour ne pas grossir pendant les fêtes. Pas d'analyse psychologique de Liv Tyler, l'actrice obèse d'Hollywood. Pas de "bah berk qu'elle est moche Nicole Richie avec toute sa maigreur qui la rend si hype". Pas de reportage saisissant sur "ma journée dans un jean taille 38". Rien. Non mais je vous assure, j'ai bien cherché, même pas un tout petit témoignage de fille pulpeuse qui fait des pipes comme une déesse. Nada, pas la trace d'un début d'un régime express.

 

Bon, en même temps ce silence assourdissant s'explique. Ben oui, quoi, en couverture du Elle cette semaine, c'est la grosse Scarlett. Alors bon, faut pas charrier, c'est déjà faire preuve d'un courage pas commun d'oser exhiber ce tas de graisse en une – je rappelle que l'actrice est systématiquement montrée en exemple dans les articles consacrés aux filles qui s'assument avec leurs kilos en trop – les rédactrices n'allaient pas en rajouter non plus.

 

Allez, sérieusement, moi personnellement ce numéro je le planque. Parce que cette fille, c'est une insulte à la nature tellement elle est belle. Surtout sur cette photo. Avec juste deux débardeurs de rien du tout – qui doivent malgré tout coûter un rein vu que c'est du Gucci – et ses cheveux d'un blond divin – David je retire tout ce que j'ai dit ton balayage il craint sa race, franchement va passer ton CAP "Johanson" et ensuite seulement tu auras le droit de retoucher à mes cheveux.

 

Bien sûr, il y a photoshop. Mais moi cette fille j'ai commencé à l'aimer dans l'Homme qui murmurait à l'oreille des chevaux. Elle avait 13 ans au plus et elle dévorait l'écran. Sa bouche était pulpeuse comme aujourd'hui, sa voix rauque comme si Lauren Bacall s'était planquée dans ce corps d'enfant. Et son regard vous transperçait déjà.

 

Vous l'aurez compris, je suis bluffée. Mais malgré tout ce Elle va partir à la poubelle parce qu'il n'est pas bon pour l'homme. Ben oui mon chéri, tu vieillis, il faut ménager ton coeur. Et cette fille c'est un aller direct pour l'infarctus.

Quand est-ce qu’on sait ?

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La scène se déroule dans un lit, parce que c'est toujours au lit qu'ont lieu les conversations les plus importantes. Les plus intimes aussi. Il et Elle chuchotent, serrés l'un contre l'autre.

Lui: Ils grandissent, hein, nos petits…

Elle: Et oui… Ce ne sont vraiment plus des bébés. Bientôt ils ne voudront plus qu'on les embrasse. Tu te rends compte ? Plus de calins…

Lui: Je ne veux pas qu'ils grandissent comme ça moi. C'est trop tôt, je n'ai pas eu mon compte. Il ne nous reste plus qu'à en faire un autre !

Elle: N'importe quoi ! Je croyais qu'on était d'accord, que c'était terminé ? Tu sais bien, ce serait compliqué avec trois enfants. On n'a pas la place. Avec mon travail, ça ne serait pas possible. Et puis on vient d'en sortir. Non, vraiment, c'est terminé.

Lui: Oui, tu as raison.

Après quelques minutes…

Elle: Tu étais sérieux ?

Lui: Non, je plaisantais, c'est juste que je suis nostalgique, mais au fond de moi je sais que c'est terminé.

Elle: Ah…

Elle se retourne dans le lit en s'éloignant ostensiblement de lui

Lui: ça va ?

Elle: Oui, ça va.

Lui: Ben non, ça n'a pas l'air. Qu'est-ce que tu as ?

Elle: Non, rien.

Lui: Allez, dis-moi.

Elle: Y'a que tu ne veux plus d'enfants. Y'a que c'est comme si j'étais ménopausée. D'un coup. Y'a que je vais avoir cinquante ans.

Lui: Dans quinze ans. Tu vas avoir cinquante ans dans quinze ans.

Elle: Oui et bien ça pourrait être demain puisque de toutes façons je suis hors service maintenant.

Lui: Mais enfin, tu es la première à dire que ce ne serait pas possible ? On était d'accord, non ?

Elle: Tu comprends rien ! C'est pas pareil si c'est moi qui le dit. Et puis là tu as réveillé mon instinct maternel. Du coup là, j'ai mal. Tu as fait joujou avec mon utérus. Tu lui as fait croire pendant deux secondes qu'il pouvait encore servir. Et ensuite tu lui as claqué la porte au nez. Sans aucun ménagement. Tu sais quoi ? C'est moche ce que tu as fait, c'est très moche.

Après un temps…

Lui: Tu es sérieuse ? Tu veux un autre enfant ?

Elle: Non, je ne crois pas. Mais je ne veux pas que tu n'en veuilles plus. Je veux que ça reste possible, je ne peux pas écrire le mot fin.

On s’était dit rendez-vous…

Dans une soirée, la ronde a retrouvé un ami de lycée, un de ceux qui à l'époque lui avait fait verser des larmes amères. Trop grosse pour lui, s'était-elle dit, trop moche, trop nulle, personne ne m'aimera jamais… Il avait en effet préféré qu'ils restent amis. Pendant des mois elle avait fantasmé sur le jour où elle lui en mettrait plein la vue. Ce jour chéri où il ramperait à ses pieds en pleurant qu'il s'était trompé.

Que la première qui ne s'est jamais fait ce genre de scénario me jette la première pierre. Sauf qu'en vrai, je ne sais plus où j'ai lu ça, quand on retombe sur ce mec qu'on souhaite scotcher d'amour, on est encore plus moche que le jour du fameux rateau douloureux. On regrette alors amèrement d'avoir rêvé de le rencontrer par hasard et de n'avoir donc pas eu le temps ou l'occasion de faire en sorte d'être au top.

En l'occurence, dans cette soirée de la vraie vie, dix ans après, il ne s'est pas passé grand chose, mis à part ces quelques mots échangés…

– "Alors comme ça, tu ne fumes plus ?"

– "Non, je ne fume plus. Je ne fais plus de régimes non plus. Tu vois, en dix ans, j'ai finalement réussi à changer. Un peu".

– "Tu sais quoi ? Ne change plus rien maintenant. Parce que ça te va bien de ne plus faire de régimes. Tu es… tu es bien".

Il y a des soirs, comme ça, où on se dit que vieillir ce n'est pas si mal. Il y a des soirs où l'on a l'impression très nette qu'il est temps de dire adieu à cette fille que l'on détestait tant. Il y a des soirs où par le hasard de retrouvailles, on mesure le chemin parcouru et où l'on se rend compte que l'heure de la réconciliation avec soi même a sonné.

Après ce compliment anodin, je l'ai regardé et je n'ai évidemment rien retrouvé de ce qui m'avait fait craquer en 1ère B…

Alors mes yeux se sont posés sur l'homme, le mien, avec ravissement et reconnaissance pour ce qu'il a su voir et comprendre. Et avec un peu d'étonnement qu'il parvienne à me supporter.

Ma liberté commence là où s’arrête la tienne.

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La scène se déroule un soir, après le boulot.

– Elle: Au fait, jeudi je sors avec mes collègues. ça ne te pose pas de problème ?

– Lui: Quels collègues ?

– Elle: Ben toujours les mêmes, Laurent, Pascale et Stéphane, pourquoi ?

– Lui: Tu l'aimes bien hein, ce Laurent ?

– Elle: Oui je l'aime bien, il est hyper drôle. Mais c'est juste un copain, tu le sais très bien. C'est même un collègue.

– Lui: N'empêche que tu l'aimes bien.

– Elle: Arrête.

– Lui: Non mais c'est juste que t'es déjà sortie la semaine dernière, alors je me dis que tu l'aimes bien.

– Elle: Ecoute, il faut que tu comprennes que moi j'ai besoin de voir du monde. C'est comme ça, je ne suis pas qu'une mère et une épouse. Je suis aussi une femme, tu vois ? Ce n'est pas bon d'être enfermée dans son couple. C'est pour nous que je sors aussi, tu comprends ? Pour qu'on ne se sclérose pas.

– Lui (narquois): Ouais c'est surtout pour aller picoler avec tes copains.

– Elle : Heu… Je… Non, pas seulement. Et quand bien même, j'ai le droit. Je suis libre que je sache, non ? On n'est plus au 19ème siècle. Je te rappelle qu'on a le droit de vote depuis un demi-siècle. Va falloir que tu sois un peu moins exclusif mon chéri. J'ai besoin de mon indépendance. Ce n'est pas contre toi c'est une question d'épanouissement personnel. D'ailleurs tu devrais faire pareil. Crois-moi jamais je ne t'empêcherai de sortir avec des copains. Je serai même RA-VIE que tu le fasses. Parce moi, que ce qui te fait plaisir me fait plaisir.

– Lui: C'est bon, c'est bon, Yvette Roudy. Sors avec tes copains mais le Laurent, là, il n'a pas intérêt à regarder tes seins.

– Elle (caline): T'es bête toi… Non mais tu sais, c'est important pour moi de bien m'entendre avec mes collègues. ça permet de décompresser, et puis ça rend le boulot plus humain, tu vois ?

– Lui: Je comprends, je comprends… Tiens, en parlant de collègues, tu sais, Patricia, et bien elle court avec Pierre et moi maintenant, le mercredi à midi. Et elle a été IMPRESSIONNEE par ma foulée.

– Elle (après un temps d'arrêt): Ah oui ? Et elle a rien d'autre à foutre que te regarder, cette garce ? Tu sais quoi ? Je t'interdis d'aller courir à partir de maintenant. Quelle salope tout de même. Elle sait que tu as des enfants ? Y'en a qui reculent devant rien, c'est incroyable. Et toi bien sûr, tu roucoules, hein ? Tu devrais avoir honte. Oui, honte, parfaitement. Tu n'as qu'à le dire si je ne te suffis plus. Tu sais quoi pour jeudi ? Et bien je vais mettre un grand décolleté.

La mangue parfaite

Elle était parfaite. La couleur d'abord. D'un orange doré inimitable. Et puis l'apparence, lisse, juteuse sans être spongieuse. La présentation était soignée, chaque moitié était précoupée, quadrillée comme un damier. C'était une mangue parfaite. A la fois douce et adiculée en bouche, fondante sans qu'aucun filament ne vienne se coincer dans nos dents. Oui, ce mercredi là, ma fille, mon fils et moi, nous avons mangé la mangue idéale. "La meilleure du monde", comme l'ont immédiatement baptisée les enfants.

C'était il y a longtemps, peut-être un an. Depuis, tous les mercredis, on tente de la retrouver. On part à la chasse aux mangues parfaites. Le rituel est toujours le même. Vers 12h30, on se rend, munis de crayons et de feuilles de papier, dans notre petit restaurant vietnamien préféré, juste à coté. On commande toujours la même chose, des nems pour mon fils, du riz cantonnais pour ma fille et un bo-bun pour moi. En attendant les plats, les enfants dessinent des princesses et des spiderman. Moi je fais des "ah" et des "oh" tellement c'est beau, et puis je rêvasse. Parfois aussi on parle, des copains, de Jean-Thomas le mytho qui cette semaine est un espion, d'Aïcha qui est devenue gentille, de Jade qui est trop forte à la corde à sauter ou de Théophile qui s'est fait baisser le pantalon à la récré, la honte.

On mange assez vite nos plats, qui ont le grand mérite d'avoir toujours le même goût. Ensuite, je pose toujours la même question, comme si le doute était possible: "On prendrait pas une mangue ?". Et immanquablement bien sûr, on commande le fruit chéri, avec trois cuillères s'il vous plait.

Quand elle arrive, on la jauge, chacun y va de son commentaire. Trop jaune, trop blanche, elle n'a pas l'air mure, elle est à point on dirait… Puis on attrape le premier morceau. Dès la première bouchée, le verdict tombe. Bonne mais pas assez sucrée, un peu fadasse, trop filandreuse, pas assez de jus, presque parfaite. Quelques fois, on se rapproche de notre idéal, de notre référence ultime, la mangue étalon, la meilleure du monde. La dernière fois, on était à deux doigts de décréter qu'on y était, mais finalement non, un poil trop acide. 

Je crois qu'on sait, eux et moi, au fond de nous, qu'on ne la retrouvera jamais. Je crois même qu'on sait que certaines des dizaines de mangues goûtées depuis étaient peut-être aussi bonnes voire meilleures. Mais voilà, elles n'y peuvent rien, la fameuse, la meilleure mangue du monde, est devenue un souvenir d'enfance.

Et qui peut rivaliser avec un souvenir d'enfance ?

Un matin, au lit

La scène se déroule dans un lit, un matin, après un réveil crapuleux…

(L'image n'a pas grand chose à voir avec la suite mais ça fait partie de mes incontournables…)

Elle: J'ai grossi. Au moins deux kilos.

– Lui: mrpfffffhhpfff…

Elle: C'est cette nouvelle pilule. Je ne vois que ça. Parce que sinon, on ne peut pas dire non plus que je me gave. C'est simple je ne mange rien.

– Lui: mmmmmmm…

Elle: Non mais je te jure, cette saloperie me donne ENVIE de manger du sucré. Je résiste je résiste, mais bon, parfois, je craque. Je vais apeler ma gynéco. J'ai déjà un terrain favorable, si les hormones s'y mettent moi je déclare forfait.

– Lui: mmmmmmmmm…

Elle: ça te dérange ?

– Lui: Quoi ?

Elle: Que j'ai grossi. ça te dérange ?

– Lui : Mais non…

Elle: AH !

– Lui (sentant qu'il vient de faire une GROSSE boulette, sans vraiment parvenir à savoir laquelle): Quoi, "AH !" ?

Elle: J'ai bien grossi, tu viens de le dire très clairement. Merci, c'est vraiment le moment approprié. Un vrai gentleman.

– Lui: Non mais t'es dingue, j'ai RIEN dit !

Elle: Je te demande si ça te dérange et tu me dis non. Donc IMPLICITEMENT tu admets que j'ai grossi.

– Lui: (gros, gros, très gros soupir)

Elle: Je te donne un exemple. Si tu me dis: "je perds mes cheveux. ça te dérange, que je perde mes cheveux ?", et que je te réponds: "Non, pas du tout". Tu comprends quoi ? Que tu perds tes cheveux, mais que ça ne me dérange pas. Alors que si je te réponds: "non mon amour, tes cheveux sont magnifiques, ils sont tous là", c'est différent.

– Lui, affolé: Je perds mes cheveux ?

Elle: Ne t'inquiète pas mon chéri, de toutes façons ça ne me dérange pas…

Banale, est-ce que j’ai une tête de banale ?

marieclaire"Ces femmes banales qui font craquer les hommes". ça vous fait hurler ou pas, vous, ce genre d'articles ? Je n'ai pas lu le contenu encore, hein. J'ai juste vu l'accroche en une du dernier Marie-Claire. Ouais, même pas honte, en plus de lire le "Elle" je lis le "Marie-Claire". Avant, non. Mais figurez-vous que Monoprix m'a abonnée à Marie-Claire. Gratos. Sans que je ne demande RIEN. Juste pour me remercier PERSONNELLEMENT de ma fidélité. Véridique. Le jour où je l'ai annoncé très fière à l'homme il est devenu livide. "Putain ce que t'as dû leur lacher…", est-il parvenu à prononcer avant de perdre connaissance.

 

N'empêche que Marie-Claire c'est pas mal. Moins fashion que Elle, moins branché maigrelettes. Des reportages photos très beaux sur des femmes qui vivent loin et différemment. Mais y'a aussi des articles de fond. Comme, donc, "Ces femmes banales qui font craquer les hommes".

 

En fait j'ai réagi en deux temps à la lecture de ce titre.

 

Premier temps: "chouette enfin un féminin qui parle de moi".

 

Deuxième temps: "Heu, ouais mais bon, finalement, banale, banale, est-ce que j'ai vraiment une tête de fille banale ?". C'est vrai, c'est quoi une femme banale ? D'où je suis une femme banale ? D'où on me traite ?

 

En gros, ce que veut manifestement nous apprendre Marie-Claire, c'est que certains mecs peuvent en pincer pour des nanas bof. Nooooooooooooooooon !

 

Parce que "banales", on est bien d'accord, ça veut dire "pas top", moyennement jolie, pas brillantes du ciboulot, genre qui tape pas dans l'oeil. Je ne sais pas vous mais sans le lire je sens donc que cet article parle d'une fille comme moi. Pas belle, mais pas atroce non plus. Moche foutue mais pas difforme. Pas un prix nobel, mais pas complètement lente du cerveau. En gros, moi, certes, mais aussi pas mal de mes copines. Ben ouais, désolée mes chéries, mais je suis au regret de vous apprendre que vous aussi vous entrez pile-poil dans le moule des femmes banales. Mes copines du monde réel mais sûrement aussi 95% de la gent féminine et du coup, re-désolée mes chéries, mais aussi pas mal de mes copines virtuelles. Oui oui, vous ! Surtout à partir de 30 ans. Donc en gros, ce qui a l'air de laisser sur le cul cette probablement brillante journaliste d'investigation – pas banale, elle, tu penses – c'est que des filles comme vous et moi parviennent… à se taper des mecs. Voire à les garder. Voire même, cas extrême, à leur faire des bébés.

 

Encore une fois, comme je suis vraiment une raclure d'hyper mauvaise foi je pars bille en tête, je brandis mon soutien-gorge de féministe comme une possédée – pendant ce temps d'ailleurs je vous dis pas comme mes deux copains relachés en profitent pour se faire la malle – au nom de nous les femmes qu'on opprime, alors que je n'ai MEME PAS LU ce passionnant dossier. Et qu'après tout, personne ne m'a dit – en tous cas personne de chez Marie-Claire – que j'étais une banal girl.

 

Mais je ne peux pas m'empêcher d'être énervée. Vous imaginez une seconde l'inverse ? "Ces hommes banals qui font craquer les femmes". Non. Sérieusement, avouez qu'on ne s'étonne quand même pas souvent que des mecs à la tête de flan séduisent des filles aux jambes de garce. Ou que des vieux machins fassent tourner la tête de jeunettes. Ou tout simplement que des mecs super banals parviennent à attraper des filles incroyables comme nous.

 

Parce que moi je vous le dis tout net, j'ai décidé que je suis pas une femme banale. Et que donc l'article de Marie-Claire ne me concerne pas. Donc je remballe mon soutien-gorge – allez, hop, les fuyards, on rentre à la maison – et je me tais.

Ta mère en bloomer

bloomerLes filles – désolée les mecs mais là c'est tout de même une info assez "fille" – j'ai une très très mauvaise nouvelle. Il y a quelques jours, je vous démontrais presque scientifiquement que la robe pull était aux rondes ce que le string est à la saucisse de morteau. J'en profitais pour tailler un gentil costard – mais un costard quand même – au bermuda. J'aurais pu aussi ce jour là vous dire tout le mal que je pense des leggins, ces caleçons qui n'en sont pas tout à fait et qui s'arrêtent juste au-dessus de la cheville, histoire de bien mettre en évidence que vous n'en avez pas. De cheville, je veux dire.

 

Bon, bref, il y a quelques jours donc, je me lamentais sur l'océan qui nous sépare de la mode dès qu'on fait plus de 22 kilos. Et bien croyez moi, vous avez tout intérêt à vous gaver de robes pull. Parce que là les filles, on s'en rend pas compte mais on mange notre pain blanc.

 

L'oversize, le skinny, le léopard, tous ces incontournables inmettables de l'hiver 2006 c'est du pipi de chat à côté de ce qui nous attend. Car la mauvaise nouvelle, j'y viens, ne vous impatientez pas, la voilà…

 

Attention tout de même, préparez-vous psychologiquement parce que ça va faire mal. Allez, je lache le morceau.

 

L'été prochain – et c'est le "Elle" qui le dit, donc ce n'est pas la peine d'émettre un doute sur la fiabilité de l'info – le must-have, la fringue qui tue la hype et toute sa race c'est… le combi-short.

 

Je pourrais m'arrêter là, ne pas développer, parfois rien n'est plus éloquent que le silence. Ou le rire. Mais il y a mieux. Sachez en effet mesdames que si le combi-short vous tentait moyen, il y a quand même une alternative, nous rassure "Elle":

 

Le bloomer.

 

Oui oui, le bloomer. Cette sorte de culotte bouffante que chez Cyrillus c'est ringard et que même sur un bébé de six mois c'est la honte. Non, vraiment, s'il y a des jeunes mamans qui m'écoutent, épargnez vos enfants, c'est un truc à les rendre psychotiques plus tard. En bloomer même le plus propre des bambins a toujours l'air d'en avoir plein sa couche. Si ce n'est pas une technique vicieuse d'humiliation, moi je ne m'y connais pas.

 

Le bloomer, c'est en quelque sorte l'équivalent pour la femme de ce phénomène étrange qui se remarque toujours chez VOTRE mec quand il plonge dans une piscine et que les poches de son maillot se remplissent d'air. A ce moment là on peut tout à fait qualifier ce qui remonte à la surface de l'eau, de bloomer.

 

Bref, quoi qu'il en soit, cet été, pour aller boire un cocktail en fin de soirée, les filles, on n'aura pas le choix, faudra enfiler notre slip bouffant.

 

Enfin vous peut-être. Parce que moi, c'est no way.

 

Remarquez, à bien y penser, je ne suis pas sûre que ce soit une si mauvaise nouvelle. C'est vrai, pour une fois, je ne vais même pas avoir les nerfs d'être discriminée – oui, parfaitement, DISCRIMINEE – par la mode. Parce que soyons honnête, moi la robe pull, je me la rêve. Les leggins avec les ballerines mimi aussi. Et le skinny dans les cavalières j'en parle même pas.

 

Pas contre, le bloomer, comment dire ?…

La ronde sur les ondes – Making off (suite et fin)

jetsetVoici donc la suite de ces jours où j'ai failli faire mon entrée dans le monde impitoyable de la jet set. Au cas où certains penseraient qu'il s'agit d'une interviouve à venir, je me dois de démentir, il est bien question de la chronique déjà passée sur Inter la semaine dernière. Je fais une sorte de flash back, quoi… Zoom arrière sur un instant fondateur, you see ?

Allez, repartons dans le temps…

Mardi

– 8h00: J'achète mon journal au kiosque à côté de chez moi. Je me demande si je continuerai à faire ce genre de chose, après. Le kiosquier me regarde à peine. Le pauvre, quand il saura, il regrettera sûrement de ne m'avoir pas plus prêté attention.

– 8h25: Je monte dans le 47.

– 8h26: Ce qui est sûr c'est que je prendrai toujours le bus. Je ne veux pas me couper des vrais gens. C'est dans cette réalité quotidienne que je trouve toute mon inspiration.

– 8h35: Une vieille dame vient de se planter devant moi, l'air mauvais. Elle veut la place assise. Vivement que j'aie mon chauffeur, les vrais gens c'est tout de même très chiant.

– 9h00: J'arrive à mon bureau, tous mes collègues sont là, à travailler, comme si de rien n'était. Mon patron me fait remarquer que je suis à l'heure et que ça se fête. Le pauvre, quand il saura.

– 9h45: A quoi bon continuer à travailler ? Dans quelques jours je n'aurai plus qu'à choisir entre la télé et la presse féminine. Je sens que ce sera difficile de départager ce petit monde. Tout ce que je sais c'est que TF1, jamais. Mougeotte, pas la peine de batailler t'auras jamais mon âme. Non, de toutes façons, je me suis toujours sentie très Canal. Daphné, Mlle Agnès et les autres, va falloir se serrer un peu sur le banc de la notoriété. Caro arrive…

– 11h00: Je crois que je vais aller me faire masser, là, tout de suite. Je n'arrive plus à regarder mes collègues en face, leur cacher la vérité c'est trop dûr. Et puis j'ai plein de tensions dans mon corps. Vivement que j'aie mon coach. Il parait que celui de Sophie Marceau fait des merveilles.

– 15h00: Mon patron voudrait me parler. Se doute-t-il de quelque chose ?

– 18h00: Je file en rasant les murs. Il faut que je me trouve une tenue correcte pour l'interview.

– 20h00: L'homme n'a pas l'air de comprendre qu'il me fallait ces ballerines Repetto à 120 euros pour l'interview. Il hurle les mots "téléphone" et "radio" comme s'il y avait un rapport.

– 20h30: "Mais bien sûr qu'il y a un rappooooooort!" vocifère-t-il.

– 23h00: Je tourne et retourne dans mon lit, je répète mon texte dans ma tête, j'ai peur.

Mercredi

– 6h00: C'est le grand jour. La gloire m'attend.

– 7h00: Mes toilettes aussi m'attendent. Je suis malade à crever. C'est ça aussi devenir une star. Après tout, Adjani vomit bien avant chaque entrée en scène…

– 7h00: Ok, la diarhée c'est moins glamour.

– 8h15: Je préfère ne pas trop me maquiller, je sens que D. aime les femmes au naturel.

– 13h00: Je m'éclipse du bureau et attends chez moi LE coup de téléphone qui changera ma vie.

– 15h00: D. n'a toujours pas appelé.

– 15h30: Je vérifie pour la 30ème fois que le téléphone est bien branché. Si ça se trouve c'est Free qui est en carafe. On n'aurait JAMAIS dû choisir le dégroupage total. C'était une erreur.

– 16h00: J'appelle l'homme et le remercie d'avoir très judicieusement choisi d'abandonner France Telecom quelques mois avant qu'on ne m'offre la chance unique de percer dans le monde des médias. Je l'avertis que je ne lui pardonnerai jamais de m'avoir fait rater la chance de ma vie. Tout ça pour économiser quelques malheureux centimes. ça manque de grandeur tout ça. Oui, parfaitement. Va falloir arrêter de jouer petit.

– 16h01: Double appel.

– 16h02: Je n'arrive pas à prendre ce putain de double appel.

– 16h03: Avant R1 et R2 ça marchait, merde. Je prépare mentalement une expédition punitive chez Free.

– 16h04: Je perds la ligne.

– 16h06: Je n'ai plus aucun ongle. Alors que je m'apprête à attaquer les phalanges le téléphone re-sonne.

– 16h07. C'est lui. D.

– 16h08: Je suis essouflée. Je suis assise, je n'ai pas bougé depuis trois heures et je suis essouflée.

– 16h10: Il faut dire que mon pouls dépasse allègrement les 150 pulsations minute. Alors forcément je manque d'air.

– 16h12: Je respire avec le ventre.

– 16h13: J'arrive finalement à m'exprimer. Plus je parle de moi, plus je me trouve intéressante.

– 16h15: J'adore ça. D. a l'air passionné par ma vie. C'est mille fois mieux que ma dernière séance chez mon rabat-joie de psy. Et en plus on paie pas à la fin. J'ai beau chercher je ne vois aucun mauvais côté à ma nouvelle vie.

– 16h16: On n'arrête pas de rire avec D., c'est incroyable ce qui se passe.

– 16h17: Il me dit que j'ai une voix de radio. Je meurs d'envie de lui demander de me pistonner. Mais je ne le ferai pas, j'ai ma dignité et puis ça gacherait tout.

– 16h18: "Embauchez moi. Je vous paierai. J'ai un codevi".

– 16h20: D. m'explique un peu gêné qu'il est lui même pigiste et qu'il ne connait pas personnellement le patron.

– 16h22: D. me demande d'arrêter de pleurer.

– 16h23: On finit par raccrocher, je sens que pour D. ce n'est pas facile de me quitter. Je lui promets de le rappeler très vite. Il me dit qu'il préfère qu'on laisse passer du temps. Le pauvre. Il sait au fond de lui que je suis déjà loin. Je n'oublierai jamais qu'il a été le premier à me donner ma chance.

– 16h24: J'envoie un mail à D. pour le remercier pour cet instant magique. Je lui demande de me prévenir du passage de l'émission.

– 20h55: Message de D.: "OK, vous prévient. Pas avant deux semaines. D'autres chroniques prioritaires avant. D."

– 21h00: Cet homme est brisé.

Deux semaines plus tard…

Jeudi

– 10h00: Mesage de D. "Vous passez demain. A plus. D."

– 10h10: Cet homme est d'une élégance… Revenir vers moi alors qu'il est en pleine souffrance. Chapeau bas.

– 10h12: Les 122 personnes que je connais sur cette planète sont au courant de mon passage à la radio demain. Demain c'est la consécration.

Vendredi

– 6h12: Le réveil sonne une heure plus tôt que d'habitude. Dehors il fait nuit. On dirait qu'on part en sortie de ski. L'homme met la radio.

– 6h18: Dans deux minutes je vais être mondialement connue. Pour l'instant je me sens exactement la même qu'avant.

– 6h20: J'ai ma tête collée contre la poitrine de l'homme alors je n'entends pas très bien. En même temps, c'est bon, un calin. Même quand on est célèbre.

– 6h21: A y'est. C'est à moi. Je ne reconnais pas ma voix. Je me sens toute drôle.

– 6h24: La présentatrice du journal va lire un extrait de mon blog. Woaouh. C'est "Apostrophe" ma parole.

– 6h25: Je n'y crois pas. Je suis mortifiée. 345 billets sur mon blog. Et il a fallu qu'elle choisisse ce texte sur les pompiers. Sur le cul des pompiers plus exactement. On ne devient pas célèbre en parlant du cul des pompiers. Personne n'est JAMAIS devenu célèbre en mattant le cul des pompiers. Si, Dave, peut-être. Adieu, veau, vache, cochon. Le pot au lait de la notoriété vient de se fracasser en mille morceaux qui font pin-pon en tombant par terre.

– 6h26: L'homme me sert fort. Il peut plus s'arrêter de rigoler à cause des pompiers. Il me dit qu'il est fier. Il dit qu'il m'aime. Il dit qu'il reste 14 minutes avant que le réveil ne se remette à sonner…