Mois : février 2012

J’aime #15

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Tout petit billet pour cause d'internet en vrac. Pour parvenir à me connecter – à la vitesse d'un modem des années 90 – je tente de capter la borne SFR public depuis ma chambre en usurpant le code de ma mère. J'ai l'impression d'être une passagère clandestine du web. Du coup, donc, je serai brève (en même temps que j'écris je suis obligée de pédaler pour maintenir le débit internet, c'est pas très commode).

J'aime la place du Châtelet et sa tour entièrement rénovée. Je n'aime pas qu'il fasse aussi froid depuis des lustres mais ce ciel bleu, ça compense un peu. (en réalité j'en ai ma claque de me peler le cul donc si quelqu'un là haut m'entend, merci de trouver une solution à ce merdier climatique).

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J'aime le mimosa. J'aime d'autant plus que le premier de l'année m'ait été offert par Rose et son père. Tous les dimanche, il lui murmure que c'est l'heure d'aller m'acheter des fleurs. Tous les dimanche Rose glousse de plaisir à l'idée de la surprise qu'elle va me faire. Et tous les dimanche, au moment de refermer la porte derrière elle, elle me demande de quelle couleur je les préfère, mes fleurs. 

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J'aime ces chaussures, j'aime qu'elles soient probablement importables, j'aime l'idée de me les offrir, j'aime un peu moins cette petite voix qui me souffle que ça n'est tout de même plus du tout de mon âge, voire que ça ne l'a jamais été.

J'aime que Rose soit descendue de sa chambre hier affublée de son pull en guise de robe et son headband à sequins mis de guingois. Je me suis dit qu'elle ne prononcerait peut-être jamais correctement la lettre "r" (en réalité elle a manifestement décidé de la supprimer de son alphabet) mais qu'on avait une petite chance qu'elle tienne un blog de mode. A tous les coups, elle, elle les achètera ces shoes Patricia Blanchet.

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J'aime les paillettes, mais j'aime un peu moins que l'un de mes enfants, je ne dénoncerai personne, en ait renversé une boite entière sur le canapé du salon. Depuis une semaine, non seulement le tapis brille, mais aussi la table basse, ma paupière gauche alternativement avec ma narine droite, les sourcils du churros et, plus inquiétant, le papier toilettes. Une vraie chienlit, la paillette.

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J'aime m'apercevoir à la fin de ce billet qu'il n'est finalement pas sans queue ni tête, ou du moins qu'il a un vague fil rouge. Ou rose. A paillettes.

Bon lundi.

Elles, avec Juliette Binoche

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La nuit dernière, Rose a profité de l'absence de son père pour se glisser dans mon lit vers deux heures du matin. Prétexte invoqué, un cauchemar qui l'avait réveillée. J'ai mollement protesté mais sans grande conviction. Ce corps encore petit et chaud de sommeil qui s'est blotti contre moi a fait tomber le peu de barrières qu'il restait. Quand je l'ai raconté au churros, il a souri et glissé qu'il n'avait pas intérêt à partir trop longtemps ou sa place serait définitivement occupée. Il n'a sûrement pas tort.

Sinon, le week-end dernier, les astres étant parfaitement alignés, nous sommes allés au cinéma. Vivement, je vous le dis, que nous décrétions les grands assez responsables pour garder leur soeur le samedi soir. Parce qu'entre les baby-sitter aux emplois du temps de ministre et l'addition plus que salée d'un resto/cinoche, je compte sur les doigts d'une main nos sorties ces derniers mois.

Nous sommes donc allés voir "Elles", le film avec Juliette Binoche et Anais Demoustier (entre autres). Gros coup de coeur pour cette histoire qui aurait pu être sacrément casse-gueule. J'ai aimé que le film évite de tomber dans une analyse pseudo-sociologique d'un soit-disant phénomène, à savoir celui de la prostitution étudiante. Parce que d'après ce que je sais, si cela existe, c'est loin d'être quelque chose de généralisé.

Le propos ne se situe donc pas sur ce plan, mais sur celui du corps, du commerce que l'on en fait, du plaisir qui peut parfois survenir dans un contexte qui ne s'y prête pas. De la façon dont on peut croire que se vendre ne nous fait pas de mal, ne nous touche pas. Alors qu'en définitive… si.

Surtout, ce qui est à mon sens passionnant, même si parfois un peu "grosses ficelles", c'est ce transfert que fait la journaliste incarnée par Juliette Binoche. Son enquête qui l'amène à interroger ces deux jeunes escort girls intervient à un moment de sa vie où tout semble se fissurer, son couple, son rôle de mère, son image, son corps. D'où une attirance inconsciente, un sur-investissement dans cette enquête, où de journaliste elle devient amie, mère, complice. On sent qu'il y aura un avant et un après dans la vie de cette femme, que plus rien ne sera complètement pareil. Et bizarrement, on se surprend à être plus inquiète pour elle que pour ses deux interviewées. Mais il est probable que j'aie fait moi aussi un transfert.

Bref, c'est un film sur des femmes, fait par une femme et probablement pour des femmes. Le churros n'a pas adoré, en tous cas pas autant que moi. Je crois, bien qu'il s'en défende, que c'est parce que les images y sont crues, sans réel glamour. Quand Juliette Binoche est filmée en plan serré en train de se masturber, son visage se tord, se congestionne, grimace. On est loin du fantasme masculin et d'une main qui va et vient lascivement. C'est un film sur la sexualité, pas celle des magazines, pas celle, édulcorée qu'on nous vend d'habitude. Une sexualité vue par et pour les femmes.

J'ai aimé, quoi.

J'ajoute que j'ai aussi aimé voir une actrice dans la splendeur de la quarantaine, aux hanches un peu plus larges qu'elle ne le furent, aux seins plus lourds qu'il y a vingt ans et aux traits qui témoignent – joliment – du temps qui passe. Juliette Binoche ne m'a jamais semblé aussi belle.

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Copyright Haut et Court pour les photos.

Ecriture, comptoir des cotonniers et médecine esthétique (et tarte au citron)

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Mère célibataire pendant que le churros joue les reporters à Deauville, je confesse une certaine lassitude depuis hier qui expliquera la brièveté de ce billet. En vrac et pas dans l'ordre, donc:

– J'ai malgré tout trouvé le temps de concocter des tartelettes au citron, mon péché mignon (après le flan, le cheesecake et les barquettes aux marrons). Je me suis inspirée d'une recette de Mercotte, tout du moins pour ce qui concerne la garniture, parce que ma pâte n'a pas du tout l'allure de la sienne étant donné que je n'avais ni les ustensiles adéquats ni la poudre d'amande. Mais cette crème au citron, jésus, elle est absolument parfaite, bien meilleure que la plupart de celles vendues en boulangeries qui ont un goût de produit vaisselle. Franchement je dois avouer m'impressionner moi même sur ce coup là.

– La fondation Bouygues Telecom lance un appel à candidatures pour un atelier d'écriture qui aura lieu au salon du Livre, du 16 au 19 mars prochain. Animé par l’écrivain Bruno Tessarech, ce stage est gratuit et vise à encourager les personnes qui aspirent à écrire. J'ai personnellement souvent été tentée de me confronter à d'autres apprentis auteurs et à voir dans quelle mesure on peut "apprendre" à écrire. Bref, je trouve cette initiative drôlement chouette et je ne saurais que trop conseiller ceux et celles qui seraient intéressés à envoyer leur lettre de candidature. Pour en savoir plus, c'est ici.

– J'ai revu ce week-end "La première étoile" avec mes enfants (Rose adore) et j'ai à nouveau pleuré comme une madeleine quand la petite fille chante "La montagne" de Jean Ferrat. J'adore ce film, d'une manière générale.

– Je tiens à vous informer que mes pérégrinations malheureuses au Monoprix ne m'ont pas empêchée de repérer des foulards canons tie and die avec des étoiles. Ainsi que toute une floppée de trucs verts. Bien entendu je n'aime pas vraiment le vert mais je ne me fais aucune illusion, la surenchère de cette couleur sur les blogs de modeuses dans les semaines à venir viendra à bout de mes réticences (je rappelle que j'ai fini par acheter des baskets compensées, tout est donc possible).

– Je dois changer mes lunettes et j'ai craqué pour celles de Ballibulle. Mais étant donné que j'ai également acheté la veste de Comptoir des cotonniers dont elle parlait dans un précédent billet, je crains de finir par lui faire peur si jamais un jour on se croise dans la vraie vie. (reçue, la veste est en effet canon, du genre bien plus belle portée que sur cintre) (par contre je n'ai pas encore trouvé d'occasion pour la mettre) (c'est quand même une veste à occasions)

– Depuis que j'ai fait ces photos d'identité, mon estime de moi même est restée dans le photomaton, lui même se trouvant sous terre, au métro Maison Blanche. Et seule la perspective d'avoir l'air aussi pétrifiée que Carla Bruni sur les derniers clichés qu'on voit d'elle me retient d'aller braquer un dermatologue.

Ta mère en short à la préfecture

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Avant d'arriver à la préfecture hier, je caressais l'espoir de tomber sur une bonne âme qui prendrait en pitié ces deux malheureux contraints peut-être d'abandonner leur projet de voyage de noce à retardement dans une contrée encore vierge de toute empreinte humaine (l'ïle Maurice). J'avais préparé les mouchoirs, convaincue de lui tirer des larmes. On a beau être fonctionnaire de police,  je crois que confronté au malheur d'un concitoyen, on n'en reste pas moins humain, non ?

Je sens que je vais vous étonner mais très curieusement, la dame qui m'avait été assignée lors du rendez-vous préalablement calé dix jours plus tôt n'en a rien eu à cirer de mes états d'âme. Eric.

Il faut dire qu'une fois de plus, nous nous sommes distingués le churros et moi. C'est à dire que nous pensions pouvoir fourguer tous nos docs en même temps histoire que notre dossier soit envoyé groupé au service des passeports biométriques (ce serait ballot que l'un bénéficie d'une procédure d'urgence et pas l'autre). Mais la dame n'a pas trouvé ça mignon. Problème, on avait vraiment tout mutualisé, les timbres fiscaux, les justificatifs de domicile, etc. Je vous passe les détails quant au recensement en panique de ce qui est à toi et plus à moi. La tension sous-jacente a rebondi d'un cran quand mon tendre et cher a commencé à geindre qu'il allait être en retard, croyant bon d'ajouter: "mais pourquoi tu m'as pris un rendez-vous à 9h30 et pas à 9h10 à ta place, alors que MOI JE TRAVAILLE ?" (dès cet instant j'ai su que le voyage de noces, de toutes façons, il avait du plomb dans l'aile). 

Après, la dame m'a déchiré le formulaire rempli sur internet au motif que je ne l'avais pas renseigné intégralement. J'ai eu beau expliquer que ça avait bugué et que j'en avais donc déduit que pour le passeport la date de naissance de mes parents n'était pas indispensable, il a fallu en noircir un nouveau. Et m'apercevoir que je calais sur l'âge de mon père. Et donc de ma mère dont je sais juste qu'elle a un an de moins. Devant mon hésitation, ma geolière m'a immédiatement aboyé qu'en cas d'erreur tout serait à refaire. Ce qui a déclenché mon syndrôme "je ne sais pas remplir un formulaire du premier coup". Le churros, lui, avait tellement peur (de moi surtout, je crois, vu qu'il n'était pas sans avoir remarqué que son "JE TRAVAILLE, MOI" me les avait un peu brisées)  qu'il en avait oublié le prénom de sa mère. Mais vraiment. Il m'est redevenu sympatique j'avoue.

Après il s'en est souvenu mais l'a mis dans la case de l'adresse. On partage le même syndrôme, ça m'a attendrie. Ce qui n'empêche que le "MOI JE TRAVAILLE" me restait encore bien coincé là où je pense.

Et tout a été à l'avenant. Au moment de mettre ma main sur le capteur d'empreintes, je me suis escrimée à essayer d'y caser le pouce alors que la dame hurlait qu'il ne fallait y mettre que QUATRE DOIGTS. A ce stade je n'étais de toutes façons plus du tout sûre de savoir si j'étais réellement de nationalité française et si je méritais vraiment que la République m'offre un passeport (façon de parler, parce que la République, à raison de 86 euros, elle se goinfre).

J'ai fini par arriver au bout de ce calvaire, juste à temps pour voir le fonctionnaire chargé du dossier du churros montrer les photos de mon de mari à deux collègues qui ont commencé à faire "non non non" de la tête. Le churros a tenté de blaguer, sur le mode "c'est un peu vexant tout de même".

Mais les monsieurs n'avaient pas tellement envie de rire.

"ça n'a rien à voir avec votre allure", ils ont dit gravement.  "Vous avez gardé votre écharpe".

Haaaaaaaaaaan.

Malfrat.

Evidemment, solidaire dans la richesse et dans la pauvreté et pour le meilleur comme le pire, j'ai immédiatement réagi: "Mais enfin, elle le disait, la dame du photomaton, qu'il fallait enlever tout ce qui couvrait le cou, c'est pas dieu possible que tu n'écoutes jamais les consignes, c'est comme les meubles IKEA, hein, POURQUOI LIRE LE MODE D'EMPLOI, TU ES TELLEMENT INTELLIGENT. FAUT DIRE QUE TU TRAVAILLES, HEIN"

Paf le chien.

Le monsieur il a tellement pris le churros en pitié qu'il l'a autorisé exceptionnellement à aller refaire des photos pendant qu'il lui gardait sa place. Moi j'ai pris un air entendu et j'ai tenté de mettre ma garde chiourne dans ma poche en jouant la complicité femme – femme. ça n'a pas du tout marché, elle m'a gentiment demandé d'aller vaquer à mes occupations vu qu'on en avait fini toutes les deux. Et à ma question "c'est quand que j'aurai mon passeport", elle a grogné "entre deux et trois semaines". J'ai vaguement balbutié que voyez-vous, c'est idiot mais on a prévu un voyage dans dix jours et est-ce qu'à votre avis, on peut quand même réserver, au cas où ça mette moins de temps mais bon c'est pas grave sinon, notez que je ne demande pas de passe-droit, même si j'ai UN BLOG.

"Au revoir madame", elle a dit d'un ton qui n'appelait même pas une réponse de pure forme.

Je m'en suis allée très dignement en ramassant tant bien que mal toutes mes affaires. 

Et j'ai laissé le churros se démerder avec son dossier en lui expliquant que j'avais un rendez-vous chez l'esthéticienne hyper important, suivi d'une partie de tarot avec l'amicale du 13è. La routine.

Je suis donc repartie et comme tout ça m'avait quand même un peu stressée, j'ai fait ce qui me détend toujours dans ces cas là: un tour à Monop. Une fois à la caisse, je sors ma carte bleue et tatonne au fond de mon sac pour vérifier que mon téléphone y est toujours. Je tatonne, je tatonne, je tat…

Et là, la sonnette d'alarme dans ma tête. Il n'y est pas. Calme, zen, il est dans ma poche. Non plus. Je paye comme un zombie, m'écarte un peu et déballe tout mon bardas sur une caisse désaffectée. Rien. Je retourne mes poches. Rien. Je tombe en larmes dans les bras du vigile et lui explique qu'à un moment au rayon fringues on m'a frolée, j'en suis certaine. Le vigile est désolé, me propose d'appeler mon portable et de refaire le chemin en sens inverse pour voir s'il n'est pas tombé dans le bac à légumes vu que j'ai acheté un avocat. Me voilà partie, flanquée du vigile qui a un peu peur je pense que je me barre avec son téléphone. Je fais sonner, rien, rien rien. Sans exagération aucune, je décrète que suis foutue.

JE N'AURAIS JAMAIS DU DEMISSIONNER.

Je repars en me disant que je vais aller porter plainte direct, pour récupérer un téléphone dans la foulée grace à mon assurance. Dans ma tête résonne l'avertissement d'une copine: "même si tu es assurée, il faut dire qu'on t'a AGRESSÉE. Sinon ça ne marche pas". Je commence à échafauder un scénario, le mec m'a arraché l'I-phone en pleine rue, comme ça, pas de témoin, mais il y a eu VIOLENCE monsieur l'agent, mettez-le sur le procès verbal, hein. 

Me voilà devant la préfecture, l'endroit même où je venais de passer un moment très charmant. J'entre et à la dame de l'accueil je commence à faire mon baratin, en lui demandant si c'est au même endroit qu'on porte plainte parce que figurez-vous qu'alors que je marchais tranquillement dans la rue on vient de M'ARRACHER MON TELEPH…

Je ne sais pas par quel instinct de survie je m'interromps. Peut-être la façon qu'elle a de me regarder, comme si elle me reconnaissait. Il faut dire qu'on n'a pas vraiment été discrets une heure auparavant. Je la vois qui passe la main sous le comptoir et je me dis qu'elle va sortir un flingue, ou bien qu'elle est en train d'activer une alarme, ou que… non, ce serait trop énorme, hein, alors que je viens de prétendre qu'on m'a ARRACHÉ MON… Mon TELEPHONE. Elle vient se sortir mon téléphone de sous son comptoir. Je veux partir avec cette femme là à l'Île Maurice, dieu m'est témoin.

Dans un geste empreint d'une grande humanité, elle me tend mon portable, fait comme si elle n'avait pas entendu mon mensonge d'Etat deux minutes avant et me conseille de m'en aller maintenant. Mais vraiment. Vite. Ce que je fais sans broncher. 

Comme de bien entendu il va de soi que mon premier réflexe – après avoir couru sur une centaine de mètres et eu la certitude qu'on n'avait pas lancé les flics à mes trousses a été d'appeler le churros pour lui hurler qu'à cause de la façon indigne dont il m'avait traitée et de tout ce stress négatif (parce que comme chacun sait il y a bon stress et mauvais stress), j'avais oublié mon Iphone à la préfecture et manqué tomber pour faux témoignage et dénonciation calomnieuse (j'avais tout de même réfléchi à un éventuel portrait robot de mon agresseur) (il ressemblait à s'y méprendre à Claude Guéant).

Voilà, c'est tout.

La photo c'est rien, c'est pour attirer les annonceurs.

J’aime #14

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Hier je suis allée faire mes photos pour mon passeport. C'était la première fois je crois que j'avais affaire à un photomaton qui me donnait des consignes – = qui m'aboyait après – pour que les clichés soient conformes aux règles de la République. Une expérience à part, quand même: Dégagez votre visage. Faites en sorte que vos cheveux ne dépassent pas du cadre. Enlevez vos lunettes. NE SOURIEZ PAS.. N'ouvrez pas la bouche. PRENEZ UNE EXPRESSION NEUTRE. ATTENTION NE SOURIEZ PAS. Forcément, à la première pose j'ai souri. Après, je me suis demandé si ma frange sur le côté pouvait être perçue comme une tentative de masquer mon visage. Je l'ai coincée derrière mon oreille. Je me suis dit que si je pouvais coincer ma frange derrière mon oreille, c'était que je n'avais pas vu Michel depuis trop longtemps. J'ai réalisé que j'allais devoir supporter ma tronche pendant dix ans avec une frange derrière l'oreille ET des racines. Je me suis demandé si une fois ma blondeur retrouvée je ne serais pas dans l'illégalité au regard de cet ombré hair totalement involontaire que j'arborais sur ces photos. Mes pensées tellement idiotes m'ont fait sourire. TCHI TCHAAA. Pile au moment où l'appareil m'a flashée. J'ai rappuyé sur le bouton parce que cette version ne me convenait pas. J'ai recoincé ma frange. J'ai vérifié que mes cheveux ne dépassaient pas du cadre. Ils dépassaient. J'ai envisagé un chignon vite fait. Je me suis interrogée quant à la légalité du chignon. J'ai fini par cacher mes cheveux derrière mon dos. J'ai pris une expression neutre. J'ai pris une expression tellement neutre que sur le cliché on aurait dit Florence Cassez. J'ai tenté le sourire avec les yeux. Ça m'a fait loucher. La machine a hurlé NE SOURIEZ PAS. J'ai repris une expression neutre, j'ai coincé ma frange derrière mon oreille, j'ai vérifié que le fond n'était surtout pas blanc parce que sur Internet ils disaient qu'il ne fallait surtout pas un fond blanc. Je me suis demandé pourquoi il fallait un fond gris ou bleu mais pas blanc. J'ai tellement réfléchi que j'ai ouvert la bouche. J'ai repris une expression neutre. J'ai constaté que j'avais un cerne très développé sous mon oeil gauche. Je me suis demandé si on disait un cerne ou une cerne. Je n'ai pas trouvé mais cette fois-ci je n'ai ni ouvert la bouche ni souri. L'appareil a flashé au moment où ma frange est tombée de derrière mon oreille. J'ai décidé de braver l'admnistration et de garder celle là parce qu'en fait, quand je coince ma frange derrière mon oreille, on ne voit plus qu'une chose: mes oreilles décollées.

Quand les photos sont sorties j'ai constaté que j'avais finalement tort de détester mes lunettes. Parce que sans, je ressemble à mon grand-père. Je crois qu'à tout prendre je préfèrerais ressembler à ma grand-mère. 

Bref, j'ai fait un photomaton.

Pour un passeport qui ne me sera certainement pas délivré à temps pour que nous puissions faire enfin péter le voyage de noces, cinq ans après notre mariage. 

A part ça, j'aime…

J'aime cette réponse de Claude Halmos dans Psychologies Magazine à une question de Rose, réponse qui tombe je trouve vraiment à pic. Et dont la justesse m'a fait pleurer (mais ça n'est pas un critère, je pleure beaucoup). Si vos enfants vous posent ce genre de colles, transmettez les moi et je les ferai passer, Claude Halmos est souvent en quête d'interrogations de petits. Elle en reçoit beaucoup d'adolescents, mais moins des plus jeunes.

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J'aime ces photos d'Ambre et le fait qu'elle soit venue mercredi dernier déjeuner avec nous comme au bon vieux temps. J'aime l'idée que d'ici quelques semaines, quatre titres sortent enfin. Un EP, ça s'appelle.

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J'aime cette proximité qu'ont mes filles. Je croise les doigts pour qu'elle ne s'efface jamais.

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J'aime mes UGG, parce qu'elles sont moches, parce qu'elles me tiennent chaud et parce qu'à chaque fois que je les regarde je pense à Istanbul, à ce petit magasin où je les ai achetées pour presque rien. Je crois qu'Istanbul reste à ce jour un des souvenirs les plus merveilleux de ma vie.

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J'aime le souvenir de ce cri perçant dimanche matin, d'une Rose éberluée par les trois flocons qui tombaient. Cette joie de la neige, c'est quelque chose qui définit si parfaitement l'enfance que j'en ai eu mal. (j'ai pleuré)

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J'aime enfin Les hommes de l'ombre, la série de France 2 qu'on peut regarder légalement en streaming. Bruno Wolkowitch est probablement ce qui se fait de plus chaud sur le petit écran, juste avant Grégory Fitoussi, que je kiffais déjà dans sous le soleil (il était le seul à jouer correctement) et que je surkiffe dans Engrenages. Bon par contre on a perdu Nathalie Baye. Non parce que si cette femme à l'air constamment éberlué et à la diction rendue difficile par l'injection massive de botox dans ses sillons naso-géniens est réellement Nathalie Baye, que je sois foudroyée.

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Bonne journée.

L’être et le Guéant

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Ce week-end, un pas de plus vers la lepénisation de la droite républicaine a été franchi par celui qui parait-il est notre ministre de l'intérieur. Une petite phrase, qui a suffi à mettre le feu aux poudres de twitter dès samedi soir et qui fit les choux gras de la presse dès le lendemain. Quelle est-elle, cette phrase évidemment sortie du fameux et si pratique contexte ? "Toutes les civilisations ne se valent pas". Bon mot sorti devant une assemblée conquise d'avance, faite de députés de la majorité et d'étudiants de l'UNI, un syndicat pas vraiment réputé pour ses prises de position progressistes.

Le discours de Guéant devait rester à huis-clos mais, c'est ballot, il a "fuité".  Une fuite bien aidée je pense, tant ce message à l'intention des électeurs potentiels de Marine Le Pen tombait à point. Dimanche en effet, le JDD (le journal de droite) nous sortait un scoop exclusif. Selon un sondage, si Marine Le Pen, mais également, Nihous, Villepin, Morin et Lepage (tous d'obédience de droite) n'étaient pas présents au premier tour, "la dynamique Hollande serait cassée". Et Sarkozy ferait jeu égal avec le candidat socialiste.

Au deuxième tour ? Ah, ça, par contre, on ne saura pas, le JDD n'ayant pas jugé opportun de poser la question (peut-être n'avaient-ils pas les moyens de payer l'institut de sondage au delà d'une certaine somme, allez savoir). 

Personnellement, après une enquête assez poussée, je suis en mesure de vous annoncer que s'il n'y avait pas d'élection, Sarkozy conserverait toutes ses chances.

Vous m'aurez comprise, je ne peux pas m'empêcher de penser que ce message à peine codé de monsieur Guéant n'avait rien de fortuit et visait à rassurer les partisans de Marine Le Pen: "si jamais elle n'était pas là, ne vous inquiétez pas, nous non plus on ne les goûte pas, les "pas pareils"".

Quand aux justifications du lendemain, selon lesquelles Claude Géant voulait juste dire qu'il préférait les peuples démocrates et pacifiques aux barbares qui lapident les femmes et font péter des bombes, pardonnez-moi mais elles ne tiennent pas debout cinq minutes. S'il avait vraiment voulu exprimer ceci, il eut suffi de remplacer "civilisations" par "régimes politiques". On aurait un peu plus vite compris que notre ministre de l'intérieur (et surtout pas de l'extérieur) n'aime tout simplement pas les méchants. 

Je ne sais pas pourquoi cela m'a tant mise en colère, d'autant que la semaine dernière, il avait déjà bien commencé en vantant l'intégration des gentils asiatiques, exemple s'il en est d'une immigration qui ne pose pas de problème, pas comme… suivez mon regard. En fait, je sais très bien pourquoi cela m'a tant choquée. Parce que jour après jour, un discours nauséabond est légitimé parce que prononcé par des personnes qui ne sont certes pas de mon bord mais dont je pensais jusque là qu'ils partageaient certains principes inaliénables. Las, désormais, on aura intégré qu'il n'y a absolument rien de mal à penser et à déclarer que "certaines" civilisations (qui par le plus grand des hasards sont installées pour la plupart au "Sud") sont inférieures aux autres. Un fait acquis qui justifie le refus de "les" accueillir chez nous, de leur accorder le respect, de pomper en toute vergogne leurs ressources ou d'aller faire la guerre chez eux, pour leur bien. Des arguments qui n'ont rien à envier à ceux de nos ancêtres les colons. 

J'ignore si toutes les civilisations se valent, en revanche je suis convaincue que certains hommes ne valent pas grand chose.

Edit : j'ai hésité à enbrayer avec des "j'aime" du lundi, mais je crois que ça n'aurait pas beaucoup de sens. Ce sera pour demain.

Edit2: le titre est un emprunt à un tweet lu ce week-end que j'ai trouvé assez percutant.

 

Presque rien

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Charette, charette, charette. Cette semaine comme la précédente n'a été qu'une course contre le temps que je suis assez convaincue de perdre. Ce qui explique l'absence de billet mercredi et la teneur quasi inexistante de celui-ci.

Hier soir, j'étais à un truc de boulot à Puteaux, dans une tour. En attendant mon rendez-vous, je n'ai pas résisté à la tentation de prendre quelques clichés de la vue qui s'offrait à moi. Le ciel était incroyablement bleu et le soleil se reflétait dans les tours de la défense. Je me suis une fois de plus rappelé combien j'aime Paris. En dépit de tout, j'éprouve un attachement presque douloureux à cette ville devenue la mienne.

Et puis sur le chemin du retour, un homme manifestement sans abri s'est assis à côté de moi dans le tram, à la recherche, j'imagine, d'un peu de chaleur. Je me suis alors dit que cette vue n'était peut-être qu'un mirage. Et que ce ciel d'hiver si bleu quelques heures plus tôt n'augurait pour cet homme rien de bon, pas plus que pour les centaines de campeurs du bois de Vincennes. Mes pensées s'entremêlaient avec la radio que j'écoutais depuis mon téléphone. Un chercheur y expliquait que le soleil mourrait dans 5 milliards d'années, phénomène que l'espèce humaine n'aurait pas le loisir d'observer, puisque nous devrions avoir disparu bien avant. J'ai eu un vertige. Et puis l'homme est descendu du tram, partant affronter le froid glacial. Il devait se foutre comme d'une guigne de l'explosion du soleil ou de la disparition des dinosaures. Parfois, la vie n'a absolument aucun sens.

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Rien n’est trop beau, de Rona Jaffe (et d’autres choses)

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Comme je le disais dans les commentaires récemment, j'ai calé sur un bouquin porté aux nues dans toutes les rubriques littéraires de magazines en décembre. "Freedom" de Jonathan Franzen. Sur le papier, il avait tout pour me plaire: une histoire de trio amoureux sur fond de rétrospective de ces 30 dernières années aux Etats-Unis. Je ne vais pas dire que c'est un mauvais livre, je vois très bien ce qui a pu séduire les critiques et les lecteurs conquis. Le style est d'une perfection très universitaire, les personnages sont campés comme seuls je trouve savent le faire les auteurs américains, il y a une atmosphère, une analyse très fine de la société américaine, des renoncements de ceux qu'on nomme aujourd'hui bobos, un regard sans pitié sur leurs compromissions, etc.

Sauf que… sauf que je me suis copieusement emmerdée. Et qu'aux trois quarts j'ai décidé, et cela ne m'arrive que très rarement, de lâcher l'affaire. J'ai évidemment un peu honte, parce qu'à priori, il fait partie des incontournables du moment. Mais en même temps, lire pour moi est un plaisir non coupable qui raccourcit mes nuits. Quand cela devient corvée, le manque de sommeil n'a vraiment aucune justification.

Du coup, j'ai décidé d'embrayer sur un livre friandise, acheté à Noël entre deux cadeaux. Un livre bonbon, qui donc se passe comme il se doit – condition sine qua non du livre bonbon – à New-York. Et traite de la vie et des amours de jeunes femmes travaillant dans une maison d'édition. Sur un mode chorale. 

Là où "Rien n'est trop beau", de Rona Jaffe, puisque c'est de cet ouvrage qu'il s'agit, diffère d'un banal et énième opus de chick lit', c'est que c'en est en quelque sorte l'ancêtre. La genèse. Premier du genre, si vous préférez. Ecrit dans les années 50, il raconte le parcours de quatre filles arrivées à New-York comme on monte à Paris, pour faire leur vie. Si le style, un peu désuet, n'a absolument rien de "Franzien"  ce bouquin est pourtant un page-turner comme on les aime. On s'attache à Caroline, Barbara, April ou Gregg. Leur naïveté, leur désir d'émancipation, en fait les pionnières d'un féminisme non revendiqué mais bien réel. Dans ces années là, le simple fait de décider de travailler avant de passer par la case mariage était en soi un acte politique.

Sauf que. Sauf que ces héroines, à l'instar de tous les personnages féminins secondaires, n'ont malgré tout qu'une seule idée en tête. Trouver le mari qui les libèrera du joug de leurs patrons et les fera entrer dans le rang des femmes respectables qui n'ont pour seule préoccupation de pondre des enfants et d'assortir les rideaux du salon au canapé. Je ne sais pas dans quelle mesure l'auteur porte un regard critique ou non sur ses personnages. J'ai plutôt lu ça comme un documentaire et de ce que j'ai compris de l'avant-propos, c'était un peu l'enjeu du livre, le premier jamais écrit sur ces abeilles travailleuses, payées au lance-pierre sans réelle perspective d'évolution autre que celle de devenir secrétaire en chef. Ce qui peut rendre assez compréhensible l'aspiration au mariage.

Il y a du Mad Men dans les dialogues et les descriptions, il y a quelque chose des nouvelles d'Edith Wharton aussi. Il y a un embryon de ce qu'on verra des années plus tard dans des séries comme Sex and the city. Complicités féminines, alcool à gogo, coucheries, etc. Mais il y a surtout ce poids du regard de l'homme, cet enfermement des femmes, contraintes souvent de céder aux avances de leurs patrons sous peine d'être virées, gentiment invitées aussi à se faire avorter et en silence s'il vous plait.

C'est amusant, parce que ce qui ne se présente donc que comme un bouquin sans prétention – et qui fut un best seller incroyable à l'époque – est en réalité une peinture romancée mais je pense très réaliste malgré tout de la société new-yorkaise des années 50. Reste à savoir dans quelle mesure tout cela a-t-il vraiment évolué. Je suis de celles qui se revendiquent féministes sans rougir, convaincue que l'indépendance financière est un gage de liberté non négociable. Pourtant, force est de reconnaitre et d'observer que tout le monde ne partage pas cette conception. Peut-être parce que rien n'est fait pour permettre aux femmes, toutes les femmes, pas uniquement les bac +5, de s'épanouir à l'extérieur du foyer. Rien n'est fait pour encourager les mères de famille à conserver une activité, quand grossesse rime avec placard et petite enfance avec galères de crèche.

Plus de 50 ans ont passé et pour beaucoup d'entre nous aujourd'hui, être mère au foyer représente encore souvent un refuge plus rassurant et épanouissant qu'un emploi. Je ne suis pas certaine que ce soit très positif, même si pour avoir bossé près de dix ans dans un environnement très peu propice à la vie de famille, je peux comprendre. J'ai la vague impression d'avoir trouvé une sorte de troisième voie avec ce choix de la vie en free lance. Même si régulièrement, je me roule par terre pour obtenir du churros qu'il prenne une journée enfant malade, étant donné que dans "bosser chez soi", il y a certes "chez soi" mais juste avant, il y a "bosser". 

Bref, c'était un billet complètement désorganisé comme je sais si bien les écrire, mais piochez-y ce qu'il vous plaira !

Edit: J'ai cru comprendre que certaines s'étaient inquiété hier en raison de l'absence de billet, don't worry, simplement un emploi du temps un peu trop chargé ces derniers temps. Mais merci.