Catégorie : Instants douloureux et petites humiliations

Parle à mon cul

Tout pour être plus belle de dos". C'est ce que nous promet le Elle de cette semaine. Histoire de nous rappeler qu'en effet, le bourrelet du ventre qu'on essaie de camoufler du mieux possible avec une blouse un peu large, c'est rien comparé à l'énorme popotin qu'on se trimbale quotidiennement, sans qu'il ne nous soit – heureusement – imposé de le voir, mais que le reste du monde moque en silence, c'est sûr.

 

Donc, intriguée et pleine d'espoir, la ronde se précipite sur son magasine chéri – et pourtant ô combien souvent détesté – histoire de voir à quelle sauce son cul pourrait être mangé… Outre les conseils judicieux prodigués par de filles pourvues de fesses ressemblant à de charmants abricots veloutés, sur laquelle la ronde reviendra plus tard, "Elle" nous propose, dessins à l'appui, un inventaire de ces petits défauts de fessiers qui nous pourrissent la vie. Pour chaque type de cul, des astuces vestimentaires sont suggérées, afin de "tirer parti" de nos imperfections. Sur le principe, rien à dire.

 

Seulement voilà… il y a certes la fille aux fesses basses, la fille à la culotte de cheval, la fille aux fesses plates, ou celle aux grosses fesses. Mais il n'y a pas la fille AUX GROSSES FESSES BASSES ET PLATES ET A LA CULOTTE DE CHEVAL… Du coup, la ronde est perdue: en cas de fesses basses, il faut porter des robes droites. Mais si culotte de cheval il y a – et oui, il y a – surtout pas malheureuse! Idem pour le jean. En cas de gros cul, qualifié de "sexy" par la facétieuse journaliste, "ni taille haute, ni taille basse, le jean doit enrober la hanche et souligner la naissance de la taille" (heu… ????). En revanche, en cas de cellulite, il faut choisir une taille semi-haute (re-heu… ?). Mais si votre pétard en plus d'être bas est également plat – si si, c'est possible – c'est fichu. Pour un cul raplapla, rien ne vaut en effet une taille basse. Totalement proscrite par contre en cas de petites jambes et donc de cul bas. Ah, parce que oui, j'oubliais, "Elle" nous révèle un truc complètement dingue: quand votre postérieur semble trainer sa misère, "ce qui pêche, ce n'est pas vos fesses, ce sont vos jambes"… Vous pensiez n'avoir qu'un problème de postérieur ? Raté, vos jambes aussi sont bonnes à jeter.

 

Bref, la ronde finit par refermer rageusement le magasine, constatant une fois de plus qu'elle n'entre dans aucune des catégories proposées. Elle continuera donc de s'habiller tant bien que mal et de tourner dignement le dos à son cul. Après tout, il ne mérite que ça.

Sous les jupes des rondes, épilogue ?

Une fois n'est pas coutume, un petit message d'espoir spécifiquement destiné à toutes les filles dont les cuisses se touchent… Il y a quelques jours, je remettais au goût du jour un billet écrit au printemps, sur les souffrances tapies sous les jupes des rondes.

 

Et là, une lectrice avisée et généreuse, Marilou, m'a fait part d'une découverte que je n'hésiterais pas à qualifier de bienfait pour l'humanité: la crème Nok, d'Akiléine. Rendons à César ce qui est à César, c'est Hélène qui parla la première de ce produit magique sur son blog 100% filles, vantant ses qualités exceptionnelles. Enrichie au beurre de Karité, cette pommade protégerait l'épiderme des inflammations dûes aux frottements intempestifs.

 

Curieuse mais sceptique, je me suis rendue dans une pharmacie acheter un tube de Nok. Délestée de 10 petits euros – je crois que j'aurais pu donner dix fois plus pour une telle cause – je suis repartie chez moi, impatiente d'essayer l'onguent.

 

Dès le lendemain, ce fut chose faite. Texture un peu épaisse, odeur agréable. J'ai massé longuement mon entrejambe jusqu'à pénétration totale et je suis partie travailler, pas tellement légère mais néanmoins court vêtue…

 

A chaque pas, je m'attendais à sentir les prémices d'une brûlure. Mais rien de tel n'arriva. Bien sûr, mes cuisses n'ayant pas réduit de moitié dans la nuit continuaient de s'embrasser à chaque enjambée, mais sans s'embraser. La peau lubrifiée glissait sans s'irriter. Après une journée de marche, aucune souffrance n'a altéré mes pérégrinations.

 

Voilà, rondes de tous les pays, sachez que le salut est à portée de pharmacie. Pour dix euros vous pourrez mettre à l'air vos gambettes et vous sentir… femme.

Sous les jupes des rondes

Une fois n'est pas coutume, je republie cette note, écrite dans les premiers jours de ce blog. Disons qu'elle est de saison…

"L'été arrive, les filles vont se dévêtir et les jupes vont raccourcir", se réjouissaient récemment deux amis. Oui, l'été arrive. Et cette nouvelle est loin de ravir la ronde…

 

Avec les beaux jours, il faut dire adieu aux grands pulls et manteaux qui certes ne cachent rien mais sont autant de remparts entre son corps et les regards inquisiteurs. Au revoir aussi, les bottes moulantes qui galbent le mollet.

 

Qui dit chaudes journées dit aussi jambes nues. Terminé, l'effet ventre plat des collants amincissant. Envolée, l'illusion d'une jambe fuselée grâce au dieu lycra.

 

L'été apporte aussi sont lot de désagréments. Les pieds gonflés sont sciés par les brides des chaussures estivales. La ronde s'essoufle plus vite. Elle transpire plus que la moyenne et souffre de maux de tête dès les premières chaleurs.

 

Mais surtout, l'été signifie pour la ronde l'apparition d'un syndrome aussi douloureux qu'honteux: les "cuisses qui frottent". Cette affection qui peut faire sourire à première vue, est dûe à l'excédent de gras se situant en haut des cuisses. Celles ci frottent l'une contre l'autre à chaque pas effectué. Avec la chaleur, les jambes ont tendance à gonfler, ce qui ne fait qu'accentuer le phénomène. Au départ, la sensation est tout juste désagréable. Mais en cas de marche prolongée, les peaux s'échauffent et les cuisses n'en finissent pas de se blesser mutuellement. Comme du papier de verre frotté sur des plaies à vif. En fin de journée, l'entrejambe est en sang et la brûlure est insupportable. Pourtant, la ronde préfèrerait mourir plutôt que de parler de cette meurtrissure.

 

L'été approche et les garçons se réjouissent. Ils sont loin de se douter des souffrances tapies sous les jupes des rondes…

Ces petits riens

Point n'est besoin ce matin de monter sur la balance. Tous les indicateurs du kilo repris ont viré au rouge:

Petite culotte: semble décidée à se coincer dans mes fesses. Disgracieux et désagréable

 

Pantalon: a rétréci de deux ou trois centimères. Impression "feu au plancher" des plus élégantes

 

Tunique: les coutures des manches sont entortillées autour de mes bras. Je ressemble à un saucisson

 

Seins: veulent à tout prix s'échapper de mon soutien-gorge. On pourrait croire que j'en ai quatre

 

Pieds: sciés. Rebondissent de mes chaussures

Ventre: en boudin.

Rue hostile

Marcher dans la rue, bomber le torse et regarder droit devant soi. Croiser un groupe de garçons et ne pas flancher. Continuer son chemin, ne pas soutenir leur regard, ne pas baisser les yeux. Serrer très fort les poings dans ses poches et prier pour qu'ils ne la voient pas. Passer tout près d'eux, en tremblant. Sentir son coeur taper plus fort. Frôler un des garçons qui s'est ostensiblement mis en travers de sa route, sans accélérer le pas. S'éloigner et retrouver peu à peu son calme, au fur et à mesure qu'elle prend de la distance.

Entendre, alors qu'elle ne s'y attendait plus, la rumeur des rires mauvais. Recevoir finalement en plein coeur l'invective hostile, plus affutée que la lame d'une épée: "Hé, la grosse !".

42, voire 44

Il y a deux jours, la ronde a pris son courage à deux mains. Elle est entrée dans un grand magasin avec la ferme intention de trouver un ou deux vêtements, histoire de ne pas entamer la belle saison sans quelque chose de nouveau. Le premier espace était celui d'une marque célèbre pour ses publicités mettant en scène des mères et des filles, sans qu'on sache parfois laquelle est qui…

 

Sans aucun espoir de trouver quoi que ce soit à sa taille, la marque étant également réputée pour ne pas vraiment s'intéresser aux filles pulpeuses, elle prit malgré tout le temps de caresser les étoffes fragiles, d'admirer les tuniques soyeuses et étroites, et de contempler les robes immaculées et brodées, dans lesquelles même un seul de ses seins n'aurait pu entrer. Alors qu'elle levait les yeux pour attraper un tee-shirt – seul article susceptible de lui aller – elle vit ce petit mot collé en haut d'un rayon:

 

"Nous informons nos aimables clientes que nous n'exposons que les tailles 36, 38 et 40. Pour le 42 voire le 44, nous vous conseillons de vous adresser à nos hotesses"

 

Comme on a pu déjà le constater, la ronde peut vite avoir la moutarde au nez et rapidement sentir l'énervement monter. "42, voire 44…". Ce qui la heurtait le plus, à bien y réfléchir, c'était ce "voire", l'expression d'une probabilité si faible et d'une éventualité si peu imaginable qu'il n'était presque pas utile de la mentionner. Le "voire" signifiait non seulement que la possibilité qu'une cliente réclame une telle taille était quasi nulle mais également qu'il n'y avait que très peu de chances que le magasin ait en l'occurence un tel modèle en réserve.

 

Si la ronde fulminait, alors qu'elle n'avait de toutes façons pas l'intention d'acheter quoi que ce soit, c'est qu'elle réalisait qu'elle était ce "voire", cette monstruosité, ce cas particulier.

 

Alors elle s'en alla, tournant le dos aux exquis habits qui de toute évidence n'avaient pas été façonnés pour elle. Elle pensa qu'elle ne devait pas être la première à se sentir ainsi poussée dehors par cette affichette. Les rondes dépensent en effet une telle énergie à passer inaperçues dans les rayons, que jamais au grand jamais elles n'auraient le courage d'aller réclamer du 42, voire du 44… Et le pire, se dit la ronde, c'est que les responsables du magasin le savaient bien…

Le supplice des chaussures de ski

Sur des skis, la ronde a toujours eu l'impression d'être légère. Depuis toujours, skier lui est naturel et ce sport est le seul, oui vraiment le seul, dans lequel elle n'est pas à proprement parler ridicule. A bien y réfléchir, si la ronde est à l'aise sur les planches, c'est probablement parce qu'en glissant, elle en oublie son poids. Celui-ci devient même un atout, lui permettant d'aller plus vite et de coller à la piste.

 

Bref, sans prétendre au titre de championne, la ronde dévale les bleues, rouges et même noires avec parait-il, un peu de style. C'est dire si ces quelques jours sont attendus chaque année.

 

Pourtant, cette fois-ci, un obstacle de taille faillit l'empêcher de se livrer à son sport préféré.

 

Les chaussures. De ski.

 

Plus un magasin de location ne propose les bonnes vieilles pompes munies d'un seul crochet qu'on serrait en fonction de l'épaisseur de la cheville et dans laquelle on se sentait comme à la maison. Non, désormais, THE chaussure, sans laquelle point de salut, est bardée d'au moins trois ou quatre crochets et monte à mi-mollet. Et forcément, pour la ronde, ce fut le début des emmerdes.

 

"De vraies pantoufles", lui lança en guise de préambule une jeune vendeuse avenante aux jambes fuselées. Pressentant qu'elle n'allait pas partager cet avis tranché, la ronde enfonça sans mot dire son pied dans l'objet redouté. Elle crut dans un premier temps que les crochets n'étaient pas défaits. Erreur. Le premier, placé sur le coup de pied, s'enclencha mais au dernier cran et sans aucune facilité. Le second, ce fut une autre paire de manche. Elle eut besoin de l'aide de la vendeuse, dont l'enthousiasme commençait à s'estomper, pour le fermer. Le troisième opposa encore plus de résistance et finit par céder, arrachant à la ronde un ongle ainsi qu'un cri de douleur. Refusant d'essayer le pied gauche, elle se redressa et parvint à articuler, malgré la souffrance, qu'elle s'y sentait plutôt bien. Sachant bien sûr qu'il n'en était rien et que le plaisir de la glisse s'éloignait à grand pas.

 

Dès le premier remonte-pente, elle s'aperçut de son erreur. Elle avait si mal qu'elle en eut la nausée. Ses mollets, compressés, ne laissaient manifestement plus passer le sang. Tout au moins c'est ce qu'elle en déduit lorsque les fourmillements de ses doigts de pieds commencèrent à monter et qu'elle perdit toute sensation, des orteils aux genoux. La journée tant attendue se borna à attendre ses camarades, assise à la terrasse, toutes chaussures ouvertes.

 

Le lendemain, bravant sa honte et son embarras, elle rendit les instruments de torture – et le mot est faible – demandant à la vendeuse si elle ne louait pas des chaussures plus adaptées à son mollet "un peu rond". Regard presque exaspéré de la jeune fille décidément plus du tout avenante et sentance définitive: "je vous ai déjà donné les plus larges que j'avais". Ah…

 

Pour finir, la ronde dénicha au fond du garage du vieux chalet familial ses anciennes chaussures qu'elle pensait fichues et jetées. Elle les enfila avec délice, et constata qu'elle les fermait toujours. Elle finit par retrouver le plaisir disparu, malgré les avertissements méprisants de la vendeuse, qui, alors qu'elle les ajustait à ses skis, lui prédit en voyant les vieilles godasses: "au minimum une cheville cassée dès la première chute".

 

Sur des skis, la ronde a toujours eu l'impression d'être légère. Depuis toujours, skier lui est naturel et ce sport est le seul, oui vraiment le seul, dans lequel elle n'est pas à proprement parler ridicule. A bien y réfléchir, si la ronde est à l'aise sur les planches, c'est probablement parce qu'en glissant, elle en oublie son poids. Celui-ci devient même un atout, lui permettant d'aller plus vite et de coller à la piste.

 

Bref, sans prétendre au titre de championne, la ronde dévale les bleues, rouges et même noires avec parait-il, un peu de style. C'est dire si ces quelques jours sont attendus chaque année.

 

Pourtant, cette fois-ci, un obstacle de taille faillit l'empêcher de se livrer à son sport préféré.

 

Les chaussures. De ski.

 

Plus un magasin de location ne propose les bonnes vieilles pompes munies d'un seul crochet qu'on serrait en fonction de l'épaisseur de la cheville et dans laquelle on se sentait comme à la maison. Non, désormais, THE chaussure, sans laquelle point de salut, est bardée d'au moins trois ou quatre crochets et monte à mi-mollet. Et forcément, pour la ronde, ce fut le début des emmerdes.

 

"De vraies pantoufles", lui lança en guise de préambule une jeune vendeuse avenante aux jambes fuselées. Pressentant qu'elle n'allait pas partager cet avis tranché, la ronde enfonça sans mot dire son pied dans l'objet redouté. Elle crut dans un premier temps que les crochets n'étaient pas défaits. Erreur. Le premier, placé sur le coup de pied, s'enclencha mais au dernier cran et sans aucune facilité. Le second, ce fut une autre paire de manche. Elle eut besoin de l'aide de la vendeuse, dont l'enthousiasme commençait à s'estomper, pour le fermer. Le troisième opposa encore plus de résistance et finit par céder, arrachant à la ronde un ongle ainsi qu'un cri de douleur. Refusant d'essayer le pied gauche, elle se redressa et parvint à articuler, malgré la souffrance, qu'elle s'y sentait plutôt bien. Sachant bien sûr qu'il n'en était rien et que le plaisir de la glisse s'éloignait à grand pas.

 

Dès le premier remonte-pente, elle s'aperçut de son erreur. Elle avait si mal qu'elle en eut la nausée. Ses mollets, compressés, ne laissaient manifestement plus passer le sang. Tout au moins c'est ce qu'elle en déduit lorsque les fourmillements de ses doigts de pieds commencèrent à monter et qu'elle perdit toute sensation, des orteils aux genoux. La journée tant attendue se borna à attendre ses camarades, assise à la terrasse, toutes chaussures ouvertes.

 

Le lendemain, bravant sa honte et son embarras, elle rendit les instruments de torture – et le mot est faible – demandant à la vendeuse si elle ne louait pas des chaussures plus adaptées à son mollet "un peu rond". Regard presque exaspéré de la jeune fille décidément plus du tout avenante et sentance définitive: "je vous ai déjà donné les plus larges que j'avais". Ah…

 

Pour finir, la ronde dénicha au fond du garage du vieux chalet familial ses anciennes chaussures qu'elle pensait fichues et jetées. Elle les enfila avec délice, et constata qu'elle les fermait toujours. Elle finit par retrouver le plaisir disparu, malgré les avertissements méprisants de la vendeuse, qui, alors qu'elle les ajustait à ses skis, lui prédit en voyant les vieilles godasses: "au minimum une cheville cassée dès la première chute".

Cauchemar honteux

Cette nuit j'ai rêvé que je ne parvenais pas à sortir d'une chambre d'hôtel, parce que je ne passais pas la porte.

 

Je suis bien consciente que c'est un pur délire et que si, en effet, j'ai, comme vous avez pû le comprendre depuis le temps, quelques petits problèmes de poids, je suis loin, vraiment loin d'être plus large qu'une embrasure de porte. Et pourtant, ça semblait tellement vrai… Je souffrais vraiment dans ce rêve, pas tant d'être coincée bêtement, la moitié du corps à l'intérieur de la chambre et l'autre dans le couloir – cocasse, quand on y pense – mais plutôt de la honte éprouvée.

 

J'ai honte, voilà. Souvent, j'ai honte. Et ce sentiment ne me quitte pas, ou peu, il colle à mes vêtements, à ma peau et à mes tripes. Peur du ridicule, des regards narquois et des sarcasmes.

 

Peur aussi injustifiée la plupart du temps que ne pas passer les portes, étant plutôt entourée d'âmes bienveillantes.

Shoot de bouffe

Dabord, il y a la réminiscence d'un goût aimé. Souvent sucré. L'idée d'un carré de chocolat au lait, la douceur d'une madeleine ou l'acidité délicieuse d'une tarte au citron, par exemple. Petit à petit, ce souvenir s'installe insidieusement et se rappelle à toi de manière obsédante. Il t'en faut. Tu essaies de chasser l'envie, de penser à autre chose. Mais tu salives de plus en plus, tu ne peux plus rien faire, il t'en faut. Tu sais que chez toi, il n'y a rien de tout ça, tu t'interdis d'en acheter, pour ne pas céder. Mais aujourd'hui, ça ne changera rien.

 

Un fumeur hésite-t-il à traverser la ville le dimanche soir pour trouver un paquet de cigarettes ?

 

C'est décidé, tu y vas. Tu cours vers le supermarché le plus proche. Tu prends, vite, la tablette de chocolat à l'origine de la compulsion. Et comme tu sais qu'une fois la crise enclenchée, ça ne suffira pas, tu rafles quelques paquets de gâteaux, peu importe lesquels. Une fois ton butin amassé, tu rentres chez toi et prends le temps de t'installer. Tu sais que le bonheur sera de courte durée, alors autant l'optimiser.

 

Assise sur ton canapé, la télécommande à portée de main, tu déchires soigneusement le papier argenté. La vue du chocolat velouté excite tes papilles. Tu casses un morceau, et le porte à ta bouche, fébrile et impatiente. Les premiers effluves parviennent à tes narines et commencent à calmer le manque. Puis ta langue apprécie la douceur sans aspérité du petit carré. Très vite, le jus divin tapisse ton palais. Les récepteurs transmettent à ton cerveau la sensation de bien-être. Tu te sens calme, tes pensées errent sans entraves, ton corps se détend. Tu n'es plus ici, tu n'es plus toi, tu n'es plus que ce carré de chocolat qui fond voluptueusement pour couler ensuite dans ta gorge.

 

Le shoot a commencé.

 

La première bouchée est la meilleure, la seule qui vaille. Les autres ne seront que de vaines tentatives de parvenir à nouveau à l'extase. Et cette impossibilité te poussera alors à engloutir, de rage et de désespoir, tout ce que tu as acheté en plus. Jusqu'à l'écoeurement ultime, la nausée finale.

 

Seulement toi, tu ne vomis pas. Tu n'as jamais su, jamais pu. Oh, tu as essayé, tu as enfoncé ton doigt dans ta gorge plus d'une fois. Mais ton corps refuse. Il veut garder ce que tu viens de lui donner. Non, tu ne vomiras pas, tu ne sais que te remplir.

 

La descente est aussi douloureuse que la montée fut euphorique. La culpabilité te fait mal. Tu pétris ton ventre violemment, tu te frapperais si tu le pouvais. Pour te calmer, tu finis par t'inventer un demain différent. Oui, c'était la dernière crise. Demain, tout à l'heure, même, tu feras du sport. Tu ne mangeras rien, ou alors si peu. Demain, tu maigriras. Demain, tu décrocheras.