Catégorie : Zermati et moi

Un esprit sain dans un corps sain ?

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Je ne sais pas comment c'est arrivé, mais j'ai lâché. Pas le poids ni la peur de regrossir un jour, sur ce point je crains d'avoir encore du chemin à parcourir. Mais tout le reste. Les bourrelets sur le ventre quand je suis en deux pièces sur la plage, l'idée de mes fesses en gelly que je ne vois pas mais les autres si ou mes seins qui semblent vouloir faire un chateau de sable quand je fais du topless.

Du topless d'ailleurs, je ne fais que ça ici, dans cet endroit où ne viennent à côté de ma serviette que des habitués qui se foutent bien de savoir si mon bonnet D s'est effondré et depuis quand. ça n'est pas la première fois, mais en revanche c'est assez inédit qu'en fin de journée, avec ma voisine devenue au fil des ans une bonne copine, je fasse des abdos fessiers en culotte pour le plus grand bonheur des passants. Je crois que si l'on m'avait dit que j'accepterais de faire le chien qui pisse les seins à l'air dans un lieu tout de même public, j'aurais explosé de mon rire gras dont la réputation n'est plus à faire.

Vous allez me dire que quand on s'en fout de tout ça, on ne fait pas des abdos fessiers au lieu de bouffer une glace. Et bien c'est justement ça la perversité du truc, j'imagine. De la même façon que le mec vient à la fille célibataire quand elle ne l'attend plus (ou l'inverse), peut-être que l'exercice, lui, s'impose à la feignasse le jour où elle n'en espère pas plus que le bien être qu'il procure après coup.

Attention, je parle ici de 15 minutes à tout péter par jour qui en outre ne sont absolument pas suivies de courbatures, ce qui selon le churros n'est pas hyper bon signe. En même temps, comme il m'a dit avec sa légendaire sagesse: "pour faire des abdos, il faut déjà en avoir, c'est comme ça, on ne prête qu'aux riches et ça ne vaut pas que pour les banques" (je me demande si l'amour ne dure pas quinze ans). Pourtant, qu'est-ce qu'on peut jurer notre race quand on les fait, je ne vous dis pas, c'est toutes nos aïeules qui se retrouvent au rang de filles de joie. 

Mais bon, voilà, le propos n'était pas de vous annoncer que je comptais prendre la succession de Véronique ou Davina ou que j'allais très prochainement vous donner mes petits trucs sur les meilleures salles de fitness new-yorkaises. Non parce que je me connais assez tout de même pour savoir que cette tocade n'aura qu'un temps et qu'arrivée à Paris j'oublierai jusqu'à l'existence de mes fessiers (eux même m'ayant de toutes façons toujours superbement ignorée, ils ne s'en trouveront surement pas affectés).

Le propos, c'était donc que j'avais lâché du lest, que ce corps lesté de deux grossesses et n'ayant jamais fait de sport que par très courtes intermitences n'était plus pour moi cet été l'objet d'une honte frustrante, m'obligeant à trouver jour après jour une nouvelle façon de passer directement de la position debout à couchée sur le dos.

Je crois que c'est la maturité, le fait, sans conteste, d'avoir malgré tout minci (mais comme en témoigne cette photo prise par violette lorsque nous étions au Grau du roi, on est loin d'une ligne irréprochable) (là je n'étais pas topless, il ne faut peut-être pas m'en demander trop, j'étais alors probablement la seule personne de toute la plage à posséder un maillot de bain taille 42) et peut-être aussi de vivre quasiment à poil depuis trois semaines. Je crois que dans les thérapies d'acceptation de soi, il faudrait passer par là, par des moments où on ne se cache plus de soi. A force de croiser mon reflet dans la maison ainsi, j'ai fini par l'aimer un peu, peut-être. L'aimer, ou, même mieux, m'en détacher. Sans vouloir en faire des tonnes (c'est pas mon genre en plus), c'est comme si soudain je venais de me débarrasser d'un énorme boulet. Et si c'est ça aussi vieillir, alors ok, je prends.

Voilà, à part ça on entame notre dernière semaine ici et je me doute que je ne vais faire pleurer personne sur mon sort mais mon coeur saigne déjà.

Bon week-end.

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Chocolat noir versus chocolat au lait: de la connerie du diététiquement correct

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Il y avait cette jeune femme au supermarché, au rayon chocolat. Elle était avec sa fille, quatre ou cinq ans je dirais. Alors que je cherchais l'objet de ma dernière addiction en date – lait amandes et nougatine de Nestlé, I DIE -, son choix s'est porté sur deux tablettes de côte d'or noir. Tout en louchant ostensiblement sur celles au lait, tripotant l'une et la remettant à sa place.

"Maman, j'aime pas le chocolat noir, pourquoi t'achètes tout le temps du chocolat noir ?", lui a fait alors remarquer la petite. "Parce que c'est ce qu'il faut manger", lui a répondu sa mère, sans la moindre hésitation. Et d'égrener toute la liste d'arguments diététiquement corrects, sur pourquoi le chocolat noir "donne des muscles", "fait une belle silhouette" (on sentait qu'elle voulait éviter de prononcer le mot en G, surtout ne pas dire que le chocolat au lait fait grossir, mais tout faire pour l'expliquer quand même).

C'est simple, on aurait dit moi il y a trois ans.

La mère tiraillée entre ses propres goûts qui la portaient manifestement vers d'autres types de sucreries que celles mises dans son caddie et sa préoccupation number one: ne pas être la maman d'une grosse petite fille.

Laquelle, soit dit en passant ne présentait aucun signe avant coureur d'obésité.

Je me suis mordue la langue pour ne pas intervenir (non seulement je ne veux pas devenir l'une de ces dames embarrassantes dans les supermarchés qui s'adressent à tout le monde mais il se trouve que je prendrais sûrement assez mal qu'une inconnue – même blogueuse influente – vienne m'expliquer comment nourrir mes enfants). Je suis parvenue, donc, à ne pas mettre mon grain de sel dans la conversation qui durait, entre cette maman qui tentait de convaincre sa fille "qu'à force d'en manger elle apprécierait le chocolat noir" et une gamine finissant par lâcher dans un sanglot qu'elle n'aimait aucun des goûters que lui préparait sa maman tous les matins, "parce que y'a que des choses tristes dedans". De fait, le reste du chariot regorgeait de tous ces biscuits au son bio et autres compotes sans sucres ajoutés qui s'ils ne sont pas bons ont le mérite de rassurer les parents: on ne pourra pas leur reprocher d'avoir gavé leurs gosses.

Si je ne m'étais pas censurée, j'aurais dit à cette jeune femme que chocolat au lait, blanc et noir ont exactement la même teneur en calories. Que personne n'a démontré que le noir "fait des muscles" pendant que celui au lait donne de la cellulite. Que mieux vaut très certainement deux carrés d'un chocolat au lait apprécié qu'une barre entière d'un autre mangée sans plaisir. Que quand on y pense, c'est tout de même bizarre d'en arriver à dire qu'il "faut manger" du chocolat, fusse-t-il noir.

Qu'il y avait de fortes chances que sa fille, frustrée par cet interdit, mendie à l'heure du goûter des kinder pingui ou autres saloperies très dangereuses pour les muscles et ne les en apprécie que plus, vu qu'à la maison toute production Ferrero est considérée comme un dérivé de drogue dure.

Qu'on ne se méprenne pas, il n'y a aucun jugement de ma part dans cette histoire, je n'ai pas la clé de ce que les mères doivent faire pour éduquer leurs enfants et encore moins sur ce point très précis de l'alimentation. Je ne suis pas non plus en train de dire que les gens qui mangent du chocolat noir sont tous de gros frustrés du nutella. Personnellement je préfère le lait mais ma fille ainée ne jure que par le 70% de cacao. Mais autant je trouve ça bien de faire goûter d'un peu de tout aux enfants, autant je suis convaincue que ce n'est pas en décidant à leur place de ce qui est bon pour eux – même s'ils trouvent ça dégueu – qu'on va les inciter à aimer ça.

Personne n'a envie d'avoir des enfants "trop" gros. Mais il serait bon parfois de se demander réellement pourquoi on veut tant qu'ils soient filiformes. Si ce n'est pour réparer une blessure narcissique quelle qu'elle soit (il ne faut pas croire il n'y a pas que les femmes étant ou ayant été rondes qui vivent dans la terreur que leurs enfants soient gros, la blessure narcissique peut être d'ordre physique mais pas que). J'essaie, tous les jours, de lutter contre cette tentation de faire de mes enfants un prolongement de moi même. De ne pas leur faire porter le poids de mes échecs en tel ou tel domaine et de leur faire comprendre que quel que soit leur tour de taille futur, je les aimerai pareil.

Vous savez quoi ? Je n'y arrive pas tous les jours.

Tu as maigri ?

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Il y a le "tu as maigri ?" pour faire plaisir. Le "tu as maigri?" soupçonneux, presque inquisiteur, qui sous-entend "tu t'affames". Il y a le "tu as maigri" surpris qui pourrait vous laisser penser qu'avant vous étiez un gros tas. 

Il y a le "tu as maigri" hypocrite, qu'on prononce alors même qu'il est évident que c'est le contraire qui est arrivé. Le "tu as maigri" contrarié, parce que soudain vous avez changé de camp.

Il y a le "tu as maigri" inquiet, qui signifie "est-ce que ça va ?". Il y a le "tu as maigri" qui semble vouloir dire "tu es belle", et celui qui est suivi d'un avertissement "arrête-toi là".

Dix-mille façons de le dire et autant de le recevoir. 

Je continue, j'avoue, d'être surprise par la récurrence de ces mots me concernant alors même que je ne perds plus de poids depuis plus d'un an maintenant. Encore récemment, ce repas avec quelques anciens collègues et ces exclamations: "on te reconnait à peine, tu as fait quoi, Dukan ?". Lorsque je les ai quittés en février dernier, je pesais deux kilos de moins qu'aujourd'hui. Bien sûr, il y a cette distance qui fait qu'on ne se souvient pas, il y a aussi cette évidence, durant mes huit ans là bas, j'étais, dernière année mise à part, très enveloppée. C'est cette image qui reste, persistance rétinienne. Je crois que dans dix ans, on me la renverra encore. Celle qui a maigri.

Je ne saurais vraiment dire si cela me plait ou non, probablement un peu, je crois que ça dépend de l'intention que je perçois. Lorsque ces mots sont tellement appuyés que je peux entendre à quel point j'étais, "avant", énorme, j'ai un peu mal pour celle que j'étais, j'ai presque l'impression de la/me trahir en acquiescant avec un sourire. Mais d'une manière générale, je ne boude pas mon plaisir. Tout en étant, je le constate, beaucoup moins avide de cette "reconnaissance".

Toutes celles qui ont fait des régimes et perdu du poids ont j'en suis sûre connu cette ivresse d'avant soirée, lorsqu'on sait que l'amaigrissement sera applaudi. J'imagine que cette excitation répond à un besoin inextinguible de consolation de ce passé de grosse. Je crois qu'il n'y a pas d'âge pour éprouver ce sentiment de victoire. Pourtant, au fil de mes conversations avec le docteur Zermati et surtout, depuis un an, au fil de mes réflexions personnelles je suis convaincue que c'est cette attente vaine d'approbation et d'admiration qui suscite la peur de grossir à nouveau. D'autant que passées les deux ou trois premières minutes où l'on peut éventuellement faire sensation (ou en avoir l'illusion), ces gens que l'on veut impressionner n'en ont finalement pas grand chose à faire et c'est tant mieux.

Cesser de chercher dans le regard des autres cette estime de soi qu'il ne pourront nous donner, c'est à mon sens la clé. Pas évident, mais qui a dit que c'était facile ?

Edit: j'adore ces photos prises avec un certain degré d'alcoolémie samedi soir lors de l'anniversaire de ma chère C. Fanny avait acheté un rouge à lèvres YSL "laque" qui une fois appliqué semble se figer et tient toute la soirée. Enfin surtout sur Fanny ou Zaz parce que moi y'a pas, je le mange, laqué ou pas. Mais il est tout de même plutôt pas mal. 

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 Elles sont pas belles ces bouches en cul de babouin ?

Lettre à monsieur Dukan d’une fille qui tirait sur ses pulls

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J'avais prévu d'écrire une lettre ouverte à ce monsieur Dukan qui a réussi à se faire une pub d'enfer à pas cher en glissant une proposition bidon et dangereuse dans son livre à paraître. D'aucuns dénonceront l'instinct grégaire des médias qui ne mettent pas cinq minutes à se jeter comme la misère sur le bas clergé sur la première ineptie proférée par un homme dont on ne sait même pas vraiment d'où il tient son titre ronflant de nutritionniste. En même temps, difficile de se taire devant tant de bêtise et le panneau, je tombe dedans aussi, évidemment. Mais comme je ne souhaite même pas m'abaisser à expliquer pourquoi je trouve consternante cette proposition de donner des points supplémentaires au bac aux jeunes qui correspondraient aux canons de l'IMC politiquement correct, je vais plutôt vous raconter une histoire.

(un peu longue, je préviens ceux qui seraient pressés, ne cliquez pas sur lire la suite)

Celle d'une petite fille qui aux alentours de 13 ans s'est mise à grossir. Elle n'avait jamais été très mince, mais les hormones aidant et tout un autre tas de facteurs qu'elle a fini par identifier des années plus tard, les kilos se sont envolés à un âge où la dernière chose qu'on souhaite est de se faire appeler la grosse. A l'occasion d'une visite chez son pédiatre, ce dernier, très à cheval sur ces choses là – un précurseur probablement – l'a vertement sermonnée. Ça n'était pas possible, il fallait absolument prendre les choses en main, arrêter de manger autant, enfin madame, surveillez-la, et vous jeune fille, un peu de VOLONTE que diable.

En sortant, elle a pleuré, elle s'en souvient. Et le soir même, elle s'est mise à jeuner, appliquant à la lettre le régime qui à l'époque faisait rage et qui tenait son nom d'un chef cuisinier, monsieur Oliver. Avec le recul, elle aurait du se méfier. Il n'empêche qu'à force de manger scrupuleusement du fromage blanc sous l'oeil légèrement inquiet de sa maman, elle a commencé à maigrir. Beaucoup et vite. A 13 ans, il ne faut pas bien longtemps pour fondre. Problème: elle était fatiguée. Très. Tellement fatiguée qu'elle a été prise de vertiges en classe. Le pédiatre, en la voyant arriver amaigrie et chancelante, l'a à nouveau engueulée. On ne s'était pas compris, lui a-t-il expliqué, moins manger ne signifiait pas faire la grève de la faim, et puis ce régime était idiot, il fallait juste faire un peu attention. Comment, pourquoi, ça il préférait qu'elle le trouve toute seule, hein. Mais ça tenait en un mot la fameuse VOLONTÉ. En attendant, c'en était fini de ces imprudences, à la poubelle monsieur Oliver.

Sauf que c'était trop tard. Le ver avait été mis dans le fruit. La petite fille, avec la bénédiction pensait-elle de son censeur, s'est jetée sur tous les gâteaux dont elle s'était privée les semaines passées. Et même un peu plus, au cas où. C'est ce au cas où probablement dont elle n'a par la suite jamais su se débarrasser. Au cas où un autre médecin lui intimerait l'ordre de maigrir à nouveau, au cas où y'aurait la guerre, au cas où elle soit prise à nouveau de vertiges.

Au fil des ans, la petite fille a grandi, beaucoup grossi, parfois maigri. Elle ne s'est bien sûr pas arrêtée à ce premier régime, les enchainant avec enthousiasme et espoirs insensés. Certaines diètes ont marché, d'autres moins. Une année, alors qu'elle terminait ses études, elle a carrément arrêté de manger ou presque. Moins vingt kilos et l'impression étrange et euphorisante qu'elle allait disparaitre. Dix mois plus tard, elle en avait repris 25 et ainsi de suite. Dans les années 90, elle a découvert les sachets protéinés. Ahhh, les sachets. Ces pancakes en poudre au goût métallique, ces "pudding" à la vanille platreux et laxatifs. Et la phase de sta-bi-li-sa-tion. Qui ressemblait à s'y méprendre au régime Dukan, avec viande et protéines animales à tous les étages et gros contrôle sur les légumes sucrés type carottes et haricots verts. Le mal, les carottes. A nouveau, jackpot, moins 15 kilos. Et l'apparition de l'obsession. Du poids, des hanches qui saillent, de l'en-cas protéiné qu'on mangera dans deux heures, putain c'est long deux heures. Et non, je ne veux pas aller bouffer chez truc, elle va encore faire des lasagnes, tu sais bien que je déteste ça. Enfin, j'adore ça, mais ça revient au même, on se comprend. Oui, je fume deux paquets par jour, mais essaie, toi, de ne bouffer qu'un quart de pomme en dessert et dis-moi ce que ça te fait. Je suis heureuse, je mets du 38, mais je ne pense plus qu'à ça et j'ai l'haleine qui pue l'acétone à 20 kilomètres. Je suis géniale en même temps, non mais tu en connais des qui ont une volonté pareille ? Je suis une merde, oui, j'ai craqué, j'ai mangé une carotte. J'en pouvais plus des poivrons. Je ne suis pas folle tu sais ? Tu m'aimes encore ? Comment fais-tu ? Non je ne tire pas sur mon pull. C'est sur mon ventre, que je tire, en réalité, mais il est toujours là, ce con.

Et puis cette impression impossible à chasser que de toutes façons, il y aurait toujours des kilos à perdre, encore plus, encore mieux. Et les contrôles de ce médecin, pignon sur rue place de la Madeleine, des consultations à 120 euros pour monter sur la balance, prendre vaguement une tension et soupirer qu'elle aurait déjà du passer sous les 55, là. Tout juste s'il a cillé quand elle lui a annoncé son envie de faire un enfant.

Une envie qui lui a probablement sauvé, sinon la vie, au moins son couple et sa raison, réalise-t-elle aujourd'hui. Parce que dans ce corps qui ne lui semblait pourtant pouvoir accueillir personne tant elle s'était mise à le haïr année après année, deux bébés ont décidé un jour d'automne de s'installer et de grandir. Des bébés qui avaient besoin, lui assura sa gynéco merveilleuse, de carottes, de haricots verts, mais aussi de riz au lait, de chocolat et de tout aliment dont elle avait envie. Et l'envie, elle n'avait que ça. Tant et si bien qu'elle n'a jamais su combien de kilos elle avait amassés durant ces sept mois de grossesse. Elle s'est arrêtée de compter à 30. 

Après ça, la petite fille devenue maman n'a plus jamais cédé aux sirènes des sachets ou autres régimes vantés dans les magazines. Elle a malgré tout erré longtemps encore de nutritionnistes en nutritionnistes, espérant tomber un jour sur celui qui trouverait les mots et lui expliquerait comment en finir avec tout ça. Maigrir, elle n'y croyait plus vraiment, arrêter de grossir déjà serait bien. Mais hors de question de recommencer à se priver, hors de question de peser les aliments ou d'accepter ne serait-ce qu'une fois qu'une bonne femme hystérique mesure ses cuisses semaine après semaine pour voir si elles étaient ou non "gorgées de flotte". Ne plus jamais entendre qu'à Auschwitz il n'y avait pas de gros. 

Un beau jour, à l'aube de ses 40 ans, elle a fini par toquer à la porte de celui qui non seulement ne la pèserait jamais, ne lui promettrait jamais une quelconque perte et ne lui interdirait plus rien, mais qui, cerise sur le gâteau, parviendrait à lui faire perdre plus de poids que tous les régimes déjà essayés. En lui parlant de la faim, des émotions, de la satiété, de la nécessité d'être pleinement consciente de ce qu'elle mange, quand elle le mange. Deux ans plus tard, elle vient de passer une semaine entre amis à manger un peu plus que de raison. Prétendre qu'elle ne s'est pas dit deux ou trois fois qu'elle allait le payer cher serait mentir. Dire qu'elle n'a pas peur que tout ça recommence, que les kilos reviennent pendant la nuit serait là encore malhonnête. Mais jour après jour, mois après mois, elle se surprend à y croire. Peut-être est-elle sortie de ce cercle infernal. Peut-être n'aura-t-elle plus jamais à passer par là. 

Voilà, monsieur Dukan. Vous et vos disciples, vous et vos préceptes ineptes avez failli me faire basculer de l'autre côté. Celui dont on ne revient jamais parce qu'un jour le corps ne peut plus faire machine arrière. Parce que j'ai cru, très jeune, qu'être mince était l'alpha et l'omega du bonheur. Parce que croyant à vos chimères, j'ai fini par m'oublier. Tenter de corréler sveltesse et réussite au bac est la dernière étape d'un long travail de sape entrepris depuis des années consistant à faire penser que les gros ne sont que des larves sans volonté, indignes de notre société si performante. Et ce faisant, on fabrique, jour après jour, de plus en plus d'obèses, tellement angoissés à l'idée d'incarner justement ces valeurs contraires à la croissance qu'ils n'en finissent plus de manger pour se réconforter.

Je suis convaincue qu'il suffirait déjà de ne plus cultiver ce dégout des capitons pour que l'obésité cède du terrain. Mais ça ne fait pas vendre, cette théorie. C'est compliqué, un peu tiré par les cheveux, presque louche. Pourtant, ce que j'ai retenu du docteur Zermati, celui par qui l'équilibre, non pas alimentaire mais l'équilibre tout court est arrivé, c'est ce qu'il m'a dit lors d'une de mes dernières séances avec lui: "Vous irez vraiment bien lorsque vous poserez un regard bienveillant sur les personnes en surpoids que vous croisez tous les jours". Ce regard bienveillant je m'efforce de le poser désormais, parce que ces personnes là sont toutes un peu mes soeurs. Je suis elles pour toujours, je l'ai été et le serai peut-être à nouveau, parce que parfois, la vie fait que. Et cela n'enlèvera rien à ma qualité d'être humain. Je crois que c'est probablement cela qui devrait ajouter des points au bac. Mais ça n'est hélas, pas gagné.

Interview de Jean-Philippe Zermati sur l’impulsivité alimentaire

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La dernière fois, je vous avais dit que le docteur Zermati reviendrait ici pour parler de cette délicate histoire d'impulsivité. Pas celle qui nous fait parfois faire des choses inconsidérées mais néanmoins positives comme embrasser à pleine bouche ce nigaud de garçon qui nous reluque depuis trois mois dans l'amphi de droit social sans oser nous approcher. 

Non, la mauvaise impulsivité. Celle qui nous pousse à descendre le contenu du placard à bouffe parce que ce salaud de nigaud ne nous a pas rappelée depuis qu'on l'a justement embrassé à pleine bouche. Ou parce que la petite dernière n'a pas dormi de la nuit et qu'on n'en peut plus. Ou parce que big boss nous met la pression pour la réunion de demain. Ou… ou… ou juste parce qu'on ne sait pas quoi faire, qu'est-ce que j'peux faire.

Le docteur Zermati, ça le turlupine depuis un moment, cette question. Parce qu'elle est finalement au coeur de presque tous les problèmes de ses patients. Ça le turlupine d'autant plus depuis qu'il a fondé avec Gérard Apfeldorfer le site Linecoaching. Parce que les personnes inscrites semblent pour beaucoup vraiment submergées par ces émotions qui les amènent à des compulsions. Et qu'à distance, les aider, c'est compliqué. Bref, monsieur Z a gambergé et il y a quelques jours, il m'a laissé un message un peu étrange et forcément très intriguant: "Caroline, j'ai trouvé un truc. Je l'ai appelé la pompe à chocolat. Si vous voulez que je vous en parle, appelez-moi".

Vous vous doutez qu'avec un nom pareil, le dispositif ne pouvait qu'aiguiser ma curiosité. Voici donc les explications de Jean-Philippe Zermati. Qui je pense tombent à point nommé, juste avant Noël et son cortège d'envies difficilement maitrisables. Sans parler de la famille qui est certes un cocon de douceur mais bien casse-burnes aussi parfois et là, bonjour la razzia de chocolat.

Allez, je me tais et je laisse la parole à l'expert.

Pourquoi vous êtes-vous penché sur ce problème de l'impulsivité ?

Jean-Philippe Zermati: Depuis que je traite des patients pour des troubles du comportement alimentaire ou des problèmes de poids, je tourne autour de cette question. Mais clairement, l'expérience que nous menons actuellement dans le cadre de Linecoaching m'a poussé à aller plus loin dans cette réflexion. Pourquoi ? Parce que beaucoup des personnes inscrites à ce programme souffrent de compulsions et buttent sur ce problème de l'impulsivité. Il fallait donc trouver une réponse adéquate à leurs interrogations et les aider à gérer cette impulsivité. Je rappelle que l’impulsivité alimentaire est une envie de manger réflexe déclenchée par une situation d’inconfort émotionnel.

Justement, comment gérer ces pulsions qui nous poussent à manger sous le coup d'une émotion ?

Jean-Philippe Zermati: C'est LA grande question. L'idée n'est surtout pas de lutter contre les émotions ou de chercher à les supprimer. La vie est faite d'émotions positives et négatives et c'est un leurre que de penser pouvoir s'en passer. Il faut au contraire parvenir à supporter l'inconfort émotionnel et à faire en sorte que cet inconfort ne déclenche pas une envie de manger immédiate. Ou tout au moins une envie de manger qui prend le pas sur tout. Pour ce faire, j'ai tenté de ré-orienter les exercices de pleine conscience qui au départ ne sont pas conçus pour répondre spécifiquement à ce problème particulier. Dans un premier temps, je les ai beaucoup utilisés en cabinet pour identifier et accepter la sensation de faim. En effet, chez certains, la sensation de faim déclenche de vrais états de panique. En pratiquant en cabinet des exercices de pleine conscience alors même que le patient avait faim, j'ai constaté des résultats spectaculaires en deux ou trois séances.  C'est comme cela que j'ai décidé de tenter d'appliquer ces exercices à la gestion des émotions. Parce qu'après tout, une émotion n'est pas physiquement plus douloureuse que la faim ou beaucoup d’autres désagréments que nous subissons dans notre existence quotidienne. 

Comment fonctionne donc ce procédé que vous avez appelé « la pompe à chocolat » ?

Jean-Philippe Zermati: Le principe de départ, donc, est d'observer son émotion au moment où l'on ressent cette envie de manger alors qu'on n'a objectivement pas faim. On observe sans jugement les pensées et les sensations physiques qui les accompagnent. Sans chercher à les chasser. Puis si l’on peut, on met des mots sur ce que l'on ressent : est-ce de l'ennui, de l'angoisse, de la joie, de la peur, de la fatigue ? Une fois que cette émotion est identifiée, le patient a deux possibilités qui s'offrent à lui : soit il se réconforte en mangeant l'aliment convoité. Ce qui implique d'avoir au préalable travaillé aussi sur la dégustation et sur ses comportements de restriction. Afin de s’autoriser à manger toutes sortes d’aliments sans aucunes arrière-pensées négatives. Et afin que cette attente de réconfort ne se transforme pas en compulsion. Autre choix : se maintenir quelques instants dans cet inconfort émotionnel pour améliorer sa tolérance à ce type d’inconfort et observer comment il évolue dans le temps. Au terme de cette observation, à nouveau deux possibilités : mettre un terme à l’exposition émotionnelle et choisir le réconfort alimentaire, soit à nouveau attendre un peu, toujours en observant ses émotions. Dans le cas de l'option consistant à choisir de manger, si la dégustation ne s'avère pas réconfortante, le principe est le même : observer à nouveau son émotion et éventuellement manger à nouveau, une petite quantité de l'aliment, 20 minutes plus tard.

 Pourquoi ce terme de « pompe à chocolat » ?

 Jean-Philippe Zermati Parce que je me suis inspiré de la pompe à morphine. Il faut savoir qu'au départ, la pompe à morphine lorsqu'elle a été mise en place, a suscité beaucoup de critiques et de craintes. Certains étaient convaincus que les patients allaient s'administrer beaucoup plus d'antidouleur que ce qu'ils recevaient auparavant par le biais des infirmiers. Or très vite on a constaté que c'était exactement le contraire qui se passait et que les malades attendaient beaucoup plus longtemps entre deux prises, simplement parce qu'ils maitrisaient leur décision et la durée de leur exposition à la douleur. Là, c'est finalement un peu le même principe. A n'importe quel moment, on peut décider d'arrêter de supporter l'inconfort émotionnel en dégustant un carré de chocolat, un morceau de fromage ou n'importe quel aliment synonyme d'apaisement.

 Et ça marche ?

Jean-Philippe Zermati: Oui, cela fonctionne. Attention, il faut être capable d'observer une émotion sans se laisser submerger, ce qui suppose un entrainement aux exercices de pleine conscience. Il faut aussi bien garder à l'esprit que l'expérience n'a pas pour finalité d'empêcher de manger. Elle est là pour offrir un choix entre un réconfort alimentaire réellement apaisant ou un travail sur la tolérance à l'inconfort émotionnel. Ce qui aboutit généralement à une plus grande flexibilité psychologique et l’accès à un plus grand nombre de réponses efficace face à ses émotions. Cette expérience n'a pas non plus pour finalité de calmer l'émotion, mais d’apprendre à mieux la supporter Il ne faut donc pas s'attendre à « se sentir mieux ». A ce titre, j'ajoute que ce qui ressort des témoignages sur Linecoaching, c'est que les émotions qui déclenchent le plus souvent les compulsions alimentaires sont rarement très douloureuses. La plus citée est ainsi… l'ennui. Or en général, on répond à quelqu'un qui s'ennuie et que cela angoisse : « occupez-vous ». Ce qui est totalement inutile. S'activer en permanence pour « oublier » l'envie de manger revient à une stratégie d'évitement ou de contournement émotionnel. Une vie sans ennui n'existe pas et à un moment ou à un autre, l'inactivité reviendra. Il faut donc apprendre à accepter ces moments d'ennui, quitte à se réconforter en mangeant, mais alors parce qu'on l'a choisi, et dans des conditions qui ne soient pas celles d'une compulsion.

Edit: si vous voulez il y a un petit shéma qui résume cette "pompe à chocolat". C'est ici.

Jean-Philippe Zermati: « apprendre à se présenter à table en ayant faim »

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Vous vous souvenez, cet été le docteur Zermati avait répondu à pas mal de vos/mes questions concernant sa méthode et sa mise en application à travers le portail Linecoaching, initié par ses soins et ceux du docteur Apfledorfer. Il restait quelques interrogations, et il avait promis de revenir pour tenter d'éclairer vos/mes lanternes. J'ai listé ce qui me semblait revenir de manière récurrente, étant entendu qu'il est impossible de faire du cas par cas et d'entrer dans tous les détails des troubles du comportement alimentaire. Mais je pense que vous devriez malgré tout y trouver votre compte. Nous avons prévu de réitérer cet exercice dans quelques semaines sur un thème qui mérite une interview à lui tout seul: "comment gérer l'impulsivité, mère de tous nos vices alimentaires". En attendant, je vous laisse avec ce long billet qui je l'espère vous plaira.

J'ajoute que le docteur Zermati me charge de vous informer qu'il met en place avec le docteur Apfledorfer une thérapie de groupe qui se déroulera "en vrai" (pas en ligne) et qu'il reste des places, au cas où certains d'entre vous seraient intéressés. Pour en savoir plus, cliquez ici. 

Enfin et ce sera tout, je tiens à redire, même s'il me semble que c'est évident – mais l'expérience du net m'a appris qu'en réalité, RIEN n'est évident – que je ne suis en aucune façon partie prenante de Linecoaching. J'entretiens une relation de confiance avec monsieur Zermati et ayant pu constater que sur moi en tous cas sa méthode portait vraiment ses fruits, c'est tout naturellement que je continue d'en parler. De façon totalement désintéressée, donc.

Je laisse la parole à ce bon docteur Z.

 

Pensées de ronde:  Votre méthode est-elle compatible avec la vie de famille ou de bureau ? Parce que manger quand on a faim, par définition, ça ne se programme pas, si ? Comment ça se passe si l'appétit vient à 16h ?


 Jean-Philippe Zermati: Il est vrai que le but d'une alimentation familiale ou sociale, c'est que tout le monde puisse manger en même temps. Les repas sont en effet organisés en fonction de conventions sociales, voire physio-sociales. La preuve, c'est qu'en Espagne, on s'arrange tous pour avoir faim à 22h, quand aux Etats-Unis ce sera beaucoup plus tôt ou en France autour de 20h. La définition d'un repas, cela pourrait être celle-ci: c'est le moment où l'on décide de partager sa faim. Mais les gens qui souffrent de troubles du comportement alimentaire ne savent pas ou plus faire venir leur faim lorsque cela les arrange. C'est pourquoi il faut leur enseigner cette compétence: maitriser leur appétit prévisionnel. Cela demande un entrainement et une phase transitoire qui peut impliquer un décalage avec l'entourage. Mais l'objectif est bien que cela soit transitoire, pas de vous faire vivre à un rythme différent de vos proches ! Le but, c'est d'apprendre à se présenter à table en ayant faim.

 

Pensées de ronde: Mais alors comment peut-on maitriser sa faim pour qu'elle coïncide avec celle communément admise dans la société dans laquelle on vit ?

 

Jean-Philippe Zermati: Le principe de base, c'est dans un premier temps d'accorder la priorité à sa faim et non aux repas. Sachant donc qu'au départ en effet, la faim peut apparaître à une heure qui ne correspond pas à celle du repas de midi par exemple. S'offrent alors à vous plusieurs solutions. La première, c'est de décider de prendre son déjeuner à 11h, parce qu'on ne peut pas attendre, qu'on est trop affamé et qu'on ne sait pas le gérer. Certaines personnes opteront pour ce choix au début de la thérapie.

 

La seconde, c'est de décider d'attendre, en se disant qu'on ne va pas tomber d'inanition et qu'on est capable de patienter. Mais ça, certaines personnes ne peuvent pas, parce que la faim déclenche en elles des angoisses trop fortes. Reste alors une troisième solution, qui est celle de l'en-cas. A savoir la possibilité de manger quelque chose en quantité assez petite pour que la faim revienne une heure plus tard. Là aussi, cela peut-être compliqué en présence de troubles du comportement alimentaire. Certaines personnes ne savent pas s'arrêter lorsqu'elles commencent et sont incapables de manger un petit morceau de pain, de chocolat ou tout autre aliment sans arriver à satiété. C'est pour cela que le processus prend un peu de temps et nécessite que l'on travaille parallèlement sur tout un tas de difficultés qui expliquent cette mauvaise gestion de la faim: la peur de manquer, des émotions qu'on ne sait pas gérer, etc. La pratique de la dégustation va également aider à se satisfaire d'un petit en-cas qui ne mettra pas en péril l'organisation sociale des repas.

 

 Mais l'objectif final, c'est bien d'être en mesure de gérer son appétit prévisionnel et de parvenir à manger parfois suffisamment pour ne pas être dans un état inconfortable mais pas assez pour arriver « gavé » au repas.

 

Pensées de ronde: En somme, c'est un petit peu comme si on avait un portefeuille de faim et qu'on décidait de « placer » des actions à certaines heures de la journée ?

 

Jean-Philippe Zermati: Oui, c'est un peu ça ! On va choisir le moment où l’on souhaite avoir faim. Mais ce n'est pas un contrôle visant à perdre du poids, attention !

 

Pensées de ronde: Est-il possible de suivre votre thérapie en ligne lorsqu'on souffre de pathologies particulières comme des troubles de la thyroïde, un déséquilibre lié à la ménopause ou encore du diabète ?


Jean-Philippe Zermati: Je vais répondre pour chacune de ces affections, sachant que l'un des trois exemples que vous me donnez n'est pas une pathologie mais une évolution physiologique normale !

 

Mais parlons en premier de la thyroïde. Pour commencer, je voudrais déjà préciser que contrairement à certaines croyances, on ne grossit pas tant que ça à cause des problèmes de thyroïde. D'ailleurs, une fois le trouble équilibré par les médicaments, on ne maigrit pas tant que ça non plus. Quoi qu'il en soit, une fois le désordre thyroïdien équilibré, il n'y a absolument aucune contre-indication à suivre notre méthode.

 

S'agissant donc de la ménopause, qui n'est, j'insiste, pas une maladie, il faut déjà savoir une chose: la ménopause n'implique théoriquement pas de prise de poids physiologique mais plutôt un déplacement des graisses du bas du corps vers le haut. C'est un processus dépendant des hormones contre lequel on ne peut pas lutter et contre lequel il n'existe aucune solution miracle. Mais il est vrai que c'est une période qui peut être difficile à vivre. En raison de cette transformation du corps, bien sûr, mais aussi de tout un tas de choses qui surviennent lors de ce passage (départ des enfants, cessation de certaines activités, etc). Forcément, pour certaines femmes qui souffraient déjà de troubles alimentaires, cela peut les aggraver. Et en faire apparaître chez d'autres qui jusque là n'en avaient pas. Notre méthode est donc adaptée à cette phase de la vie, puisqu'elle se concentre justement sur la façon de gérer nos émotions. Mais il faut garder à l'esprit qu'on ne pourra rien contre les transformations naturelles engendrées par ce bouleversement hormonal.

 

Enfin, le diabète. Là, c'est un peu plus complexe. Nous précisons en effet dans les contre-indications de l'abonnement à Linecoaching qu'un diabète nécessitant un traitement est une contre-indication. En réalité, la seule contre-indication réelle concerne les personnes dont le diabète est traité par les sulfamides. Parce que dans ce cas, les expérimentations sur la faim sont impossibles, ces personnes là pourraient en effet faire un coma diabétique. Mais pour les autres cas de diabète, la prise en charge, par les diabétologues, a énormément évolué. Il y a quelques années en effet, on prescrivait aux diabètes des régimes très stricts, avec des interdictions totales des sucres rapides. Petit à petit, on a réintroduit les sucres rapides et aujourd'hui, certains diabétologues décident de ne plus imposer de régimes alimentaires aussi stricts et d'adapter la prise d'insuline à l'alimentation plutôt que l'inverse. Pourquoi ? Parce qu'ils se sont rendus compte comme nous que les patients diabétiques développaient des troubles très fort du comportement alimentaire à force de multiplier les interdits. Des troubles qui pouvaient les mettre en danger physiquement. Cela les a donc amenés à faire évoluer leur façon de soigner leurs patients. Pas par idéologie mais par pragmatisme. Un nutritionniste, si son régime échoue, son patient regrossit. Un diabétologue, si son traitement n'est pas adapté à son patient, il meurt. Forcément, cela pousse à se remettre en question !

 

Il y a des expériences qui sont donc menées actuellement consistant à suivre des diabétiques en les laissant manger en fonction de leurs sensations alimentaires. Les résultats semblent très positifs. La diminution de la glycémie est identique à celle obtenue avec un régime hypocalorique et corrélée à la perte de poids qu’on espère plus durable qu’avec les techniques restrictives.

 

 Vous aurez donc compris, le diabète en soi n'est pas un obstacle à cette thérapie. Excepté pour le cas d'un diabète traité aux sulfamides. Donc si des personnes souhaitent s'inscrire mais souffrent de cette pathologie, il faut qu'elles nous écrivent pour que nous examinions leur dossier.

 

Pensées de ronde: Quid des personnes souffrant d'obésité massive ? Quel espoir peuvent-elles nourrir en suivant votre méthode ?


Jean-Philippe Zermati: En préambule, il faut tout de même rappeler que lorsqu'on parle d'obésité massive ou morbide, on parle d'un IMC à plus de 40. On ne peut pas faire espérer à ces personnes là de pouvoir revenir à un IMC « normal » de 25. Ce qui ne signifie pas qu'on ne peut rien faire. La première chose, c'est qu'on peut les empêcher de continuer à grossir. Parce que lorsqu'on a atteint une obésité de ce stade, il ne faut pas croire que le processus s'arrête. Si on ne fait rien, on continue à prendre du poids et même de manière exponentielle, parce qu'à force, les cellules de graisse se sont multipliées (cf billet dans lequel j'avais expliqué ça). Première phase, donc, stopper la prise de poids. Ensuite, une partie de ces personnes sont malgré tout au dessus de leur set point (le poids d'équilibre). On peut donc les aider à redescendre au niveau de ce poids d'équilibre. Un poids qui, j'insiste, a forcément évolué au gré des régimes que ces personnes là ont multiplié dans leur vie. Leur set point peut être donc très élevé et rester handicapant. Ils peuvent alors prétendre légitimement à la chirurgie gastrique. Mais là aussi, nous pouvons les aider, parce que cette chirurgie se prépare. Il vaut mieux arriver à l'opération en ayant un comportement alimentaire normal. Après l'opération, il y a toujours une phase euphorique qui accompagne la perte de poids. Les compulsions disparaissent parce que la personne est portée par sa perte de poids, exactement comme au début d'un régime qui fait maigrir vite. Mais lorsque la perte de poids s'arrête, si on n’a pas fait un travail sur son comportement alimentaire en amont, les troubles réapparaissent et mettent en péril la chirurgie gastrique. D'où l'intérêt de se préparer et c'est ce que nous proposons.

 

Pour lire le premier épisode de cette interview, cliquez ici.

Zermati: mes réponses à vos questions

2011-08-28
Ces dernières semaines, j'ai reçu plusieurs mails dans lesquels certaines d'entre vous me posaient des questions relatives à mon expérience avec le docteur Zermati.

Je confesse ne pas avoir répondu à tout le monde, je passe beaucoup, beaucoup de temps sur mon ordinateur et gère pour le boulot un nombre conséquent de mails. Du coup, j'accumule du retard.

Je me suis donc dit qu'au lieu de répondre dix fois la même chose – vous vous interrogez en général sur des trucs identiques – j'allais faire une sorte de FAQ ici. J'en avais d'ailleurs déjà posté une il y a quelque temps, que vous pouvez lire ici. Mais forcément j'évolue, mon ressenti et mes impressions aussi, donc ce billet n'est probablement pas inutile.

Voici donc une compilation des messages que j'ai reçus et les réponses que je peux y apporter.

– Tu ne dis jamais combien tu as perdu, combien tu pèses aujourd'hui, quelle taille exacte de vêtements tu fais, bref, donne nous des chiffres s'il te plait !

En effet, je n'ai jamais donné ici de données chiffrées. Pourquoi ? Parce que le docteur Zermati me l'a déconseillé, dès les premières séances. Vous pouvez en lire l'explication ici. Je souhaite m'en tenir à cette position, parce que je suis déjà bien assez obsédée par mon poids et que si je commence à le révéler ici, ainsi que ma perte exacte de kilos, ça ne fera que s'intensifier. Si je regrossis et que vous vous en rendez compte, il y aura forcément des gens pour me demander de combien je me suis relestée. Or c'est cette pression qui en général fait reprendre ce qu'on a perdu. Et puis de toutes façons, la méthode Zermati est justement très éloignée des sempiternels "- 3 kilos en trois mois" et ne promet aucune perte chiffrée. Vous donner le montant des kilos envolés chez moi risquerait de vous induire en erreur, de vous faire penser que ce qui a été possible pour moi l'est pour tout le monde, ou au contraire vous faire redouter de ne pas perdre plus. Chaque organisme réagit à sa manière. Certains maigriront bien plus que moi, d'autres beaucoup moins. Bref, j'ai perdu, c'est incontestable, plus que je ne l'espérais, moins que je ne l'aurais rêvé à une époque. Tout ce que je peux vous dire, c'est que le poids que je fais aujourd'hui me convient parfaitement, que je ne souhaite pas continuer à maigrir et que je ne cherche d'ailleurs pas à continuer. Et le fait est d'ailleurs que ma balance oscille désormais à plus ou moins deux kilos depuis des mois.

– Est-ce que ça été facile dès le début de maigrir ? Parce que moi ça ne marche pas comme pour toi et je me demande si tu ne nous as pas caché des trucs.

Non, je n'ai rien "caché", ni prise de médocs, ni sport intensif, ni privations en tous genre. Non, ça n'a pas été facile, dans la mesure où toute remise en question totale de votre système alimentaire et de votre façon d'appréhender le fait même de se nourrir est tout de même compliquée. Mais c'est vrai en revanche que par rapport à mes expériences diverses et variées de régimes en tous genre et spécifiquement le régime protéiné sa mère, mon parcours Zermati a été une véritable partie de plaisir. Pas de pesée des aliments, pas de comptage de calories, pas d'interdits… le paradis pour un bec sucré de mon acabit ! C'est vrai que j'ai perdu très rapidement. Peut-être parce que j'ai dès le départ été dans un état d'esprit de confiance totale vis à vis de ce médecin. J'avais décidé de ne pas écouter mes doutes et de baisser ma garde. J'ai suivi les consignes d'exercices à la lettre, mangeant durant quatre jours une tablette de chocolat en guise de déjeuner, puis des noix de cajou en lieu et place du repas du soir ou m'efforçant de respecter certaines règles comme celle de ne rien faire d'autre lorsque je mangeais. Peut-être que j'ai maigri vite parce que cette thérapie est arrivée à point nommé, à un moment où j'étais particulièrement réceptive, je ne sais pas, je ne saurais l'expliquer mieux que ça, mais je n'ai rien caché, promis.

– Est-ce que tu continue à pratiquer les exercices de pleine conscience, est-ce que tu y arrives mieux qu'au début ?

C'est clairement un des aspects les plus difficiles pour moi de cette thérapie. Parce qu'il faut prendre le temps de le faire, il faut trouver les moments où c'est possible. D'autant que j'avoue éprouver une certaine difficulté à ressentir cette pleine conscience de la même manière que lorsque je pratiquais les exercices dans le cabinet de Zermati, avec ce dernier en face de moi me guidant patiemment. Mais ces derniers temps, je m'efforce de recourir à ces moments de pleine conscience, parce que le stress de la rentrée, les longs moments de solitude de ma vie de free lance menacent parfois de me faire retomber dans certaines affres de la compulsion. Et c'est vrai que lorsque j'y arrive, lorsqu'avant de manger ou au moment des premières bouchées, je me concentre sur ce que je suis exactement en train de faire, la tentation d'engloutir à 200 à l'heure mon repas a tendance à reculer. J'ajoute avoir également eu recours à la pleine conscience avant une animation de colloque au mois de juin, avec la satisfaction de sentir ma panique se calmer.

– Est-ce que tu arrives à ne pas te peser, est-ce que tu te sens libérée de tes angoisses vis à vis de la nourriture et du poids ?

Non, je n'arrive pas à ne pas me peser. Je me pèse tous les jours et je sais que c'est contraire aux recommandations de Zermati, pour la bonne raison que cette obsession du poids génère une telle peur de regrossir que souvent on mange pour calmer cette peur. Cercle vicieux, quoi. Mais c'est comme ça, pour l'instant en tous cas, je suis incapable de me débarrasser de cette vilaine habitude. Peut-être parce que dans les périodes de ma vie où j'ai beaucoup grossi, je ne me pesais plus, refusant d'affronter la réalité. Alors imaginer que je puisse baisser ma garde et ne pas reprendre mes kilos, pour l'instant, je n'y parviens pas. Vous vous doutez donc bien que la réponse est également "non" à la seconde partie de la question.

Non, je ne suis pas libérée de mes angoisses. Comment se débarrasser d'une anxiété qui fait intégralement partie de moi depuis que je suis en âge de me regarder dans une glace ? Petite, je m'endormais tous les soirs en pétrissant mon ventre et en me répétant cette prière: "faites que je maigrisse". Aujourd'hui, j'implore mère nature et tous ses sbires de ne pas me faire regrossir. Je ne suis pas parvenue encore à cette sagesse qui consiste à se dire que même si on reprend du poids, on n'est pas une looseuse et la vie vaut malgré tout le coup.

Ceci étant dit, je suis néanmoins beaucoup plus zen que je ne l'ai été. Je ne me surveille pas en permanence, je suis capable de faire bombance sans me culpabiliser, en me disant que j'attendrai d'avoir à nouveau faim pour remanger et que ça ne devrait pas être dramatique. Lorsque je prends un ou deux kilos, je ne me sens pas malade d'inquiétude toute la journée à l'idée d'être à nouveau sur la mauvaise pente (celle qui monte). Surtout, j'ai très rarement des envies de descendre mon placard à gâteaux comme c'était le cas avant. Et lorsque ça me prend, je m'assieds avec le truc convoité et le déguste, lentement. En général, cela suffit pour me calmer.

– Est-ce que ça prend du temps pour que cette méthode soit compatible avec la vie de famille ?

Non, pas tellement. J'ai très vite repris un rythme compatible avec celui de la famille. Mais en revanche, je quitte en général la table avant mes enfants et le churros. Parce que je n'ai plus faim. Je me mets un peu plus loin sur un fauteuil et poursuit ma conversation avec eux ou vaque à mes occupations. J'avoue avoir trouvé le moment où j'ai atteint la satiété mais avoir encore du mal à ne pas manger machinalement, sans faim. D'où l'éloignement lorsque j'estime avoir eu mon compte. Du coup, chacun fait comme cela, lorsqu'il estime avoir fini, il demande à sortir de table. J'ai vraiment l'impression que tout le monde a pris conscience du coup qu'il était idiot de se forcer à manger ou à finir son assiette sous prétexte de gaspillage. Et il n'y a plus jamais de crise sur le mode "tu ne manges rien" ou au contraire "arrête de de gaver". Je ne dis pas que c'est la sérénité tout le temps, mais plus qu'avant, c'est certain.

Voilà, je crois que j'ai fait le tour. J'ai essayé d'être la plus honnête dans ces réponses. Non, tout n'est pas réglé pour moi et je crois que ça ne sera jamais le cas. Ces derniers jours, dans les commentaires, il m'a été reproché à demi-mots de présenter ma vie sous ses aspects les plus positifs. Certaines d'entre vous auraient du coup l'impression que je réussis tout ce que je touche et que mon existence est lisse et parfaite. Si c'est le cas, j'en suis désolée, parce que c'est bien évidemment complètement faux (je rappelle que j'ai par exemple les doigts de pied en chou fleur depuis dix jours, tout de même). Je m'efforce ici de vous épargner mes angoisses existentielles nombreuses et variées (perdre mon pied gauche, pour n'en citer qu'une). Je ne souhaite pas non plus prendre ce blog pour mon psy. Mais il me semblait évident que ce que je tais existe malgré tout. Et s'il est un sujet d'inquiétude qui ne me lâche pas, c'est bien évidemment la perspective de regrossir un jour. Parmi d'autres. Après, on peut appeler ça de la pudeur, de la fierté, de l'arrogance ou que sais-je, mais non, en effet, je ne tiens pas à TOUT écrire ici et ça ne changera pas. (même si je crève d'envie de vous montrer mes orteils, je ne serais pas contre un brainstorming collectif sur ce truc étrange) (on dirait que mes doigts de pied ont été passés au micro-ondes) (ils font des bulles).

Edit: Et oui, je me regarde beaucoup dans la glace. Probalement pour vérifier que je n'ai pas rêvé et que oui, mon corps a changé (y compris mes doigts de pied).

Jean-Philippe Zermati: « accepter ce que l’on est pour devenir autre »

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Chose promise chose due. Jean-Philippe Zermati m'a donc accordé une interview à l'occasion du lancement du site internet Linecoaching. Je précise d'emblée que cet échange s'est concentré sur ce portail et non sur la méthode mise au point par ce médecin nutritionniste. Même si bien évidemment, il rappelle au détour de ses réponses les principes de base de la méthode en question.

Par ailleurs, j'ai essayé de poser toutes les questions que vous aviez suggérées dans les commentaires. Mais certaines d'entre elles étaient très spécifiques ou s'éloignaient du sujet précis de cet entretien.

Ceci étant dit, je remercie monsieur Zermati, alias docteur Z sur ces pages, pour ses réponses qui je pense, devraient vous éclairer.

Avant de vous laisser découvrir le résultat de cet entretien, deux trois mots encore: je crois que monsieur Z et moi avons fait tomber une à une les barrières de la relation patient/médecin. En grande partie de mon fait. Avoir raconté sur mon blog nos séances en prenant parfois quelques libertés de ton a forcément fait bouger les lignes dès le départ. Et maintenant, voilà que je l'interview, en enfilant mon costume de journaliste, tout en ne pouvant faire abstraction que je parlais à mon médecin. Ou devrais-je écrire mon ancien médecin, nous ne nous sommes en effet pas vus depuis longtemps.

Cette relation particulière a nécessairement eu un impact sur notre entretien et rend mon objectivité assez relative. Cela ne signifie pas que je me pose ici en étendard de Linecoaching. Mais j'ai confiance en ce praticien dont j'ai pu juger de l'éthique et du sérieux durant deux ans. Je suis par ailleurs encore étonnée tous les jours par la façon dont sa méthode a bouleversé ma vie. Non que je lui attribue le mérite de mon changement d'orientation professionnelle ou ma capacité désormais à parler en public sans défaillir. Mais comme je le lui confiais récemment, "ça va plus loin que maigrir".

Après ces quelques phrases dégoulinantes de sentiments (oui merci, mon transfert se passe très bien), je passe la parole au docteur Zermati.

Pourquoi avez-vous décidé de créer ce site, Linecoaching, en plus de vos consultations et des livres que vous avez écrits pour expliquer votre méthode ?

Jean-Philippe Zermati : La question qui se pose pour moi c'est plutôt « comment aurions-nous pu nous passer d'un tel outil ? » Linecoaching est en effet un véritable prolongement de nos travaux avec le docteur Gérard Apfeldorfer depuis des années. Cela fait plus de quinze ans que je me bats pour faire entendre notre voix. J’ai présidé l'association le GROS dans le cadre de laquelle je m'investis bénévolement, je dispense des formations, j'écris des livres… Mais force est de constater qu'avec ce site nous disposons d'un effet de levier 1000 fois supérieur. Nous sommes, Gérard Apfeldorfer, moi même et tous les partisans de notre méthode, très peu connus. Les apôtres des régimes en tous genre le sont beaucoup plus que nous. Et en n'étant pas présents sur le web, nous avions l'impression de nous battre avec un canif contre les assauts livrés à la bombe atomique par certains nutritionnistes ayant pignon sur rue ! Linecoaching, il faut le voir avant tout comme un outil qui va nous permettre de toucher beaucoup plus de gens.

Ce n'est donc pas un moyen de « faire de l'argent » ou de vous stariser sur le net ?

Jean-Philippe Zermati : Franchement, si j'avais voulu, comme vous dites, « faire du fric », j'aurais changé de métier ou en tous cas je l'aurais pratiqué autrement. Ce site emploie actuellement 10 personnes et ce n'est qu'un début, le suivi personnalisé que nous proposons exige en effet qu'un grand nombre d'experts soient à même de répondre rapidement aux questionnements des abonnés. Dans un monde idéal, bien sûr, on pourrait rêver que tout ceci soit gratuit. Mais la seule solution pour que ça le soit, serait qu'il soit pris en charge par le ministère de la Santé. Aux dernières nouvelles, il n'en est pas question…

Ce qui peut étonner lorsqu'on connait votre méthode et votre discours, c'est la « promesse » de Linecoaching: « maigrir sans régime ». Or en consultation ou dans vos livres, vous insistez toujours sur la nécessité d'accepter un poids d'équilibre et sur le fait que la perte de poids ne doit pas être un objectif en soi. Pourquoi alors mettre l'accent sur l'amaigrissement ?

Jean-Philippe Zermati : Vous avez raison, j'insiste toujours auprès des patients sur le fait que la perte de poids n'est pas un objectif direct mais une conséquence du rétablissement d'un comportement alimentaire normal. Une conséquence réjouissante en général et qui me fait forcément plaisir lorsque mes patients m'en font part. Mais il ne faut pas se voiler la face. Les gens viennent me voir avec l'espoir de maigrir. J'ai rarement en face de moi des personnes en surpoids qui souhaitent en premier lieu réguler leur comportement alimentaire. Généralement la souffrance vient du poids, moins souvent de la compulsion. Si nous pouvions manger plus que de raison en permanence sans grossir, beaucoup moins de gens consulteraient. Par conséquent, nous parlons en effet d'amaigrissement, parce que nous savons que c'est ce à quoi aspirent la plupart des personnes en surpoids. Toutefois, vous ne trouverez nulle part sur ce site une promesse chiffrée. Et la question du poids d'équilibre est abordée très vite, ainsi que celle de l'acceptation de ce poids d'équilibre, même si ce dernier ne correspond pas à celui que l'on souhaiterait. L’acceptation est un concept difficile souvent confondu avec la résignation. Il s’agit pourtant d’un outil psychologique très puissant qui permet d’accéder au changement. On accepte ce qu’on est pour peut-être devenir autre. Encore une fois, Linecoaching est en pleine cohérence avec nos travaux et nos convictions.

Est-ce que toutes les personnes qui suivront votre programme en ligne peuvent maigrir ?

Jean-Philippe Zermati : Effectivement, tout le monde ne pourra pas maigrir autant qu’il le souhaite. Ce que nous pouvons faire pour chaque personne souffrant de surpoids, c'est essayer de la ramener à son poids d'équilibre, sachant qu'on ne sait pas, au départ, où il se situe. On peut aussi l'aider à accepter ce poids. Parce que notre théorie est basée sur l'idée que plus on stresse sur son poids et sur un idéal de minceur, plus finalement on est susceptible de ne pas maigrir ou même de grossir. Nous proposons pour cela aux gens de travailler à la fois sur les sensations alimentaires qui permettent de manger lorsqu'on a faim et de s'arrêter lorsqu'on est rassasié et sur l'impulsivité qui pousse à manger sous le coup des émotions. C'est un énorme pari pour nous de motiver les gens sur cette promesse qui diffère totalement de celles qui sont faites par de nombreux nutritionnistes.

Vous ne pensez pas qu'avec les dernières études qui prouvent qu'un fort pourcentage de gens reprennent du poids après des régimes restrictifs et notamment celui préconisé par Dukan, il y a une méfiance désormais justement vis à vis des promesses du type « perdez dix kilos en trois mois » ?

Jean-Philippe Zermati : C'est vrai qu'enfin, il est dit officiellement que les régimes font grossir. Mais ce qui est assez troublant, c'est qu'en général, toutes ces personnes qui ont regrossi après un régime déclarent vouloir le refaire. Pourquoi ? Parce qu'elles s'attribuent à elles-mêmes cet échec, pas à la méthode ou au médecin. C'est un cercle vicieux qui peut durer longtemps.

Est-ce qu'un suivi personnalisé par internet vaut celui que vous proposez dans votre cabinet ?

Jean-Philippe Zermati : Non. On ne peut pas garantir pas la même personnalisation qu'en face à face. Les outils n'ont pas la même portée. Je dirais que le site, c'est mieux que les livres et moins personnalisé sûrement qu'une consultation. C'est certainement moins efficace que le suivi par un thérapeute chevronné mais beaucoup plus que de recourir à un thérapeute non formé au travail sur le comportement alimentaire… Par ailleurs, beaucoup de gens pour des raisons diverses ne disposent pas de cette possibilité de recourir à ces thérapeutes.

Ceci étant dit, nous ne sommes pas les premiers à tenter l'aventure d'un outil thérapeutique en ligne. Et des études prouvent que pour certains, cela peut être aussi performant que d'être suivi par un thérapeute. Nous avons travaillé deux ans pour mettre en place ce dispositif et avons eu recours à des logiciels d'intelligence artificielle. Nous proposons des retours sur expérience, une analyse régulière des résultats, des bilans réguliers. Il y a un groupe d'entraide qui s'est mis en place. C'est du virtuel, mais ce n'est pas dépersonnalisé, loin de là. Nous essayons en permanence de perfectionner le dispositif, pour que chaque personne soit prise en compte avec ses difficultés et son parcours adapté en conséquence.

Paradoxalement peut-être, le « déficit » de relation avec le thérapeute » est formidablement compensé par la solidarité des abonnés entre eux et le soutien qu’ils s’apportent les uns aux autres. Je trouve qu’il y a une très grande richesse humaine dans les échanges. L’écrit et le groupe favorisent beaucoup l’expression. A titre personnel, je vis une très belle expérience.

Qui sont les « coachs » qui suivent les abonnés ?

Jean-Philippe Zermati : Les coachs « méthode » – ils sont quatre pour l'instant mais devraient très vite être plus nombreux – sont des psychothérapeutes formés aux thérapies cognitivo-comportementales et que nous formons à notre méthode. Ils sont joignables tous les jours par mails.

Est-ce que vous avez dans l'idée d'adapter cet outil pour qu'il serve aux médecins également ?

Jean-Philippe Zermati : Oui nous avons pour objectif de développer le site pour qu'il puisse être utilisé par les médecins, de façon à les aider à élaborer des « parcours » pour leurs patients. J'ajoute que nous formons les médecins, une soixantaine par an. Mais nous n'avons pas la maitrise de leur pratique ensuite. Avec Linecoaching, nous sommes sûrs que notre méthode ne va pas être mal interprétée ou détournée de son objectif.

L'abonnement proposé est de six mois, pourquoi ?

Jean-Philippe Zermati : Je pense très sincèrement qu'on ne peut rien obtenir, qu'il s'agisse d'une thérapie « en face à face » ou en ligne, en moins de six mois. Il y a toutefois la possibilité pour les gens de s'engager pour trois mois, pour tester la méthode.

Ce qui est surprenant, c'est que le bilan gratuit proposé sur le site n'élimine aucun « candidat ». A savoir qu'une personne ne souffrant pas de surpoids se voit acceptée dans le programme. Pourquoi ?

Jean-Philippe Zermati : Je n'ai jamais refusé un patient, qu'il souffre ou non de surpoids. J'ai de plus en plus de gens qui viennent me voir non parce qu'ils sont trop gros mais parce qu'ils n'en peuvent plus de vivre dans le contrôle de ce qu'ils mangent. Sachant qu'un jour ou l'autre, cette restriction à outrance peut déboucher sur une prise de poids. Tout le monde est donc en effet « accepté » dans le programme. Nous espérons même toucher des gens qui ne sont encore pas trop « abimés » par les régimes ou les problèmes de comportement alimentaire. Ces derniers ont une chance d'obtenir une perte de poids qui les contentera et qui leur évitera de tomber dans le cercle vicieux de la restriction. Par ailleurs, il faut savoir qu'à taille identique, entre un IMC de 20 et un autre de 25, il y a un écart de 15 kilos. Une jeune femme qui a pris une quinzaine de kilos en peu de temps et qui conserve malgré tout un IMC normal n'est pas pour autant exempte d'un risque de comportement alimentaire déréglé. 16% de la population française souffre d'obésité, mais 70% des gens déclarent avoir suivi un régime un jour. Cela montre bien que la prise en charge ne peut pas concerner que les obèses. Parce qu'encore une fois, faire des régimes fait grossir à terme. Autant prendre le problème à la source.

Et pour les personnes souffrant d'obésité massive, qu'en est-il de Linecoaching ?

Jean-Philippe Zermati : Malheureusement, les résultats pour ces personnes là ne sont souvent pas à la hauteur des espérances. Mais nous pouvons bien sûr les aider. Nous pouvons aussi leur proposer une préparation à la chirurgie lorsqu'une telle opération est programmée. Notre méthode peut aussi les aider pour l'après chirurgie, lorsqu'ils doivent apprendre de toutes façons à manger autrement.

Dernière question, je vous ai souvent entendu dire que le sport pouvait provoquer une prise plus importante d'aliments, en "anticipation" de l'effort qui va être fourni. Or Linecoaching propose un programme d'entrainement physique. Pourquoi ?

Le parcours forme tel que nous le proposons est un moyen de se réconcilier avec son corps, de le dynamiser et d'améliorer son comportement alimentaire (régulation émotionnelle et meilleure perception des sensations physiques, donc alimentaires aussi). Nous sommes assez surpris du succès de cette partie du programme. Les retours sont très positifs. Et les gens ont bien compris qu'il ne s'agissait pas de fabriquer de la dépense mais de travailler d'une façon encore différente sur son comportement alimentaire.

Le parcours activité physique reste facultatif dans la mesure où il doit correspondre à un désir de mouvement.

Edit: ouais la photo, un poil tarte à la crème. Mais je n'en avais pas du docteur sous la main et je me dis que la route est longue et blablabla…

 

Voulez-vous en savoir plus sur Linecoaching ?

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Il y a quelques semaines, les docteurs Zermati et Apfeldorfer ont ouvert un site, appelé "Linecoaching". Le principe ? Proposer leur thérapie en ligne à celles et ceux qui ne peuvent pas franchir la porte de leur cabinet, quelles qu'en soient les raisons.

Je vais être transparente, il m'a été proposé de travailler pour ce portail. Ce que j'ai refusé. Pas parce que j'étais sceptique ou que le principe ne m'intéressait pas. Mais autant je fais quelques accrocs à mon incorruptibilité quand il s'agit d'accepter une invitation par ci par là, autant là, je me suis dit que c'était incompatible avec certaines de mes activités. Quand j'écris pour Psychologies magazine par exemple, il peut m'arriver d'interviewer des médecins du GROS. Comment garder mon indépendance en travaillant pour Linecoaching ? Et sur ce blog, où j'ai maintes fois raconté mes séances avec le docteur Z, comment conserver ma liberté de parole – call me Florent Pagny – en étant participant à leur petite entreprise ?

Bref, pour ne pas être juge et partie, j'ai donc refusé.

Ceci étant dit, j'ai reçu de nombreux mails de lectrices me demandant mon avis sur ce service en ligne. J'avoue avoir un a priori positif parce que j'ai confiance en ces deux médecins et que sur moi, leurs principes ont fonctionné. Mais n'ayant pas suivi ce coaching on line, je ne peux pas non plus vous garantir qu'il vous apportera ce que vous espérez. Si à titre personnel je préfère un contact humain en face à face, je suis bien incapable de juger de l'efficacité de cette méthode web 2.0.

En revanche, j'ai la possibilité d'interviewer Jean-Philippe Zermati pour vous éclairer. Mais je voulais m'assurer auparavant que c'était quelque chose qui pouvait vous intéresser. Et si oui, je vous propose de laisser en commentaire les questions que vous souhaiteriez lui poser sur ce nouveau portail.

Si je vous sonde sur le sujet, c'est parce que je ne voudrais pour rien au monde donner l'impression de faire un billet sponsorisé. J'ai toujours payé mes consultations chez le docteur Z et n'ai jamais été rétribuée pour en parler. Et je tiens à ce que ça continue. Ne serait-ce que pour conserver le droit d'émettre des doutes si j'en avais.

Voilà, à vous la parole, en somme.

Non je n’ai pas changé…

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On dit souvent que lorsqu'on perd du poids, on met du temps à se réapproprier son image, à se voir telle qu'on est devenue. Ce n'est pas faux, j'ai mis plus d'un an à essayer en premier des pantalons en taille 40. Et six mois de plus pour ne pas embarquer dans la cabine du 42 et du 44, "au cas où".

Mais ce qu'on dit moins, c'est que ce regard qu'on porte sur nous même, les autres l'ont également. On ne change pas facilement dans la tête des gens.

Hier soir, j'étais invitée à un raout par mon ancien boss. L'occasion de recroiser quelques collègues de mon ancienne vie. Pas si ancienne que cela, je ne suis finalement partie que depuis six mois.

Six mois pendant lesquels je n'ai pas perdu un gramme, je crois que je me suis stabilisée, oscillant à plus ou moins deux kilos de mon poids de forme.

Mais là n'est pas la question.

J'ai donc revu des collègues et ils ont été nombreux – je veux dire par là que ce n'était pas une remarque isolée – à s'exclamer que j'avais fondu. Voire que j'étais vraiment très épanouie – il en est même un qui pourtant ne m'a jamais dit un mot gentil en cinq années sous sa responsabilité – qui a prononcé le mot "resplendissante".

Je ne vais pas mentir, c'était très agréable, les compliments il faut toujours les prendre sans mégoter.

Mais je me suis tout de même interrogée.

Comment se fait-il qu'ils aient eu cette réaction, alors que cette "ligne" là, je l'avais bien avant de partir ? Et cette robe que je portais, mon increvable portefeuille noire de chez Monop, cuvée 2006 environ, ils avaient dû la voir sur moi des dizaines de fois. Je n'étais pas plus maquillée qu'un autre jour, pas plus apprêtée, et je me trainais une migraine épouvantable, de celles qui rétrécissent mes yeux et me donnent un teint gris.

Je veux dire, je n'étais pas spécialement vilaine, mais ni plus ni moins la même qu'il y a six mois. Bien sûr, on pourra m'objecter que cette nouvelle vie me réussit, que la sérénité à l'intérieur de soi se voit à l'extérieur. Mais bien que sûre désormais d'avoir fait le bon choix – ou en tous cas un choix qu'il faut assumer – je suis tout sauf sereine, en proie à des questionnements et des doutes quotidiens. C'est ma nature et je crains qu'il faille me la trainer jusqu'à la tombe.

Bref, j'aimerais être l'héroine de eat, pray, love, mais qu'on me laisse ma cartouche de cigarettes, mes bêtabloquants et mes prises de tête.

Tout ça pour dire que je pense que la seule raison de leur "surprise" réside dans le fait qu'ils ne m'avaient pas vue pendant un long moment. Et que par conséquent, ils s'étaient débarrassés de leur persistance rétinienne (trois jours que je veux placer cette expression, je trouve que ça fait très sérieux) qui les faisait me voir comme j'étais "avant". Peut-être aussi que tout simplement, ils ne me regardaient pas avant, je faisais partie des murs, le boulot ce n'est pas un catwalk non plus, hein.

Toujours est-il que je pense que ça explique aussi pourquoi soi même on ne parvient pas à poser un regard différent sur un corps qui peut avoir changé. On se voit tout de même beaucoup par le prisme de ce que nous renvoie l'autre.

J'ajouterai que si ces compliments m'ont touchée, ils m'ont aussi un peu interpellée. Le lien entre mon amaigrissement et ma supposée "plénitude spirituelle" était visiblement évident. Le "tu as maigri", je l'entendais comme un "tu es heureuse, ça se voit ".

Je crois que j'ai plus que jamais compris ce que voulait me dire le docteur Zermati, quand il parlait des dangers de la survalorisation de la perte de poids. C'est une sacrée pression, je crois, cette association du bien être et d'un corps svelte. Si j'étais arrivée hier, souriante et pomponnée, mais lestée d'une dizaine de kilos, mes anciens collègues en auraient ils déduit que j'avais fait une énorme erreur et que j'étais une looseuse ? Si je venais à regrossir, devrais-je supporter, en plus des désagréments liés à la reprise de poids – ne serait-ce que le renouvellement de ma garde robe – les regards désolés des proches et moins proches, qui en déduiraient que je vais mal, voire que je suis tricarde ?

Je n'invente pas le fil à couper la margarine en écrivant ces mots. Mais l'obésité est de plus en plus et irrémédiablement assimilée à tout un tas de traits de caractère négatifs: le laisser aller, la paresse, la déprime, etc. Et c'est d'autant plus injuste que je ne connais pas plus volontaire qu'une personne au régime.

Je suis partie un peu dans tous les sens, ce billet a été écrit un peu tard. Qu'on ne se méprenne pas, je n'étais évidemment pas fâchée contre ces personnes qui n'étaient que pleines de bonnes intentions. Je confesse même avoir joui de cet instant, qui ne rêve pas de faire un tabac en revenant sur les lieux du crime ? Mais au final, ce que j'en retiens, c'est que je vaux – et ce "je" est à prendre comme un "nous" – plus que quelques kilos en moins. Et que ce qui m'a le plus touchée, c'est A., avec laquelle je n'ai pas si souvent parlé durant ces années à la cotoyer et qui m'a confié me lire et rire, souvent.

Bonne journée…

La photo ? non, rien à voir, c'est juste "notre" petit resto de Corse auquel on se rend systématiquement le premier soir des vacances. Et j'avoue que j'en ai une énorme envie…