Si je maigrissais encore…
– Je fermerais à l'aise un 42
– Je serais enthousiaste à l'idée d'acheter un maillot de bain
– Je pourrais peut-être grimper sur des talons de 10.
– J'entrerais dans les lieux publics avec un poil plus d'assurance.
– J'aurais l'impression d'être plus séduisante.
– Je me raconterais des histoires dans lesquelles on me désirerait juste pour mon corps.
– Je me regarderais tout le temps dans la glace.
– Je poserais sur mon blog en rentrant les genoux, comme une professionnelle.
– Je me sentirais plus jeune.
– J'aurais, si ça se trouve, moins peur de parler en public. Ou pas.
– Je serais toujours Caroline, 38 ans, mariée, 3 enfants.
– J'aurais peut-être moins d'inspiration.
– Je serais ruinée mais par contre La Redoute et Americain Vintage seraient montrés comme des exemples d'entreprises en pleine croissance dans tous les Davos du monde.
– J'aurais toujours aussi peur de mourir.
– Je passerais mes mains sur mes hanches qui sailleraient le soir et sans comprendre pourquoi, j'aimerais ça.
– Je ferais scandale en affirmant qu'on ne se sent jamais si bien que lorsqu'on est mince. Et je ne verrais pas où est le problème.
– Je serais peut-être moins drôle
– Je me sentirais fragile.
– Je ne me demanderais plus si la personne à côté de moi dans le métro n'est pas trop serrée par ma faute.
– Je n'aurais plus peur qu'on me cède une place dans les transports en commun.
– Je proposerais à mon généraliste de me peser, même pour une otite.
– Je me pèserais dans une pharmacie, devant tout le monde.
– Je retournerais à la Pitié, au service consultations-maternité, je sauterais sur la balance et et je demanderais à la sage-femme de dire à voix très haute le chiffre qui s'affiche. Je ne supplierais même pas d'avoir le droit d'enlever mes chaussures.
– J'irais essayer tous les pantalons de chez comptoir des chiffonniers.
– Je proposerais à ma mère qu'on aille faire les magasins ensemble, pour réécrire l'histoire et ne plus jamais lui ressortir cet épisode dramatique des Nouvelles galeries, elle et moi en larmes dans la cabine, parce qu'à douze ans la seule jupe m'allant était en flanelle marron, taille 44.
Si je reprenais du poids…
– J'aurais envie d'arracher à nouveau ce bourrelet qui empêche tout pantalon de fermer sans serrer.
– Je ressortirais toutes les fringues roulées en boule au fond du placard parce que trop grandes.
– Je roulerais en boule toutes les fringues nouvellement achetées au fond du placard.
– Je me réveillerais à nouveau avec cette question existentielle s'il en est: qu'est-ce que je vais bien pouvoir me mettre ce matin. Putain.
– Je ferais bouger l'aiguille de la balance pour tricher, rien que pour le plaisir de reculer l'inéluctable.
– J'inventerais des problèmes hormonaux, je pesterais contre la rétention d'eau.
– Je finirais par prévenir tout le monde avant même que ça se voie que ça y'est, voilà, encore un coup pour rien.
– J'irais quand même à la plage et la mer serait à la même température qu'avec 10 kilos de moins.
– Je profiterais du printemps qui vient de la même façon.
– Je lâcherais l'affaire au niveau du tutu. (ok, c'est pour justifier la photo)
– Je serais toujours caroline, 38 ans, mariée, 3 enfants.
– Je retomberais la tête la première dans le paquet de granolas, ceci expliquant aussi cela.
– Je le laisserais carresser mes hanches, en essayant d'oublier qu'elles ne saillent plus.
– J'aurais à nouveau plein d'argent sur mon compte et je crierais à qui veut l'entendre que tout est moche cet été dans les magasins.
– Je dirais adieu à mon boy-friend jean et bonjour à mon slim. Sans avoir besoin d'acheter ce dernier, rien ne se perd, tout se transforme.
– Je saurais toujours écrire.
– Je serais toujours journaliste.
– Je serais quand même en vie.
Et les autres, qu'en penseraient-ils ?
Je crois que mes amies seraient tristes pour moi, désolées même. Peut-être que certaines, secrètement, trouveraient que finalement tout se remet à sa place et que ce n'est pas si mal, l'ordre des choses. Ma mère m'aimerait toujours mais on oublierait cette histoire de shopping. Elle me trouverait jolie quand même, je crois. Mes enfants me diraient qu'ils ne voient pas la différence et que non, vraiment, n'importe quoi, maman, tu n'es pas grosse. L'homme applaudirait à deux mains le retour de mes seins.
Peut-être qu'une fois le dos tourné, certains proches se diraient que c'est dommage, tout de même, ça m'allait bien. Et puis en face, ils m'assureraient que franchement, quand tu es trop mince, ça te donne mauvaise mine, ton visage n'est pas fait pour ça, ce n'était pas toi. Et si ça se trouve, ils seraient sincères dans les deux cas.
Voilà tout ça est un peu sorti tout seul, sans vraiment réfléchir. Si je suis à 100% honnête, le plus merveilleux dans le fait d'être plus mince est de pouvoir s'habiller sans y penser. Est-ce normal d'avoir fait des années d'études, de revendiquer depuis toujours le fait qu'une tête bien faite est dix fois plus important qu'un corps parfait et de pourtant courir après une telle futilité ? Pas sûr…