Catégorie : Zermati et moi

Tous les matins, elle achetait son ptit pain au chocolat…

Viennoiseries

"Après avoir bossé pendant deux mois chez Fauchon au rayon viennoiserie, j'avais pris cinq kilos. Il faut dire qu'un pain au chocolat par jour, c'est fatal, personne ne peut s'en sortir sans grossir".

Cette confidence m'a été faite récemment par une charmante jeune femme, professeure de cupcakes de son état, je vous reparlerai d'ailleurs sans tarder de son savoir faire démoniaque.

Je n'ai rien répondu, je ne suis pas l'attachée de presse de Zermati, ni un gourou de la nutrition qui chercherait à répandre la bonne parole un peu partout. Mais en moi même, j'ai souri.

Tous les matins en effet, depuis bientôt un an, je déguste mon pain au chocolat ou mon croissant au beurre, acheté dans la meilleure boulangerie du monde, détentrice de je ne sais combien de médailles d'or pour ses viennoiseries. Je les mange avec un plaisir intact, vingt ans de moratoire sur la pâte feuilletée, ça laisse des traces.

Tous les matins, donc, je défie les lois du bien manger inculquées avec obstination aux enfants depuis des générations.

Et tous les matins, je constate sur ma balance qu'on peut tout à fait boulotter un pain au chocolat sans prendre un gramme. Mieux, on peut se permettre cette douceur et maigrir. Beaucoup. Parce que le docteur Zermati m'a mise en garde il y a de ça déjà quelque mois, sur les risques pour mon équilibre personnel d'afficher ma perte de kilos, je ne m'étendrai pas sur les chiffres. Mais ce que je peux dire, c'est que cette méthode me convient manifestement mieux que toutes celles éprouvées jusque là.

Je ne sais pas ce qu'il en sera dans un an, je ne sais pas ce que la vie me réserve, la seule certitude à vrai dire c'est que je ne diabolise plus le carré de milka à la fin d'un repas, que je fais parfois la razzia des pringles onion and sour à l'apéro, que je m'achète, le mercredi, fréquemment, ma part de flan. Et que tout ça ne me rend pas malade de culpabilité. Je sais aussi que je mange moins, rassasiée beaucoup plus vite, que les jours de gros cafard, quand rien d'autre ne me tente qu'une douceur, je m'assieds et je cède à la pulsion, en me concentrant sur le réconfort que ça m'apporte.

Je sais aussi que d'autres jours, quand les enfants ne sont pas là, que j'allume la télé et que je décide de faire mon repas devant comme avant, je me surprends à avaler sans goûter, sans compter, à me remplir comme une oie que je voudrais gaver. Je suis alors saisie d'un angoisse terrible que "ça" recommence, que les vieilles habitudes reviennent insidieusement, que tout le chemin parcouru débouche sur une voie sans issue.

Et puis je me rappelle ces mots du docteur Z, sur l'amaigrissement qui n'est pas une fin en soi, sur le fait que je ne verrai pas ma vie changer du tout au tout si d'aventure je reprenais du poids. Je me souviens que c'est cette terreur qui risque de me perdre, ce dégout de moi.

Alors le lendemain, j'attends la faim. Quand elle vient, j'entends ce qui est devenu mon credo: "ce qu'on mange quand on a faim ne fait pas grossir". Et je demande mon croissant à la boulangère.

Voilà où j'en suis aujourd'hui, pas totalement détachée, plutôt détendue mais pas prête à renoncer malgré tout à ce mieux-être savouré quotidiennement, parce que c'est peut-être là mon seul désaccord avec le docteur Z, en tous cas pour l'instant: être plus mince me rend vraiment plus légère. Je sais qu'il ne serait pas ravi-ravi si je le lui confiais de visu, je sais pourquoi aussi. Mais je me demande si docteur Z a déjà eu les cuisses qui frottent sous une jupe au point d'en saigner. Je suis presque sûre que non. C'est probablement ce qui lui permet d'affirmer avec autant d'assurance que regrossir ne serait pas si grave.

Histoire à suivre, en somme…

Question de poi(d)s


Pois

"En fait Caro, je voulais te poser une question. Tu étais ronde, avant ?", m'a demandé hier une personne avec qui je bosse depuis peu sur un projet (suite de ce machin si important dont je ne pouvais pas parler et dont je ne peux toujours pas d'ailleurs mais bref, ça suit son chemin).

En face, ma copine Lud, qui ne me connait pas non plus depuis très longtemps mais assez pour savoir qu'en effet, avant – et ce dans un passé assez proche – je n'étais pas vraiment mince, m'a lancé amusée: "C'est bon ça, non ?"

Bon… oui, on va pas se raconter des salades, hein. Déstabilisant aussi. Parce qu'autant être claire, je suis toujours ronde. Dans ma tête, pour commencer. Sur la balance aussi, beaucoup moins qu'il fut un temps, certes, mais pour n'importe quel Dukon, j'ai encore une dizaine de kilos "en trop".

Mais manifestement, pour cette personne – qui est immédiatement devenue ma meilleure amie pour la vie -, je suis tout simplement à ranger dans la catégorie passe partout, ni mince ni grosse, en tous cas pas assez pour justifier le titre de mon blog (c'est ce dernier qui a suscité son interrogation).

Pourquoi je raconte ça, outre le fait que j'ai un besoin certain de m'en vanter ? Parce que ça m'a fait prendre conscience que parfois, on a besoin que la vérité vienne de l'extérieur. De quelqu'un de pas impliqué, qui vous verrait pour la première fois et qui vous décrirait sans le poids (ha ! ha !) du passé, sans être influencé par un quelconque souvenir de vous AVANT. Parce que si je suis sincèrement persuadée d'être encore bien gironde malgré l'évidence de ma nouvelle taille 42, je suis également assez certaine que dans les yeux de mes proches, je le reste aussi. Comme ces derniers sont pour moi ce qu'ils sont à l'instant présent mais aussi ce que j'ai intégré qu'ils sont depuis que je les connais.

Ok, je vous perds, là, désolée, j'ai bouffé un Jean-Claude Van Damme au petit déjeuner et depuis, je le digère pas.

Non, sérieusement, en fait, je n'ai pas trop de message à faire passer, si ce n'est que oui, en six mois, j'ai changé. D'enveloppe. Et comme me l'a souvent suggéré docteur Z., ça n'a pas révolutionné ma vie. Je ne suis pas plus ou moins heureuse, pas plus ou moins aimée.

Après, je ne vais pas mentir, je n'ai pas mais alors pas du tout envie de reprendre mes kilos. Pourquoi, si je ne suis pas plus heureuse ? Pour toutes les raisons énoncées ici. Et aussi parce que jamais auparavant je n'aurais acheté une robe bustier à gros pois blancs. Ce qui est peut-être une mauvaise raison. D'autant qu'en passant, le churros, la voyant, n'a rien trouvé de mieux à dire que: "si, c'est joli, mais pourquoi tu la mets avec un t-shirt ?".

Ce que je n'aurais pas forcément mal pris si j'avais en effet décidé de mettre un t-shirt. Sauf qu'en l'occurence, c'est la robe qui est faite comme ça, en trompe l'oeil, on va dire.

Repasse au deuxième tour mon chéri, pour ta gâterie.

Mais revenons à nos moutons.

Je sais aussi pertinemment que ma terreur de regrossir est en soi une menace de reprise de poids. Cela dit, mine de rien, mine de crayon, j'ai l'impression de naviguer un peu moins à vue, d'être dans un rapport à la nourriture plus simple, dépassionné, disons.

Je me surprends encore parfois, les jours de grosse fatigue, à engloutir le contenu de mon assiette comme si une armada d'affamés étaient à deux doigts de me la voler. Quand je réalise que j'ai à peine gouté à ce que j'ai empiffré et que mon repas tient plus du remplissage que de la dégustation, j'arrive en revanche plus qu'avant à ralentir le processus. Et si je n'y parviens pas, je me dis simplement que j'attendrai que la faim soit réelle pour manger à nouveau.

Régulièrement, je fais un truc que je m'interdisais avant: m'acheter un super gâteau, part de flan ou mille-feuille, mes deux hits à moi. Ce jour là, le mercredi en général, je ne mange quasi rien à midi, pour me le savourer, mon péché.

Je continue à manger mon pain au chocolat sur le trajet du boulot, je continue à croquer mes deux carrés de milka après chaque repas. Et fait incroyable, j'ai en permanence une tablette dudit milka dans mon bureau, une tablette qui me dure en moyenne une dizaine de jours, voire plus. Jamais jusque là, je ne suis tombée dedans au point de lui faire un sort en trois minutes.

Voilà, c'était un billet totalement décousu, écrit parce que ça fait plus d'un mois que je n'ai pas vu Zermati. Un rendez-vous annulé, des jours de congés, et puis je ne sais pas, l'envie de prendre mon téléphone n'est pas assez forte. Probablement la tentation de faire une pause, de voir ce qui va se passer si je continue en cavalier seul, un peu de paresse, un come back en fanfare aussi de la velléitaire qui sommeille en moi.

Je vous tiens au courant bien sûr, de la suite des événements…

Edit: Au cas où la robe de betty boop ferait des émules, elle vient de chez Naf Naf.

Un miracle en équilibre

 

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Vous vous rappelez de la pub pour une banque, où le mec appelait vingt fois son conseiller financier pour que celui-ci lui répète le solde positif de son compte, histoire de se venger des années de harcèlement à propos de son découvert ?

J'adorais cette pub.

D'autant qu'à l'époque, j'étais plutôt dans la phase je me colle la tête dans le sable et je filtre les appels de la Société géniale.

La semaine dernière, j'ai eu un peu envie de faire un remake de cette réclame. Avec Philippe, mon loueur de chaussures de ski.

Pour lui demander tous les jours de me faire essayer une de ses paires de pompes. Vas-y mon gars, celles là, là bas, donne les un peu pour voir ? Ah ben ouais, dis-donc, je les ferme aussi. Et tu ne vas pas le croire, mon pied est IRRIGUÉ. Fais passer les rouges, aussi, tant qu'on y est ? Pareil, des chaussons ! Et celles-ci, m'ont l'air étroites, hein ? Ah, pas tant que ça, garçon, on pourrait y mettre deux autres dedans, je me marre. ça ne te dérange pas mon philou, que je reste un peu ? je m'en ferais bien une ou deux autres de plus, comme ça, pour rien, pour le plaisir.

Bref, vous l'aurez compris, ma semaine a été ILLUMINÉE du simple fait de pouvoir entrer dans des chaussures de ski sans risquer l'amputation de la moitié de mes orteils.

Qu'on ose me dire ensuite que maigrir n'est qu'une question de respect des normes en vigueur. Ceux et celles qui pensent un truc pareil n'ont JAMAIS connu l'humiliation de prendre des godasses en 40 alors qu'elles chaussent du 38 rien que pour gagner trois millimètres sur le dernier crochet. Ni de devoir annoncer leur poids – légèrement minimisé – au loueur de skis devant une assemblée médusée (= mes enfants qui n'avaient jusque là jamais réussi à obtenir le chiffre maudit). 

Bref, je ne vais pas raconter de salades, avoir maigri simplifie mon quotidien. Et pas qu'un peu. Je sais que je ne suis pas plus jeune, pas forcément beaucoup plus jolie, pas devenue un piège à quéquettes pour autant. Mais il ne se passe pas une journée sans que je ne me dise que "ça", je n'aurais pas pu le faire avec autant de facilité il y a quelques mois.

"ça" ?

– Enfiler ce jean "flare" un peu démodé mais en taille 10 de chez Gap qui dormait depuis 2004 dans mon placard.

– Monter en courant les escaliers du changement à Opéra sans avoir l'impression d'avoir perdu quelqu'un en route. Mon genou gauche, en l'occurrence.

– Fermer la bride de ces délicieuses salomés achetées un rein rien que pour le plaisir… d'en fermer la bride.

– Mettre une ceinture oubliée chez moi par ma mère. Qui jusque là pouvait au mieux me servir de collier.

– Me baigner dans une baignoire sabot sans avoir la hantise de rester coincée (si, ça m'est arrivé, merci le savon, mon pompier d'un jour).

– M'asseoir sur une barrière pour manger mon sandwich et ne pas avoir dans un coin de ma tête que celle-ci pourrait céder.

– Envisager de me mettre sur les genoux du churros, comme ça, pour rien, sans m'escrimer à me faire la plus légère possible à en avoir des crampes dans les cuisses. (un grand regret de ma vie d'adolescente, toutes mes copines s'asseyaient sur les genoux des uns et des autres, ça a du m'arriver deux fois mais en général ON s'asseyait sur les miens).

– Me faufiler dans une rangée de sièges au cinéma sans entendre les gens soupirer ou gémir.

– Ne presque plus entendre ces voix obsédantes qui crient "la grosse" alors que je tente d'entrer dans un métro bondé.

– Passer devant un groupe de gars la tête haute et m'étonner de ne pas sentir mon ventre se serrer. Ne pas accélérer le pas et ne pas en revenir qu'ils ne m'aient tout simplement pas calculée.

Je sais bien que ces riens sont insignifiants. Je sais aussi que pour certains ils sont le fruit d'une imagination malade.

Je sais également que j'y accorde beaucoup trop d'importance. Et que c'est bien la preuve que je suis toujours au milieu du gué, tiraillée entre la peur de regrossir et la conscience que c'est ce qui me perdra. Mais voilà, ici et maintenant, j'ai l'impression d'être miraculeusement en équilibre…

Edit: C'est devenu une tradition, une photo "blogueuse-like", parce qu'on le vaut bien, non ? Ok, on dirait que je fais caca. Ou que j'en ai envie. Allez, je vous laisse avec quelques clichés de mes vacances…

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Vous aimez les mars ? (épisode 2)

Nuxe

On en était donc au moment où docteur Z m'annonçait qu'il allait me faire déguster un mars. (Et NON, despé, il ne faut pas y voir quoi que ce soit qui n'ait à voir avec un exercice didactique)

– Vous avez faim, là ?

– Non, pas vraiment.

– Tant mieux, le but est que vous mangiez sans faim, en l'occurrence. Vous êtes stressée ?

– En ce moment, je suis stressée 24/24, donc oui.

– Sur une échelle de 1 à 10, à combien évaluez-vous votre stress ?

– Je dirais… 5.

– On peut mieux faire ?

– Aisément…

– Alors on va être un peu maso et on va faire monter le stress.

Et me voilà les yeux fermés, un mini mars posé devant moi, en train d'écouter mon bon médecin jouer les cassandres et tel un télépathe, m'expliquer en quoi le sujet de mon angoisse pouvait en effet avoir des conséquences ultra angoissantes et négatives sur ma vie. Tant de perspicacité m'a d'ailleurs fait penser que malgré un grand nombre de patientes, il avait visiblement noté scrupuleusement ce que je lui racontais depuis ces derniers mois, en effet, ma mère, ma soeur, mon churros ou ma Zaz auraient pu me tenir le même discours. Troublant. J'ai bien essayé de faire diversion en le charriant sur le mode "j'ai bien fait de venir, en partant je me jette sous un pont, vous aurez ça sur la conscience", mais ça n'a pas marché, il a l'air gentil comme ça monsieur Zermati, m'enfin faut pas trop le chercher et le regard noir qu'il m'a lancé m'a calmée. Au bout de cinq minutes à visualiser très concrètement le tour que pourrait prendre ma vie dans les prochains mois si tout se passait pour le pire comme j'ai tendance à l'imaginer en grande optimiste que je suis, les larmes se sont mises à couler toutes seules et on peut dire que si l'objectif était de me mettre en panique, c'était réussi.

"Sur une échelle de 1 à 10, là, il est à combien le stress ?", m'a redemandé le médecin.

– 12.

Forcément, docteur Z, alias mister Hyde était ravi, on allait pouvoir commencer l'expérience.

Il m'a donc demandé de me concentrer sur ma respiration, sans pour autant vouloir la modifier, simplement penser au passage de l'air dans mon nez, ma trachée et ma poitrine. "Les pensées qui vous viennent à l'esprit, vous les notez intérieurement, puis vous revenez sur la respiration". Au bout de quelques secondes, il m'a tendu le mini mars, que j'ai sorti de son emballage (Despé, tu SORS). Il m'a fait le regarder, le humer, le toucher, puis en croquer une bouchée. "Maintenant, vous faites tourner le morceau dans votre bouche, vous en appréciez les différentes textures, vous en sentez l'odeur. Vous notez les goûts que vous percevez, le sucré du caramel, la douceur du chocolat. Là, vous pouvez le croquer, le macher et puis ensuite, l'avaler. Vous vous attardez sur le passage dans votre gorge de l'aliment et vous ne rouvrez les yeux qu'une fois que vous avez totalement absorbé ce que vous aviez dans la bouche", a-t-il psalmodié pendant que je me faisais clairement un shoot de mars.

Quand j'ai rouvert les yeux, il m'a semblé que mon pouls était plus lent que quelques secondes avant. Je n'avais croqué que quelques milligrammes de chocolat et pourtant j'avais la sensation d'avoir mangé le morceau entier. Le doc m'a fait reprendre une bouchée, en suivant le même rituel.

– Alors, à quel niveau maintenant, le stress ?

Le stress ? Qué stress ? Disparu, envolé, de manière totalement temporaire, j'en étais consciente, mais le fait était que je me sentais plus légère, pourtant lestée d'une bonne dizaine de calories.

Au passage, je venais de comprendre pourquoi j'aime les mars: tout simplement parce que c'est mortel, putain, ce chocolat qui craque sur le caramel qui coule, seigneur, pendez-moi haut et court.

"La différence entre ce que vous venez de faire, déguster un aliment dans l'objectif de calmer une anxiété, et une compulsion, c'est que lorsqu'il s'agit d'une compulsion, le stress ne diminue pas après l'ingestion, il augmente, ce qui occasionne la prise d'un autre gâteau, un autre carré de chocolat, un autre morceau de pain. La différence, c'est la pleine conscience dans laquelle vous avez mangé ce morceau de mars. Et quand bien même vous mangez tous les jours un mars entier en ce moment parce que les circonstances font que vous en avez besoin, ça n'est pas GRAVE. Parce que vous savez aussi que vous êtes en mesure de vous réguler. Que vous mangerez du coup probablement moins au repas d'après. Deux bouchées de mars ou autre n'auront aucun effet sur votre poids. A condition de ne pas vous y prendre comme un manche (Despé, je ne sais plus quoi faire de toi)."

Je suis repartie avec de nouveaux devoirs: noter mes émotions dans la journée, les nommer (colère, anxiété, culpabilité, tristesse), les noter de 1 à 10 et estimer la façon dont l'aliment ingéré en cas d'envie a réussi à faire baisser la tension.

J'avoue être assez perplexe, même après cette séance. Je sens qu'en effet, les choses compliquées commencent, et pas seulement parce que j'ai une bonne raison de me mettre la rate au court bouillon. Le temps des prouesses et du parcours de l'élève parfaite est passé, il s'agit désormais de vivre au long court, en acceptant l'idée de reprendre du poids (inéluctable parce que la vie n'est hélas ou tant mieux pas toujours un chemin pavé de fleurs), en réalisant que ça ne changera pas l'amour que les miens me portent et en arrêtant de diaboliser toutes les tentations qui inévitablement jalonnent mes journées.

Pas gagné et en même temps, pour le coup, tellement rassurant de savoir que rien n'est interdit…

Edit: Pas de panique, je ne suis pas malade, ni le churros, ni les enfants, ni qui que ce soit de proche. Je ne souhaite pas m'étendre plus, parce que voilà, tout n'est pas à dire ou raconter, mais pas d'inquiétude, rien qui ne soit irréparable.

Edit2: La photo, c'est un souvenir du massage chez Nuxe, rue Montorgueil, offert par ma chère Mimi pour mon annif (oui, j'ai été pourrie cette année, on peut le dire). Plus chère évidemment qu'un mars, mais effet zénitude garantie, durant l'heure pendant laquelle je suis passée par les mains expertes de la masseuse, je n'ai pensé à RIEN et c'était vraiment BIEN.

Vous aimez les mars ?

Mars

Vendredi, j'avais Zermati.

A chaque fois, ça commence de la même façon, sur la même question: "Comment allez-vous ?". Anodin, on est d'accord, sauf que bien évidemment, la réponse a en général un peu à voir avec comment je vais au niveau de la nourriture. Enfin, en vrai, je commence toujours par raconter un peu ma vie rapport que les séances se succédant, on n'est pas hyper loin de quelque chose qui s'apparenterait à une thérapie.

Le truc c'est qu'inévitablement, mes états d'âme, éric, me ramènent assez rapidement sur le tapis de la cuisine.

Et là, plus qu'un autre jour, ça n'a pas loupé.

– ça va plutôt bien, si ce n'est que je suis assez préoccupée par une nouvelle assez stressante. (yeux qui piquent, ravalage de larmes se traduisant par une déglutition bruyante, silence et reprise du propos). Et du coup… j'ai envie de manger.

Bien évidemment, ce bon docteur, loin de me charger de reproches ou de me coacher comme le feraient j'imagine les Cohen et Dukon, sur le mode: "vous êtes plus forte que l'appel du twix", a semblé presque content. Entendons nous bien, il était désolé pour moi et très à l'écoute, mais plutôt satisfait de mon aveu.

"Je commençais à trouver que tout se passait un peu trop bien", m'a-t-il expliqué.

Genre il était en train de se demander si j'avais pas un peu avalé un moine boudhiste ou tellement intériorisé nos discussions que j'en serais devenue plus zermatiste que le zermati, quoi. Qu'il ne s'inquiète pas, donc, la petite voix qui m'assure quotidiennement que tous mes problèmes peuvent se dissoudre dans une tablette Milka est toujours là, prête à sonner le clairon au moindre pet de travers.

– Et que faites vous, alors, s'agissant de cette envie de manger ?

Là, la bonne élève que je ferai toujours en sorte d'être, je crois, a relevé fièrement la tête et fanfaronné:

– Et bien très étonnamment, je crois que je gère bien. Je veux dire, je m'autorise des douceurs, mais j'attends d'avoir vraiment faim pour les manger. Exactement comme vous avez dit.

Je pense que je devais avoir l'air d'un chien dressé sur ses deux pattes, convaincu que son exercice mérite un sucre. Je n'ai pas été déçue, en fait de sucre, j'ai eu un mars.

Mais avant, tout de même, à la mine déconfite de docteur Z, j'ai senti que mon côté lèche-cul n'avait pas fait mouche. Voire qu'en gros, je n'avais rien compris.

– Il faut absolument que vous sachiez AUSSI manger sans faim et sans culpabilité. Oui, par moments, la nourriture EST un réconfort. On mange pour se nourrir, pour répondre à des besoins en nutriments (l'équilibre alimentaire) mais aussi pour se réconforter parce que c'est un plaisir. Et comme on s'occupe parfois plus d'un enfant que d'un autre parce qu'il est malade, on peut aussi privilégier une fonction plus qu'une autre, ponctuellement. Donc si vous sentez que votre stress peut être calmé par un aliment-plaisir, vous avez le droit de passer à l'acte".

– Oui mais j'ai trop peur qu'une chose en entrainant une autre…

– … il s'agisse de compulsion ?

– Voilà. Je me connais et je sais que je peux rapidement repasser de l'autre côté.

– Sauf qu'on a fait un travail ensemble et que tout n'est pas exactement comme avant. Il faut que vous vous fassiez confiance. Les compulsions vont naitre de cette restriction que vous vous imposez en cette période difficile.

– Oui mais comment je sais que je ne cède pas à une compulsion ? Comment je peux être sûre qu'un carré suffira et me fera du bien ? Comment je suis sûre que je ne vais pas me retrouver à avaler le paquet de gateaux avec toute la culpabilité qui va avec ?

– En écoutant votre envie. En l'analysant. En vous demandant pourquoi vous éprouvez ce besoin de manger, en réfléchissant à une autre solution possible. Parfois, on en trouve une. Parfois… non, il se trouve que le carré de chocolat EST une solution, en tous cas la meilleure à portée de main. Et dans ce cas, vous CHOISISSEZ de déguster ce morceau de chocolat. Or une compulsion s'impose à vous, elle n'est pas décidée. En décidant de prendre cette option, vous n'êtes pas dans la compulsion. Ensuite, vous prenez le temps de le manger, ce carré. Vous vous arrêtez et vous le dégustez. Vous aimez les Mars ?

"Vous aimez les Mars ?" Quelle question ? Est-ce que les chats aiment les souris ? Est-ce que le diabolo peut se passer de menthe ? Est-ce que David veut passer des vacances avec Jonathan ? Est-ce que Peter a besoin de Sloan ? Est-ce que… 

La réponse est oui, doc, j'aime les mars.

– Alors vous allez en déguster un maintenant.

Je vous raconte la suite demain si ça vous dit, je sens que j'ai été un peu longue et aussi, j'aime bien faire des épisodes. Je veux dire, au cas où ce soit chiant, au bout d'un moment…

Edit: La photo c'est moi en train de me demander si j'aime mieux les mars ou les twix. Non mais la prise de tête, l'autre…

J’aurais voulu être une femme objet

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Alors cette idée de se plaire et s'aimer. Je vais tenter de vous livrer un peu le fruit de notre discussion avec le docteur Z sur la question, sans être sûre de vraiment me faire comprendre.

Le problème en réalité est plus facile si on le prend dans le sens suivant: les gens que nous aimons nous plaisent-ils ? Attention, "plaire" est à prendre au sens large, pas nécessairement dans sa signification "physique". Pour que quelqu'un nous "plaise", il faut qu'il corresponde à des normes que nous pensons personnelles mais qui sont en réalité imposées par la communauté (en gros, est beau ce que tout le monde trouve beau, parait que ça se vérifie si on montre tout un tas de photos d'individus à un panel de gens, il y a unanimité sur les beaux et les laids). Bref, le fait que quelqu'un nous plaise est soumis à un certain nombre de conditions.

Ce qui n'est pas le cas de l'amour.

Exemple, nos enfants. Est-ce qu'ils nous plaisent en tous points ? Est-ce que notre amour dépend de leur poids, la couleur de leurs yeux, leur caractère riant, doux et docile ? Est-ce qu'on a besoin d'expliquer pourquoi on passerait par le feu pour eux alors même que ces vermines nous ont privés de notre sommeil durant les trois première années de leur vie ? (ok, c'est pas le sujet, mais on n'est pas vraiment sorti du bois à ce sujet, je tenais à en parler aussi).

En ce qui me concerne, la réponse est non. Mes machins je les aime inconditionnellement et quelque part, remarquait docteur Z, tant mieux, il en va un peu de la survie de l'espèce, donc heureusement qu'on n'a pas besoin de trouver beaux nos rejetons pour les chérir. D'autant que bien sûr, les nôtres sont magnifiques mais ce n'est pas le cas de tous les enfants, hein. Hum.

La comparaison est tout aussi valable pour l'amour de nos nuits et nos jours qui, avouons le, a une haleine de poney le matin, ronfle comme un cochon la nuit et ne ressemble pas nécessairement à Brad ou Georges. Ne parlons même pas de ses manies consistant à laisser volontairement la lunette des toilettes levée ou a jeter à la poubelle nos effets personnels exclusivement, au prétexte que ça trainait alors que pas du tout, on l'avait POSE là tout à fait consciemment (oui, j'admets, là je dévie du sujet).

Il n'empêche donc que même si on tourne légèrement la tête au réveil quand il commence à nous parler, on l'aime. Si si. On ne saurait vraiment dire pourquoi ou comment, c'est juste que voilà, on l'a dans la peau ce con.

Je m'arrête là, vous m'avez compris, c'est pareil avec Bénédicte, connue en terminale, qui a tout un tas de tics qui vous font grimper aux rideaux, mais dont vous ne pourriez vous passer plus de trois semaines et ça dure depuis 15 ans. Vous la trouvez jolie bien sûr, sauf qu'à bien y réfléchir, ok, elle a les pores dilatés, les seins pas si fermes et un léger strabisme. N'empêche que vous l'aimez, cette dinde.

Bref, je crois que j'ai été claire, les gens qu'on aime ne nous plaisent pas en tous points, mais quelque chose s'est passé, s'est construit, un lien s'est tissé et c'est comme ça.

Alors pourquoi nous on aurait besoin de se plaire pour s'aimer ? Qui, franchement, se mate dans sa glace le matin en s'écriant putain ce que je suis canon, et brillante en plus ? Ben pas grand monde. Ou alors pas tous les jours. Il n'empêche qu'il faut bien se supporter vu qu'à priori, à moins que Raël et ses copains illuminés aient raison, on n'a qu'une vie et qu'une enveloppe charnelle. Et s'aimer, c'est un bon début pour faire la route.

Sauf qu'on pense à l'envers voire de travers, me disait le docteur Zermati. Et ce ne sont pas les messages envoyés de toutes parts qui peuvent nous aider à y voir plus clair. Alors on intériorise que ne pas se plaire, ça implique de ne pas s'aimer. Et que par conséquent les autres non plus ne vont pas nous aimer.

– "Oui mais moi, je crois que j'aurais voulu plaire. J'ai un peu honte de le dire, mais j'aimerais, une fois dans ma vie, être une femme objet, un objet de désir brut, pas qu'on m'apprécie, qu'on me trouve drôle ou sympa, juste qu'on se retourne sur moi. Je sais, c'est débile et idiot, mais j'ai pas eu, ça".

Au lieu de se moquer, le docteur Zermati m'a répondu qu'en effet, à l'adolescence, on a besoin de ce truc, d'être convoité, montrée comme un trophée. Et que parfois, du coup, on cherche toute sa vie à obtenir ce qu'on a pas eu. Sauf que soyons claire, je serais bien emmerdée si là de suite, Stan, gossbo de seconde sur le lequel j'ai bavé des heures durant en vain, venait me proposer un patin derrière les toilettes.

Ou pas, remarque.

Edit: Photo prise avec mon téléphone, pas très "qualité", mais je l'aime, que voulez-vous…

Mes dix commandements alimentaires

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Six mois. Six mois environ que je suis les conseils du docteur Zermati. Sans vouloir faire de bilan, parce qu'il me semble qu'il est trop tôt pour cela et surtout parce que j'ai intégré le fait que mettre en avant ma perte de poids pourrait à terme provoquer une autre perte, je retiens ces dix commandements qui n'en sont pas vraiment mais qui sont devenus, au fil des semaines, mes mantras à moi, mes béquilles lorsque se fait entendre l'appel du chocolat…

#1 – Ce qu'on mange quand on a faim ne fait pas grossir.

#2 – C'est manger au delà de sa faim qui provoque la prise de poids.

#3 – L'équilibre alimentaire s'atteint sur le long terme et en aucun cas sur une journée, pas même une semaine.

#4 – Je ne suis pas plus responsable d'être grosse que d'être petite, myope ou bègue.

#5 – Le fait de maigrir ne me rendra pas plus aimable.

#6 – C'est la peur de regrossir qui neuf fois sur dix fait regrossir.

#7 – Ma valeur ne dépend pas du poids qu'affiche ma balance.

#8 – Après un excès, la seule chose à faire est d'attendre d'avoir à nouveau faim pour manger, sans se culpabiliser pour le plaisir pris.

#9 – Manger sans faim est aussi crétin que recharger une batterie de téléphone déjà pleine.

#10 – On peut maigrir en mangeant tous les jours du chocolat ou tout autre aliment soit-disant tabou.

Voilà pour aujourd'hui, je reviens très vite sur cette histoire de "faut-il se plaire pour s'aimer", après en avoir longuement discuté avec ce bon docteur Z., je crois avoir compris son propos et par la même occasion, fait un pas de géant, qu'il s'agisse du regard que je porte sur moi même mais aussi sur mes relations amoureuses, amicales et familiales.

Ce qui est amusant à cet égard, c'est que le livre de Jaenada que je viens de terminer, s'achève notamment sur cette phrase (de mémoire): "On n'aime pas quelqu'un pour une raison en particulier, on l'aime c'est tout". C'est en substance la conclusion de mon échange avec Zermati: on aime en général inconditionnellement les gens, qu'il s'agisse de ses parents, ses enfants, son conjoint ou ses amis. Pourquoi n'est-on pas capable d'en faire autant avec soi même ?

Edit: La photo c'est parce que je crois que je n'avais pas osé ce genre de pose depuis dix ans et que même s'il est bien là, ce bourrelet, modeste mais présent, étrangement, ne me dérange pas.

Survivors

Fête

"Au quotidien, ça va. Je gère plutôt bien mes envies, je ne me sens pas angoissée par la nourriture, je me fais plaisir et j'arrête à peu près tout le temps quand j'ai assez mangé. Mais là, par exemple, je pars en week-end chez des amis, je sais qu'on va faire la fête, qu'il n'y aura pas d'horaires pour les repas, qu'il y aura des tentations tout le temps et que je ne vais pas pouvoir faire comme chez moi, à savoir sortir de table quand j'ai terminé, pour éviter les tentations. Du coup, j'angoisse", expliquai-je la semaine dernière au docteur Zermati.

Ce à quoi il a répondu: "Il faut que vous vous fassiez confiance tout de même, maintenant. Que vous fassiez confiance à la régulation, surtout"

"Oui, vous allez probablement manger plus que d'habitude, à circonstances exceptionnelles, comportement alimentaire exceptionnel. Si vous pensez qu'il est possible de se nourrir en permanence en écoutant ses sensations, en mangeant exactement ce dont votre corps a besoin, vous vous trompez complètement. Les personnes qui ne font jamais un seul écart, qui ont une alimentation linéaire ont un problème, justement avec la nourriture. Ce sont eux qui sont déséquilibrés. D'ailleurs, très franchement, je n'en connais pas", a-t-il ajouté.

Quel soulagement encore une fois d'entendre ces choses là. La vie n'est pas un long fleuve tranquille et la bouffe non plus. Résultat, comme par hasard, j'ai passé deux jours tranquille, à ne me priver de rien, à ne surtout pas réfléchir à ce qui était en trop ou pas. Et à l'arrivée, pas de cata sur la balance.

Et quand bien même il y en aurait eu une de cata, je pense que ça se serait réglé, parce qu'en rentrant, pleine comme un oeuf de petits fours picard, de cannelés Baillardran, de champagne, de binouze et de pain surprise, j'ai eu une furieuse envie…

D'endives braisées.

Je sais, dingue.

Bref, ce que je suis en train d'essayer de comprendre et d'intégrer, c'est que la peur de regrossir me fera grossir. Ce que je comprends aussi, c'est que oui, c'est plus agréable de passer la soirée à danser en ayant la sensation d'être légère, oui, les compliments des amis pas vus depuis le meilleur de ma forme l'année dernière sont flatteurs. Mais non, ça ne change pas grand chose au plaisir qu'ils ont eu – ou pas – de me revoir et encore moins à celui que j'ai éprouvé moi.

Je comprends aussi, depuis les explications un peu scientifiques de docteur Z., que pour grossir comme je sais le faire, il faut souffrir de deux pathologies. La première est l'incapacité à gérer les émotions autrement qu'en mangeant. On en a déjà parlé, c'est indépendant de la volonté, un réflexe de pavlof, certains vont pleurer quand ils sont tristes ou inquiets, d'autres auront besoin d'un verre, d'autres d'une barre Milka. Parfois, on a même la chance d'avoir envie des trois à la fois. L'autre désordre, génétique, celui-ci, provoque une multiplication des cellules graisseuses, une multiplication irréversible qui fait évoluer le poids "de forme" inexorablement vers le haut. ça, tu l'as ou tu l'as pas. Les personnes qui n'ont pas cette mutation génétique, grossissent si elles mangent beaucoup, mais leurs cellules ne font que prendre du volume, volume qu'elles perdent dès que l'alimentation diminue. Les gens comme moi, eux, fabriquent des tas de copines à leurs adipocytes. Et c'est uniquement la combinaison de ces deux désordres qui entraine la prise de poids.

J'ajoute que d'après le docteur Z, si de plus en plus de gens sont obèses c'est aussi et tout simplement parce qu'au gré des guerres et des famines, les êtres non pourvus de la capacité à multiplier leurs cellules graisseuses, ont disparu, faute de pouvoir survivre. En gros, nous les gras, on est un peu des winners, des survivors. ça calme, non ? Comment que j'aurais aimé lui balancer au crétin qui voulait lancer un carothon pour me faire maigrir au collège…

Bref, seule solution pour enrayer le processus, agir sur les émotions. Pas sur les envies qu'elles déclenchent, une fois encore, ça, on n'y peut pas grand chose c'est un réflexe acquis depuis trop longtemps. Mais sur la naissance de ces émotions, comprendre dans quelles situations on est vulnérable, trouver la source du mal-être. C'est dans ce travail là que je suis désormais, un travail qui est beaucoup moins simple que le comportementalisme du départ ou que la reconnaissance de ses sensations. C'est une quête qui me ramène sur le chemin de mon enfance, de mon adolescence, et dont je ne sais pas exactement ce qu'elle va me permettre de trouver. Mais c'est passionnant et curieusement, j'ai en ce moment très peu de compulsions. J'ai aussi, et ça c'est encore mieux, plus d'assurance face à ceux qui habituellement me font perdre mes moyens (et ils sont nombreux, je suis une grande gueule des couloirs, je rappelle).

Bref, pas de magie dans tout ça, pas d'évidences, beaucoup d'introspection et parfois quelques illuminations qui m'aident à comprendre le pourquoi de certains goûters qui jadis duraient jusqu'au repas du soir…

Se plaire ou/et s’aimer ?

Sifnos

"Est-il nécessaire de se plaire (à soi-même) pour s'aimer (soi-même) ?"

Ouais ben on rigole, on rigole mais moi je suis censée plancher sur ce sujet du bac pour ma prochaine séance chez le docteur Z.

Et je sèche un peu.

Autant vous dire en plus que le doc, il a sa petite idée sur la question et que d'après ce que j'ai compris – c'est qu'on commence à bien se connaitre – la réponse est non.

Même que ça pourrait être un peu la raison de tous nos malheurs, cette confusion que nous faisons entre plaire et être aimé.

Non, de rien, ce fut un plaisir.

Edit: la photo, c'est juste parce que là tout de suite, je voudrais être à Sifnos. Et puis j'aime bien la mise en abîme de je me prends tu me prends en train de te prendre en photo. Et finalement, on n'est pas si loin de cette histoire d'image qui nous plait ou non. Ok, je raconte n'importe quoi.

Sur-exposée

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"Vous vous exposez trop, faites attention".

C'est le docteur Zermati qui m'a mise en garde lundi. Attention, aucun jugement de valeur dans cet avertissement, ni critique de mes billets sur la thérapie. Non, ce qu'il a voulu me faire comprendre, c'est que donner ici des détails sur le nombre de kilos perdus n'était pas forcément bon pour moi.

Pourquoi ? Parce que quelque part, je me mets toute seule la pression. Celle de ne pas "décevoir", de devoir tenir absolument, de ne pas faillir, pour ne pas avoir honte ensuite de devoir avouer ici que oui, j'ai regrossi.

"J'ai vu souvent des gens, un peu ou beaucoup célèbres, censés maigrir pour une marque quelconque de produits diététiques et dont l'amaigrissement était devenu un argument de vente. Ils ont tous fini par regrossir", a-til ajouté.

Sur le coup, j'avoue, j'ai été ébranlée. Après tout, je fais ce que je veux, et puis sur ce blog j'ai pris l'habitude de tout raconter, et puis je me suis aussi montrée plus grosse, et puis l'idée n'est pas de fanfaronner, simplement de témoigner. Non, je n'en fais pas un argument de vente ou de communication, n'importe quoi l'autre.

Sauf que… hum.

Evidemment, je fanfaronne.

Comme un enfant qui arbore sa deuxième étoile durement gagnée, j'ai cédé à la tentation, moi, d'épingler sur ces pages la graisse perdue. A grand renfort de photos flatteuses et d'annonces victorieuses, moins un, moins trois, moins dix, moins… stooooop.

Et oui, si j'y réfléchis bien, ça me met la pression. Parce que reprendre du poids serait, à tort sûrement, un échec. Assurément. Un échec d'autant plus cuisant qu'il serait public et constaté par vous tous

"Je ne vous le souhaite pas du tout, je touche même du bois, mais il est tout à fait possible qu'un jour vous soyez amenée à regrossir. Même en admettant que vous respectiez toute votre vie vos sensations alimentaires, il y a tout un tas de facteurs extérieurs qui peuvent intervenir. Vous pourriez être contrainte de prendre des médicaments (anti-dépresseurs, anti-cancéreux ou autres agissant sur le métabolisme), subir les effets hormonaux de la ménopause ou que sais-je. Ce jour là, votre valeur en serait-elle moindre ?".

Wow, là aussi, inutile de dire que j'ai été un peu bousculée. Attends, je suis la parfaite bonne élève zermatienne et voilà ce que je me prends ? Non mais où qu'ils sont les bons points et les images, hein ?

Plus sérieusement, je crois qu'il fallait probablement en passer par là pour calmer mon euphorie de dinde hystérique d'entrer à nouveau dans un 42.

Oui, c'est bien, oui, c'est normal d'être heureuse de s'apprécier à nouveau. Mais non, sur-valoriser ce changement de silhouette n'est pas bon à long terme. Parce que c'est se mettre dans la tête que reprendre deux kilos serait dramatique. Et il y a fort à parier alors que ce ne serait pas deux kilos qui viendraient s'ajouter mais dix de plus, sous l'effet du stress et de l'angoisse générés.

Toutes ces remarques, le docteur les a formulées après avoir lu mon petit bréviaire de ce que j'éprouverais si je regrossissais. Il en est ressorti que très clairement, pour moi, obésité et estime de soi ne font pas très bon ménage (en même temps aucun scoop à l'horizon, hein).

En d'autres termes, j'ai une légère tendance à me considérer comme une personne de plus grande valeur lorsque je mincis.

"Ce qui compte, ce n'est pas le regard que portent les autres sur vous, celui-ci, vous n'y pouvez pas grand chose. Ce qui compte, c'est que vous, vous soyez convaincue que vous n'avez pas été grosse durant toutes ces années par manque de volonté, par faiblesse ou absence de ténacité. Parce que oui, je vous l'assure, cela n'a RIEN à voir avec la volonté. Il se trouve, même, que trop de volonté dans ces cas là ne fait que détraquer un peu plus la machine.

Pour faire une comparaison qui peut vous parler, un gardien de but peut arrêter un pénalty. Si vingt personnes tirent en même temps vingt ballons dans sa cage, il ne sera pas en mesure de tous les attraper. C'est ce qui se passe avec les envies de manger pour des gens qui comme vous souffrent d'un dérèglement du comportement alimentaire. Une envie de manger, vous pouvez, à force de volonté, la stopper. Deux, trois, peut-être. Mais si votre cerveau vous en envoie 50 dans l'heure, c'est impossible. Que vous soyez ou non quelqu'un d'obstiné".

Il m'a également expliqué tout le processus qui conduit quelqu'un à prendre du poids au fil des ans. C'est un peu compliqué et fastidieux à expliquer, mais si ça vous intéresse, je tenterai de vous le formuler avec mes mots. Mais en gros, ce que j'en ai retenu, c'est que oui, mère nature la truie. Ou pas, d'ailleurs, parce que d'après le docteur Z., je ferais bien d'arrêter de l'engueuler, mother nature. Parce que j'ai sacrément de la chance d'avoir perdu autant en si peu de temps, c'est la preuve que mon corps n'a pas été totalement déréglé par tous les régimes que je lui ai fait subir.

Ce que j'ai retenu aussi, c'est qu'à mon corps défendant, je porte un regard aussi malveillant sur moi (et donc les personnes en surpoids) que les garçons qui m'emmerdaient à l'école quand j'étais enfant. Et que tant que je n'aurai pas cessé de mépriser cette adolescente ingrate que j'étais, je n'aurai pas beaucoup avancé. 10, 15 ou vingt kilos en moins n'y changeront rien.

"Quand vous croiserez dans la rue, le métro ou ailleurs des personnes en surpoids, regardez-les comme elle doivent l'être. Comme des gens qui ne sont pas à blâmer pour ces kilos, dont ils ne sont pas responsables. Ce sera un bon début".

Je suis partie sur ces mots et depuis lundi tout ceci tourne dans ma tête. Je n'ai plus trop envie de parader, j'ai compris, je pense, que la partie était loin, loin d'être gagnée. Et j'essaie de me convaincre qu'en effet, voir à nouveau l'aiguille de la balance partir dans le mauvais sens ne serait en rien la preuve que je ne vaux pas tripette…

Edit: A compter d'aujourd'hui, donc, je continuerai à parler de tout ça, mais
sans donner de détails chiffrés sur mes "performances", qui ne doivent
justement pas être considérées comme telle.

Edit2: Il me semble que c'est évident mais je préfère le préciser, les propos que je rapporte sont exacts dans leur sens, mais je ne prends pas des notes et j'écris donc ça à ma sauce. Le docteur Z. a la grande gentillesse de me laisser raconter tout ceci sans jamais juger ou émettre une remarque alors que je pense qu'il lit, pas tout peut-être mais tout de même. Mais ces écrits sont avant tout ma version des choses, qui n'engage que moi.

Edit3: Je veux aussi ajouter que je ne raconte pas tout des séances et que chaque patient vit les choses à sa façon. Chaque patient est également particulier et ce qui est valable pour moi ne l'est pas forcément pour un autre…

Edit4: Non, rien.

Edit5: Ah, si, la photo c'est celle d'un shooting qui date de trois ans maintenant pour une marque de shampoing qui voulais montrer qu'elle aimait toutes les femmes, à la Dove, quoi. Pour ceux que ça intéresse, j'en avais fait des billets, et .