Mois : janvier 2012

La maternité est un arc-en-ciel

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Ce week-end, on hébergeait le pote du machin, dont la maman était en train d'accoucher. Il était hyper attendrissant, on sentait bien qu'il se faisait du souci et qu'il était super ému mais pardon, un garçon de 11 ans, ça serre les dents. 

A table, les enfants lui demandaient ce que ça lui faisait, de bientôt être grand-frère. Visiblement, ça lui faisait sûrement quelque chose mais l'exprimer était compliqué. En revanche, il était impatient de retrouver sa mère comme avant. "Demain quand j'irai la voir elle ne ressemblera plus à une pastèque, ça va être bien", il a lancé.

"Ouh là, l'a immédiatement arrêté le machin. Ne te fais AUCUNE ILLUSION, ça met beaucoup plus de temps !". C'est tout juste s'il n'a pas ponctué sa sortie d'un rire gras et sonore. En face, ça n'en menait pas large. Sa soeur le regardait avec quelque chose dans les yeux qui ressemblait clairement à de la haine (ma préférée, il faut dire) et son père, lui, avait cette expression terrorisée du mec qui assiste, impuissant, au massacre de son coéquipier. S'il avait pu parler (mais il ne pouvait pas) (courageux mais dans la limite du raisonnable) il lui aurait probablement dit à quel point malgré tout cela avait été un honneur de combattre à ses côtés.

"Beaucoup, BEAUCOUP plus de temps", a répété le machin. Je suppose que ce sont les sanglots de son père (c'était son fils quand même) qui l'ont empêché d'ajouter que trois ans après il restait peut-être même encore quelques traces.

Sinon rien à voir mais je vous déconseille absolument ce bouquin Fleurus sur les accidents domestiques (cette collection est pas mal pourtant). Au mieux c'est anxiogène, au pire ça leur donne des idées. En plus avec un peu de chance vous tombez sur une gosse sadique comme la mienne qui ne veut que ce livre pour l'histoire du soir. (livre qui est donc une sorte de compilation des idées à la con susceptibles de germer dans le cerveau encore immature de nos petits). Elle a une prédilection pour ce passage là, qui compte-tenu du fait divers sordide d'il y a quelques semaines est encore plus glauque (à mon avis il ne figurera pas dans la ré-édition)

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J’aime #13

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La semaine dernière, il y a tout un tas de choses que je n'ai pas aimées, au nombre desquelles la disparition de La Tribune dans l'indifférence générale ou presque, la prestation tartuffienne de Sarkozy à la télévision dimanche, la publication sur le Plus d'un article sentant, disons le clairement, la merde. La liste n'est pas exhaustive. Mais nous sommes lundi n'est-ce pas, et le lundi, j'en ai décidé ainsi…

J'aime.

J'aime le défilé du nouvel an chinois et tout particulièrement ces vieilles dames avec leurs éventails roses. 

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J'aime le vernis de la miss et ses tee-shirts petit-bateau blancs.

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J'aime cette nouvelle brosse Michel Mercier, vendue chez Monop (what else) qui promet de ne pas tirer les cheveux et qui, miracle, tient ses promesses (en ces temps troublés, c'est important de le remarquer)

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J'aime recevoir une boîte pleine de coeurs et de produits que je n'aurais jamais achetés.

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J'aime préparer le repas en écoutant le grand entretien de François Busnel sur Inter. C'est peut-être un des principaux atoûts de ma nouvelle vie. 

J'aime les sandwichs vietnamiens qu'on mange le jour du nouvel an chinois.

J'aime La Grande Sophie et surtout son nouvel album, reçu en avant-première et qui passe en boucle à la maison depuis deux jours. je vous en reparle très vite.

J'aime la perspective d'une semaine de vacances bientôt, j'aime moins avoir pris conscience il y a deux jours que mon passeport expirait pile à ce moment là. J'aime finalement l'idée de partir peut-être mais pas sûr, loin ou non. Je crois que finalement, c'est l'espoir d'un voyage que je chéris, plus que le voyage en lui même. 

J'aime cet article enfin, parce qu'il m'a été envoyé par mon amie Sarah qui me manque mais aussi parce que ce qu'écrit l'auteur est fin, drôle et juste. Moi aussi, à la question "aimes-tu écrire", j'avoue être tentée de répondre qu'en réalité, non, ce que j'aime, c'est d'avoir écrit. Et ceci marche donc, puisque c'est le sujet de l'article, pour les enfants. Je les aime en général d'autant plus viscéralement lorsqu'ils sont couchés, bien sagement, et que je me blottis contre mon churros dans mon lit. A ce moment là, je me dis que décidément, qu'est-ce que j'en ai de la chance. Allez le lire, vous ne culpabiliserez plus jamais de ne pas réaliser à quel point c'est merveilleux, d'avoir un bébé, surtout au moment où il gueule comme un veau depuis deux heures et que tout un wagon semble fomenter un assassinat en bonne et due forme. (l'article est en anglais par contre, mais on comprends assez facilement je trouve, en tous cas les grandes lignes)

Bonne journée.

Arrogance

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Hier, le machin me faisait relire une rédaction qu'il devait rendre aujourd'hui. Au passé simple, le texte. Ce qui donne toujours lieu à quelques néologismes, même en 6ème. Ainsi, son héros vut le ciel s'assombrir, il vut également son chien s'enfuir et quand il vut sa mère arriver, il prit peur.

Il avait un doute, hein, Maitre Capello. "Je n'arrive plus à savoir si on met un "t" à la fin de vu".

Sa soeur lui soutenait que oui mais lui trouvait que ça sonnait mieux sans. 

Avec toute la pédagogie dont je sais faire preuve, je lui ai gentiment rappelé la conjugaison du verbe voir au passé simple. "C'est il VIT. IL VIT !" Après j'ai appelé Acadomia (ok, l'enseignement public c'est super mais on va sécuriser le parcours).

Et bien croyez moi ou non mais dès que j'ai eu le dos tourné, ils sont allés tous les deux VÉRIFIER SUR GOOGLE.

Mon orgueil en a pris un léger coup, je dois bien l'avouer. Surtout qu'à force de lire leurs passés simples fantaisistes, je concède avoir désormais des doutes même sur le premier groupe. La dernière fois "il alla" me semblait bizarre. Faut dire qu'il arrivait après "il courra", "il finissa" et il souffra" (là à nouveau j'ai un doute). Merci la maternité. J'étais une bombe, moi en grammaire. On m'appelait Bescherelle. C'était avant. 

Voilà, à part ça hier j'ai regardé the debate entre le meilleur d'entre nous et celui-qui-a-maigri-mais-qui-ne-fait-plus-de-blagues et ça m'a mis des crampes d'estomac tellement c'était insupportable. A savoir que Juppé n'en pouvait plus d'être enfin remis sur le devant de la scène, il était chauffé à blanc (chargé ?) et a un peu cru qu'en réalité ce n'était pas un débat mais une émission spéciale sur sa grande et digne personne. Sans compter cette tactique tellement Sarkozyste consistant à se victimiser sur le mode "mais que vous êtes arrogant monsieur Hollande, regardez comme il est arrogant", pendant que le Hollande avait du mal à terminer une seule phrase, vu que l'autre passait son temps à dire qu'il était arrogant. On est donc au courant que les éléments de langage de l'UMP ont changé. Fini le temps où Hollande était un mou indécis, il est désormais ARROGANT. 

Comme l'a si bien résumé William hier dans nos échanges twitter, "c'est toujours celui qui se plaint de l'odeur qui a pété. Toujours".

Ah et sinon, sachez que Juppé est peut-être très bon en finances publiques (en tous cas il avait à coeur de le démontrer hier) mais il est très limite en grammaire (lui aussi). A deux reprises il a dit à Hollande "vous vous contredites". Et deux minutes après, Hollande l'a lui même accusé de la même chose, mais a quant à lui utilisé "contredisez". Et bien grâce à la magie de l'internet collaboratif, j'ai eu la réponse, c'est François qui a raison. Bien ce qu'il me semblait. Je vais en épater deux ce soir, moi, je ne vous dis que ça. 

Sinon, histoire de ne pas perdre tout mon lectorat avec un billet grammatical, place à a moderie (ce serait dommage de ne pas parler deux minutes de cette magnifique photo). J'ai donc fait une véritable affaire avec cette jupe à 6 euros chez Monoprix. Ou pas. En tout cas elle est très confortable. Ce qui est marrant c'est que moi qui connait les collections par coeur (c'est mon yoga à moi, parcourir les allées fringues du monop'), je ne l'avais jamais vue. Et là, pof, 70%. Je suis une tête chercheuse. Qui trouve. Ce dont personne n'a voulu.

La carte scolaire, finalement, je crois que je suis pour (même pour mes enfants)

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Hier dans les commentaires, il m'a été demandé de revenir sur cette histoire de collège dont j'avais parlé l'année dernière au moment des inscriptions en 6ème. Sur le mode "tu parles d'égalité, c'est très bien, mais il me semble que toi même tu as eu des hésitations au moment de mettre tes enfants dans un établissement de mauvaise réputation". Je précise que la question était posée gentiment, ce qui tout de suite donne envie de répondre. Et puis je crois qu'en effet, ça ne sert pas à grand chose de professer des grands principes pour n'être que très moyennement droite dans ses bottes quand il s'agit de balayer devant sa porte.

Je ne vais pas vous refaire tout le film, je m'étais longuement exprimée dans ce billet. Mais pour faire simple, nous habitons du mauvais côté de la rue. Enfin, du mauvais côté pour qui considère donc que le collège sur lequel nous sommes sectorisés, c'est comme qui dirait le bronx. Sachant que "qui" égale en l'occurence 90% des parents d'élèves du quartier. Je veux dire, depuis huit ans que nous sommes installés dans cet appartement, à chaque fois qu'on m'a demandé – dès la troisième année de maternelle – où iraient mes grands après le primaire, ma réponse a provoqué des regards aussi désolés que si j'avais annoncé qu'on n'avait pas de papiers. Suivis de ces quelques mots: "non mais au pire tu les mettras dans le privé".

Autant vous dire que donc l'année dernière, j'ai commencé à m'inquiéter un peu. Allais-je me plier à la carte scolaire (qui existe donc toujours, hein, ceux qui penseraient le contraire se trompent) ou allais-je déployer des trésors d'ingéniosité pour permettre à mes chers petits d'échapper à toutes les avanies qu'on leur prédisait si d'aventure ils se retrouvaient dans cet établissement pourri ?

Bien sûr, ça me gênait aux entournures. Mon coeur à gauche, la mixité, toussa toussa. Et en même temps, mes bébés, quoi. Leur avenir, Henri IV, Sciences-Po Paris, l'ENA, la PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE, comment cela serait-il possible s'ils étaient marqués au fer rouge du collège poubelle ?

La situation s'est singulièrement complexifiée lorsque j'ai appris qu'en plus, le collège en question ne comptait qu'une seule sixième bi-langue (anglais et allemand dès la première année), alors même que de l'avis de leurs instits, ils avaient tous deux le profil pour commencer cet apprentissage linguistique dès la sixième. On m'objectera qu'on peut tout à fait réussir sans faire de l'allemand. Vrai. Mais je ne vais pas vous raconter d'histoires, la bi-langue, c'est aussi en langage non politiquement correct la "bonne" classe. Ce qui, quand vos enfants se débrouillent pas trop mal, semble la voie toute tracée. Sans compter qu'ils avaient fait de l'allemand en primaire et que je trouvais un peu idiot de perdre ces acquis.

Bref, me refusant dans un premier temps à magouiller, j'ai rempli docilement le formulaire de dérogation, expliquant que je souhaitais que mes enfants ne soient pas dans la même classe, mais tous deux en bi-langue, et que cela n'était pas possible dans le collège A mais par contre envisageable dans le B, plus grand. (je précise qu'en l'occurence, le collège B n'est pas vraiment une succursale d'Henri IV, un poil mieux réputé mais pas non plus le must).

Résultat: une réponse négative et lapidaire, m'expliquant que les effectifs ne permettaient pas d'accepter cette demande.

A ce moment là, le directeur de leur école primaire, mais aussi certains parents délégués, amis ou anciens collègues m'ont invitée à jouer des coudes, à aller pleurer au rectorat, à faire jouer la carte de presse, à trouver une vieille cousine conciliante habitant dans le 5ème arrondissement, ou, en désespoir de cause, donc aller dans le privé.

J'ai beaucoup réfléchi, j'en ai parlé ici et lu de nombreux commentaires m'invitant à être, justement, un peu cohérente. Certaines d'entre vous, profs dans le quartier, m'ont même gentiment écrit pour me rassurer, non, le collège A n'était pas si pourri que ça, l'équipe enseignante était super, etc.

On a aussi beaucoup parlé avec les twins. Eux, leur problème, ce n'était ni le fait d'être dans la même classe, ni la mauvaise réputation du collège. Ce qui les angoissait, en réalité, c'était l'idée d'arriver sans un copain en 6ème, du fait notamment que la majorité de leurs amis étaient soit sectorisés dans l'établissement B, soient avaient réussi à contourner le système.

Avec le churros, on s'est dit que ça n'était pas une raison suffisante pour piétiner nos principes. Que des amis, on s'en fait à tous âge et que les anciens copains ils les verraient le week-end. Et donc, on a décidé tous ensemble qu'on allait arrêter les frais et ne pas déclencher l'opération "désectorisation".

Ce qui m'a considérablement détendue du gland, je suis du genre à ne JAMAIS envoyer les lettres de contestation en cas de PV injuste ou amende dans le métro pour cause d'oubli de mon pass navigo. J'ai déjà du mal à envoyer mes fiches de sécu ou encaisser mes chèques, alors aller RECLAMER, n'y pensez pas. Et puis j'ai appris au cours de ma déjà un peu longue vie, que demander un service revient la plupart du temps à vous enchainer à celui qui vous aura fait bénéficier d'un passe droit.

Bref, mes enfants sont donc entrés en sixième dans un collège classé ZEP faisant office de repoussoir dans le quartier depuis des années.

Et…

Et c'est génial.

Je veux dire, ce n'est pas, "ça va", "ils s'en sortent", ou "c'est pas si pire".

Non, c'est GENIAL.

A savoir que la classe bi-langue c'est certes une bonne classe, mais pas un groupe d'élite isolé au milieu d'un dépotoir. Que l'équipe enseignante est en effet soudée, ultra motivée (du genre à vous appeler pour vous demander si vos gamins veulent aller voir la mélodie du bonheur demain soir avec l'autre sixième, rapport qu'il reste des places), ultra compétente, ultra présente (en un trimestre, déjà deux rencontres organisées avec les enseignants en tête à tête). Je compte sur les doigts d'une main les absences de professeurs. Ils partent dix jours en classe de neige en mars, à un tarif tellement correct que tous les gamins ou presque peuvent y participer (ceux ne venant pas ayant décliné pour des raisons qui n'ont aucun rapport avec l'argent). Les mômes sont hyper suivis, la moindre absence est signalée, les retards sont sanctionnés et l'interface web permet de suivre tout ceci en temps réel, notes et devoirs à faire compris.

Le statut ZEP permet d'avoir des effectifs raisonnables (25 dans leur classe contre beaucoup plus dans certains collèges à Paris), mais aussi accès à des activités financées par la mairie, en l'occurence un atelier cinéma au cours duquel ils réalisent des courts métrages d'un niveau qui n'a rien à envier à des films professionnels.

Surtout, jamais je n'avais eu autant l'impression d'être impliquée dans la vie d'un établissement. Le proviseur insiste à chaque réunion sur l'importance pour les enfants et les enseignants que les parents se sentent aussi chez eux au collège, et ça n'est pas une simple déclaration d'intention. Par deux fois par ailleurs, je suis entrée aux heures de cours, et j'ai pu constater que cette sérénité que je devinais était bien réelle, même en dehors des rassemblements parents / enseignants.

Quant au "niveau", franchement, il ne me semble absolument pas différent de celui des collèges attenants. Alors bien sûr, tout n'est pas parfait, bien sûr il faudrait probablement plus d'encadrement, bien sûr si tous les gamins "sans problèmes" n'avaient pas déserté vers d'autres établissements, la mixité serait encore plus garantie. Mais quand je pense au tableau apocalyptique que l'on m'avait dessiné, j'ai tendance à me marrer.

Je ne vous cache pas que j'ai du mal à me retenir de jubiler quand j'entends certains parents d'anciens copains regretter leur choix, constatant que les collèges pour lesquels ils ont opté finalement, et bien ça n'est pas toujours le Pérou. Je ne vous cache pas non plus que je fais un lobbying d'enfer pour vanter les mérites du collège A, auprès de qui veut bien l'entendre (ma boulangère n'en peut plus). Mais je sais aussi que c'est une des techniques les plus efficaces pour faire changer une réputation. Parce qu'une réputation, c'est comme les rumeurs de séparation entre Vanessa et Johnny, ça se fonde souvent sur du vent. 

Bref, la leçon de tout ça, c'est que je me suis fait des cheveux blancs pour rien. Surtout, je suis bien contente de m'être arrêtée à temps, avant d'avoir recours à des stratagèmes qui ne grandissent personne. Et que parfois, il faut cesser d'anticiper les problèmes. Ceux-ci arrivent en général toujours quand on ne les a pas sonnés ni imaginés. 

Donc la carte scolaire, et bien je crois que c'est une bonne chose. Parce que dans mon cas, si elle n'avait pas existé, mes enfants seraient probablement passés à côté d'une très belle année. Et d'un établissement pas forcément rutilant, mais doté du plus important : une âme.

Edit: quant au fait d'être dans la même classe, ce n'est pas l'idéal tous les jours, mais cela présente des avantages certains, surtout pour le machin à vrai dire qui voit toutes ses étourderies rattrapées par sa soeur. A terme je ne suis pas certaine que ça l'aide à prendre ses responsabilités mais cela nous épargne pas mal de crises de nerf et égoistement je m'en réjouis. Et puis Claire, maman gemellaire, m'avait donné plein de conseils hyper judicieux dans un mail en septembre qui s'avèrent très efficaces…

Edit 2: Il est évident que ce qui vaut pour ce collège ne vaut pas nécessairement pour tous, que parfois on n'a pas le choix, que chacun voit midi à sa porte etc etc etc.

Fougue sentimentale

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Je crois que j'ai la militance (militation ?) sensible. Je veux dire, j'ai regardé en live sur mon ordinateur dans une fenêtre de 5 cm sur 10 environ le discours de François Hollande au Bourget dimanche, tout en rédigeant des papiers ultra galvanisants sur les éco-campus.

Et bien au moment de la séquence sur l'égalité, quand il s'est mis à scander le mot, avec des accents de plus en plus mitterrandiens, je vous jure, je n'étais plus qu'un énorme sanglot.

C'est monté, monté, monté. Et RIEN QUE DE VOUS L'ECRIRE ÇA ME LE REFAIT.

Je crois que je suis complètement irrécupérable. Je ne pourrai JAMAIS être journaliste politique. (Je ne rencontrerai donc jamais Nicolas (soupir) Domenach). Non parce que le lendemain, je regardais l'édition spéciale sur canal (un jour je vous ferai un billet "vis ma vie trop glamour de free lance", ça va déménager) et il y avait Renaud (petit soupir) Dely qui s'est offusqué quand Ali Badou lui a demandé s'il avait vibré. "J'ai regardé les gens vibrer, je suis journaliste", a-t-il répondu.

Et il a RAISON. On ne peut pas être au four et au moulin.

Bien sûr, il a totalement le droit d'être pro-hollande au plus profond de son coeur. Mais quand on couvre un meeting, il faut je crois un minimum de recul. 

Je n'en aurai jamais aucun. Je commence à chialer quand je prends le métro pour y aller. Les haies d'honneur pour accueillir le candidat me donnent envie de rouler des patins à tous les militants, c'est tout cet amour, ça doit me provoquer un déséquilibre hormonal. Et quand la star arrive, même quand il s'agit d'un homme pas à proprement parler renversant, je suis… renversée.

Et alors si d'aventure il a un minimum de talent oratoire comme François Hollande dimanche (seigneur, l'égalité), je me lyophilise. (mais ça me l'a aussi fait avec Ségolène Royal) (même Patrick Bloche m'a tiré des larmes une fois).

Bref, je suis perdue pour la cause du journalisme politique et croyez moi je le regrette. Ou alors il faudrait qu'on me colle au suivi de la droite. Mais imaginez que je sois prise du même engouement en voyant Xavier Bertrand fendre l'assemblée ? Imaginez qu'en réalité toutes ces émotions ne doivent rien à mes convictions et tout à mon désir d'être emportée par la foule ? Je ne pourrais plus jamais me regarder dans une glace, ensuite. Femme de peu de foi, va.

A part ça, donc, l'égalité, l'égalité, l'égalité. (ÇA ME LE REFAIT ENCORE)

Et dernière chose, en revanche, ce lipdub, là, où on a l'impression que les gens du PS ils n'arrivent pas à taper dans leurs mains, il faut l'enterrer, les gars. C'est un coup à se retrouver encore plus ridiculisés que Rama, Brice et Rachida qui voulaient "changer le monde".

J’aime #12

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Alors d'abord, merci beaucoup pour vos mots, une fois encore, vos messages sont autant d'encouragements à poursuivre cet exercice. 

Sans transition, un "J'aime" du mardi, donc.

J'aime les premiers bonshommes de Rose, apparus d'un coup d'un seul après des centaines de gribouillis censés incarner "une fée dans le ciel sur son cheval" ou "un bus qui part à la montagne". J'aime qu'ils aient systématiquement un nombril ET des boucles d'oreilles.

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J'aime cette écharpe de ma copine Fanny, achetée dans une petite boutique de la rue de Charonne. C'est un truc tout con, une sorte de foulard-collier qui vous habille à mon avis n'importe quelle tenue. "Non mais regarde, quand je l'enlève, je suis sapée comme une merde", tentait de me réconforter Fanny, qui n'est, je vous l'assure, JAMAIS habillée comme une merde (je venais de geindre qu'elle était hyper classe alors que moi mon plat censé être très chic ressemblait à du vomi). Comme je disais hier à Violette, je manque totalement de vocabulaire en mode mais j'aime par dessus tout ces accessoires ou vêtements qui vous font passer de "bien habillée" à "elle a vraiment du style". Tant que j'y suis, j'aime les robes à pois et tout particulièrement celle de ma copine Chloé. Je crois que ce que je trouve magnifique surtout c'est le rouge à lèvres qui pète avec une robe noire à pois blancs. Ça marche aussi avec du bleu marine. 

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J'aime les club-sandwich. Celui-ci vient du Delmas Café place de la contrescarpe et il est drôlement bon, bien qu'un peu cher (l'endroit est merveilleusement placé mais honteusement onéreux de toutes façons). D'une manière générale je crois que je pourrais me nourrir essentiellement de clubs sandwichs, c'est dramatique.

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J'aime la tour Eiffel. J'aime l'idée qu'elle prenne à chaque fois une autre dimension en fonction de l'endroit où on l'aperçoit. Parfois, elle n'est qu'un point au loin et c'est comme un petit miracle. Parfois, elle se fait furtive par la grâce d'un trajet sur la ligne 6. Parfois elle surgit au détour d'une rue – je vous conseille la rue saint-dominique pour cela, vous levez la tête et pof, elle est en face de vous alors que vous ne vous y attendiez pas. Et puis là, depuis l'entrée de l'Unesco, elle trônait, majestueuse, sans obstacle quasiment, pleine lucarne. Le matin, une ombre dans le brouillard, le soir illuminée, clignotant pour fêter l'imminence du week-end. Lorsque les twins étaient petits, nous habitions au dixième étage d'un immeuble dans le 11ème arrondissement dont le seul intérêt résidait dans la vue imprenable sur tout Paris. Avant de se coucher, ils disaient bonsoir à la tour Eiffel. 

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J'aime le cake citron pavot de chez Cojean, le meilleur du monde. Un jour, peut-être, je vous en raconterai le secret.

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J'aime – et c'est donc ma dernière fachionerie en date – ces baskets compensées achetées en solde la semaine dernière. Elles me rappellent si besoin mon inconstance totale quand il s'agit de la mode. J'ai du hurler avec les loups dix mille fois cet automne que jamais, never, je ne porterais ces horreurs – inventées au départ par Isabel Marant au prix aberrant de près de 400 euros -, insulte à notre intelligence. Et puis je les ai vues sur les blogueuses mode. Et puis je les ai trouvées de moins en moins affreuses. Et puis pof, persistance rétinienne. Objet de désir. Frustration. Barrage psychologique du prix. Never, jamais, no way, pas ce prix là. Et ce jour là, une petite boutique rue Mouffetard, un erzatz, des Ash, pas données données mais le quart du prix quand même. Et ce jour là, je ne sais pas pourquoi, je me trainais une mélancolie qui me collait aux basques sans que je parvienne à en identifier la cause. Alors je me suis dit que si ça se trouvait, me jucher sur sept centimètres de talons sans même m'en apercevoir, ça me remonterait les fesses à défaut du moral. Croyez moi ou non mais ça a marché. Inutile de préciser que le churros est sans voix.

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Happy anniverblog…

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"Pensées de ronde" a eu six ans il y a quelques jours. J'avoue ne pas trop savoir qu'en dire, j'ai l'impression chaque année de me répéter un peu, donc je serai brève.

On me demande souvent si mon blog a changé ma vie et j'ai tendance à répondre spontanément que oui. Après, si je réfléchis, ce blog n'est pas à proprement parler un être vivant ni même quelque chose qui me serait tombé dessus. Peut-être qu'il est plus juste de dire qu'en le créant, j'ai amorcé sans en être consciente un virage dans mon existence. Et qu'en effet, si mon blog n'a pas forcément changé ma vie, il m'a changée moi.

Je crois pouvoir affirmer que sans "Pensées de ronde", je n'aurais pas écrit de livres, tout aussi légers soient-ils. Je n'aurais pas co-écrit cette pièce de théâtre, jouée pendant un an dans une salle grande comme un mouchoir de poche. Je n'aurais pas rencontré certaines personnes qui comptent aujourd'hui. Je ne carresserais pas ce rêve un jour de… Je n'aurais pas sollicité Psychologies magazine pour y écrire. Je n'aurais pas imaginé avoir la force de démissionner pour tenter l'aventure free lance. Je ne travaillerais pas pour un célèbre quotidien dont je me faisais jusque là tout un Monde. Je n'aurais pas non plus interviewé Bjorn, chanteur d'Abba, à Stokholm. Je ne saurais pas ce qu'est un billet sponsorisé, je ne connaitrais pas l'utilité de google analytics et je prendrais sûrement beaucoup moins de photos débiles et de qualité douteuse. Je n'aurais pas infligé au churros quelques humiliations, la première étant donc d'être connu par certains de ses collègues comme étant El churros. Ma mère n'aurait pas à trembler régulièrement à l'idée que j'écrive une insanité. Mes proches cesseraient d'avoir peur que la moindre de leurs incartades soit rapportée avec force exagération. Personne ne saurait que j'ai déjà mangé du caca, que je sens un peu des pieds et que j'ai des hémorroides (un doute m'assaille, je ne suis pas sûre en réalité d'en avoir déjà parlé). Je n'aurais probablement jamais reçu ce livre sur les femmes fontaines en envoi presse. Et je ne me serais probablement pas fourvoyée dans deux ou trois projets dont je souhaite ardemment qu'ils restent au fond, très au fond d'un quelconque tiroir.

Sans blog, surtout, je crois que mes réveils seraient plus difficiles, parce que non, mon premier geste après avoir posé le pied par terre n'est pas de boire de l'eau citronnée pour améliorer mon transit mais, une fois pipi, douche et ce qui s'en suit expédiés, je sacrifie au même et immuable rituel: lire les premiers commentaires en buvant mon thé. Les matins, rares, où je n'ai pas publié, je me sens comme en manque. J'en parlais récemment à William, qui m'a dramatiquement déclaré: "tu es complètement accro, ma fille". Comme souvent, William a parfaitement résumé la situation.

Je suis accro à cette écriture si particulière qui m'offre ce qu'un livre ne permet jamais, même aux écrivains les plus lus: cette possibilité d'avoir un retour quasi-immédiat de ceux qui me lisent. Je suis accro à vos discussions, à la plume de certaines d'entre vous dont je me demande quotidiennement pourquoi elles ne créent pas leur propre blog, à la gentillesse d'une grande majorité de ceux et celles qui viennent ici, à cette – et le mot est galvaudé mais je n'en ai pas d'autre – communauté qui s'est créée, année après année.

Je me souviens parfaitement de ce premier billet posté le 18 janvier 2006, il s'appelait La cabine. A l'époque, je n'avais dit qu'au churros et deux copines grand max que je m'étais lancée dans cette entreprise. Le soir même, il y avait eu un commentaire, d'une inconnue. Puis le lendemain, un autre. Et de cinq visiteurs, je suis passée à 10, puis à 50. Quand un jour le chiffre de 200 s'est affiché, je me suis dit que ça faisait un amphi. Un amphi de gens venus lire ma prose qui était, il faut bien le dire assez désespérée. J'avais eu un vertige.

Je ne vais pas vous balancer les statistiques actuelles, je ne supporte pas bien quand au détour d'un anniverblog les gens le font, en mode "j'en ai une énorme". Mais disons que l'amphi est plus grand. Et ça me donne tous les jours un vertige. 

Voilà, je suis au regret de vous annoncer que je n'ai dealé avec aucun annonceur pour vous faire des cadeaux à cette occasion, je sais que ça se fait ailleurs mais je n'ai tout simplement pas vraiment su qui contacter (en fait je n'ai pas tellement essayé). Peut-être cela dit y'aura-t-il prochainement un concours qui devrait vous plaire. Je crains par ailleurs de n'être pas très disponible cette semaine, j'ai comme qui dirait pas mal de trucs à rendre pour hier. Et je n'étonnerai personne en vous apprenant qu'en ce lundi, Rose est à nouveau à mes côtés, brûlante de fièvre. Angine, cette fois-ci. Vous me direz, on varie les plaisirs et c'est tant mieux. Je vous confiais récemment mon sentiment d'être l'Elue, je crains qu'il n'ait été remplacé par la certitude d'avoir merdé quelque part, voire de payer quelque chose d'affreux que j'aurais fait dans une autre vie. Si ça se trouve, j'ai balancé un résistant ou bien couché avec Pétain. Voire les deux. Auquel cas, je comprends et je la boucle.

En attendant, je vous laisse, en vous remerciant à nouveau de votre fidélité. Je sais que parmi vous, il en est certain(e)s qui étaient là dès ces premiers billets, je les embrasse. Ainsi que ceux qui viennent à peine d'arriver, ceux qui ont décidé de ne plus jamais revenir et ceux qui pointeront leur nez demain. 

Bonne journée.

Edit: vous noterez que je ne déroge pas à la règle qui veut que lorsqu'on commence une bafouille en prévenant qu'on sera bref, c'est pile à ce moment là qu'on se prend les pieds dans le tapis et que l'on devient long, loooong, looooooooong.

Ellen Mac Arthur, ou la vie renouvelable

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Hier j'étais à une conférence très sérieuse qui rassemblait des centaines de gens très sérieux, réunis pour parler de sujets très sérieux. Je vous ferai grâce du contenu des débats, non qu'ils ne furent pas passionnants mais on est vendredi tout de même (et en plus à l'heure où vous me lisez j'y suis encore). Ce que j'avais malgré tout envie de vous raconter, c'est cette intervention d'Ellen Mac Arthur, guest star du colloque et qui en a clairement illuminé l'ouverture.

C'est fou comme on ne sait pas faire ce genre de choses, nous les frenchies. Je veux dire, des symposiums, forums, rencontres ou quel qu'en soit le nom, j'en ai des kilomètres au compteur. Quand on a bossé comme je l'ai fait durant dix années ou presque dans la presse professionnelle et qui plus est spécialisée sur l'enseignement supérieur, le colloque c'est un peu THE place to be. Il y en a qui partent à Bengazi, d'autres qui connaissent tous les palais des congrès de France et de Navarre. Tout le monde ne peut pas s'appeler Florence Aubenas, hein. Certes c'est moins dangereux de prendre des notes dans un amphi que derrière les barricades, mais ça n'en est pas moins riche d'enseignements. Etant entendu d'ailleurs que ce qui se dit dans les pauses café et les couloirs est systématiquement bien plus important que tout ce qui sera débité à la tribune au gré des (fuckings) powerpoints. (donc on est tout de même dans l'investigation, pardon).

Mais l'idée n'était pas de vous convaincre que tous les journalistes dignes de ce nom ne sont pas obligés de mettre leur vie en danger pour mériter leur carte de presse, j'arrête là ma digression.

Ce qu'on ne sait pas faire, disais-je, nous les frenchies, c'est faire le show. Je ne dis pas qu'il n'y a pas parfois quelques orateurs chevronnés, mais la plupart du temps, on n'est tout de même pas là pour rigoler. Aux humoristes les blagues, aux gens sérieux… le sérieux. Parce que voyez-vous, tout ceci, c'est… sérieux.

Comme si on avait peur de mettre dans nos discours un peu de nous, un peu de vie, un peu d'intime, un peu d'anecdotes. Parce que les titres si précieux chez nous, de directeur, président, délégué général, député, ministre, etc ne sauraient s'accomoder d'allusions relevant de la stricte vie privée ou de plaisanteries qui pourraient laisser penser qu'en dehors de notre fonction très honorable, nous sommes des êtres de chair et de sang, capables… d'émotion.

Les anglo-saxons, sans vouloir tomber dans le cliché – mais quand même – savent, eux. Ils n'ont pas peur. Mieux, ils ne peuvent la plupart du temps même pas concevoir de ne pas faire deux ou trois blagues, raconter une mésaventure ou s'appuyer sur un témoignage personnel pour mener à bien leur raisonnement. Ça fait partie du job. Et le pire, c'est qu'en général, les auditeurs français, adorent ça (bon, souvent, on voit bien qu'on rigole tous aux blagues in english sans être convaincus de les avoir compris) (ça fait con de mettre le casque de traduction) (le pire c'est quand ton voisin te demande de lui expliquer la joke en question, alors que tu t'es contentée de ricaner en même temps que tout le monde) (moments de grande solitude en mémoire).

Bref, j'ai été longue et je le crains un peu lénifiante, (en même temps je suis française) et je n'en suis pas encore arrivée à mon sujet.

Hier, Ellen Mac Arthur. 1m60 à tout casser, taillée comme une gamine, cheveux noirs coupés à la garçonne, pas un pet de maquillage et yeux de husky, est montée à la tribune et a commencé à raconter son histoire. Une histoire extraordinaire illustrée de photos la montrant à cinq ans dans un bateau qu'elle avait bricolé dans son jardin, de clichés de son arrière grand-père ancien mineur ou de souvenirs de ses tours du monde dans des monstres de mer dont on a peine à croire qu'avec ses 40 kilos tout mouillés elle ait pu les maitriser. Après avoir réalisé son rêve de tour du monde et gagné tout ce qu'il y avait à gagner comme courses (alors qu'elle n'avait jamais navigué avant de se chopper une mononucléose à 22 ans et de décider de se lancer dans ce qui était son objectif depuis toujours), Ellen Mac Arthur a soudainement arrêté la compétition pour s'investir dans quelque chose d'encore plus grand. Elle a créé une fondation pour, rien de moins, "repenser le futur". Ça lui est venu lors de son dernier périple, cette idée que les ressources de la planète étaient limitées et qu'il fallait se pencher sur la question.

Sauf qu'Ellen, quand elle se penche sur une question, elle y va à fond. Elle a bossé, lu des centaines de thèses, rencontré les plus grands scientifiques. Et s'est passionnée pour le principe d'une économie circulaire. En gros, l'idée c'est de penser la production industrielle comme quelque chose de renouvelable en permanence. Ça semble simple, mais ça ne l'est pas tant que ça. Mais là où ça me plait, c'est que ça change un peu des discours écolos culpabilisants sur le mode : tous aux abris, à fond dans la décroissance sinon on va tous mourir, jetez vos baignoires, allumez les bougies et ne tirez plus la chasse. Là, il est question de continuer à produire, mais différemment, avec dans l'idée que les ressources étant limitées, il faut les ré-utiliser à l'infini.

Parce que ça ne serait pas juste de dire aux nouvelles générations qu'en raison de l'épuisement du pétrole et du réchauffement de la planète, ils ne doivent avoir à l'esprit qu'une chose: réduire leur empreinte carbone. Quand on est jeune, on a envie de tout essayer, de créer, d'espérer. On ne peut pas se contenter de leur apprendre à économiser l'énergie, a expliqué Ellen. Surtout, et ça c'est moi qui le rajoute, on s'est bien gavés, nous, pendant des années, et puis maintenant en gros, tout ce qu'on saurait dire aux populations des pays en voie de développement ou à nos enfants, c'est de se priver de ce que nous on a tout de même bien apprécié.

Je ne vous la fais pas plus longue, juste, ce qui a été assez amusant, c'est que l'assemblée très sérieuse a d'abord été un peu étonnée par les photos du grand-père et les récits de cette intervenante pas sur-diplômée. Et qu'au fil des minutes, on n'entendait plus une mouche voler. A la fin, ils faisaient la queue pour aller lui parler. Pas de ses courses en solitaire, non, de sa fondation, de la façon dont il serait possible en effet de collaborer. 

Comme quoi, on peut faire passer des idées en étant le contraire de chiant. Et ça, ce serait tout de même vachement bien que certains gars qui misent un peu sur notre bulletin de vote dans quelques semaines en prennent de la graine.

Voilà, bonne journée. Lundi je vous parlerai de ma dernière fachionerie (se dit d'un achat de fringues uniquement motivé par une absence totale de personnalité).

Ah et allez sur le site de la fondation d'Ellen Mac Arthur, tout y est expliqué bien mieux que par moi.

Signez le pacte pour l’égalité (et soyez fatales)

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Hier j'ai emmené la chérie se faire enlever pas une, pas deux, pas trois mais quatre prémolaires. Je n'en menais pas large, elle non plus. Encore moins quand le chirurgien-dentiste m'a gentiment suggéré (ordonné) de rester dans la salle d'attente pendant l'intervention.

Je veux dire, elle a 2 ans et demi. A quelques mois près. 

Ok, je lui ai récemment acheté un soutien-gorge.

Il n'empêche que ça n'est pas JUSTE.

Tout s'est heureusement bien passé, elle fut héroïque et admirable comme toujours. Je ne sais si ce sont ses premiers mois difficiles, le fait d'avoir très tôt fréquenté le milieu médical, les attelles qu'elle a portées ses deux premières années ou tout simplement le fait d'avoir eu jusqu'ici une santé… de merde, mais cette enfant qui peut sembler au premier abord fragile est une sacrée petite nana solide comme un roc face à l'adversité (elle peut par contre s'effondrer quand elle a un 16/20, note catastrophique s'il en est, nous sommes d'accord).

Ce matin elle a quelque chose du hamster et je prie pour que la gastro l'épargne (non, nous n'en parlerons pas, je crains qu'à force d'évoquer la persistance de ce virus chez moi vous finissiez par penser qu'on ne se lave pas les mains après avoir fait caca, voire pire).

A part ça (je veux dire, mis à part le fait que cet arrachage de dents n'est que la première étape d'un long processus qui devrait, si mes calculs sont bons, nous faire dégrader par Standards and Poors et consort pour les trente prochaines années), j'ai acheté hier un gilet panthère chez Zara en deuxième démarque. Je ne suis pas certaine que ça m'aille, mais je vous confirme que l'habit fait tout de même parfois un peu le moine, depuis que je le porte je me sens très fatale.

Et je crois qu'on devrait toutes, parfois, s'autoriser à être un peu fatales. Non ?

A ce propos, je vous invite à regarder ce spot, qui fait partie d'une campagne du laboratoire de l'égalité, fondé par Olga Trostiansky, également adjointe au Maire de Paris. On peut trouver que c'est exagéré, que tout de même, c'est pas si pire. Sauf qu'on est loin, très loin d'une égalité salariale, que les congés parentaux sont toujours pour les bonnes femmes, que le 4/5ème c'est pareil et que oui, encore trop souvent, la parole d'une femme vaut moins que celle d'un être doté d'une paire de testicules. Et ça, ça m'énerve. Surtout depuis que je suis très fatale.


Laboratoire de l'égalité par laboratoiredelegalite 

Signez le pacte pour l'égalité, c'est ici.

Où je donne mon sang

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Ce week-end, je suis allée donner mon sang. C'est incroyable comme cet acte tout de même très anodin peut me rendre ridiculement fière de moi. A me demander d'ailleurs si je ne le fais pas avant toute chose pour me redorer le blason. Ceci étant dit, le résultat à l'arrivée est le même, peu importe l'intention, pourvu qu'il y ait l'ivresse, non ? Mon seul regret, n'avoir comme groupe sanguin qu'un bête A+, le truc le plus banal qui soit, au lieu d'un bon vieux O-neg, qui pourrait à lui seul sauver l'humanité. Ou même un petit AB- de derrière les fagots. Non, moi je suis A+, je mesure 1m65 et fais du 40 – 42. Mariée, trois enfants, hétérosexuelle. En gros, je suis une sorte de portrait robot de la Française moyenne. Consternant de conformisme.

Bref, je suis allée donner mon sang. Et si vous voulez, je vous raconte…

11h45: j'arrive devant Italie 2, ma seconde maison, là où j'effectue TOUS mes achats de première et seconde nécessité (hors-Monoprix) et je constate que le camion de l'EFS est là. Pour une fois, je n'ai rien de prévu sinon trouver un cadeau pour Zaz. Je vais pouvoir donner mon nectar A+.

11h46: Je vais d'abord aller chercher le cadeau pour Zaz, je me connais, après qu'on m'ait pompé les 3/4 de mon sang – je le fais aussi souvent que possible, vous savez ? -, je suis souvent un poil flappy.

11h48: Je me demande si la véritable abnégation n'aurait pas consisté à aller tout de suite donner mon sang plutôt que d'aller faire du shopping. Combien de vies suis-je en train de ne PAS sauver là tout de suite ? 

11h52: Je me souviens que dans mes veines coule un sang qui est à l'hématologie ce que Bayrou est à la politique: vaguement utile mais pas indispensable. 

11h54: Je me balade pépère dans les rayons. Mon sang et moi avons la conscience tranquille. On arrivera quand on arrivera.

12h25: Je suis devant le camion blanc.

12h26: Je ne suis pas certaine que ce soit bien raisonnable d'aller donner mon sang le ventre vide. 

12h27: En même temps après je vais me taper la cloche pour que dalle, ce serait con d'arriver le ventre plein.

12h28: Sauf que si je tombe dans les pommes PENDANT le Don, je ne vais pas profiter des galettes saint-michel à l'oeil.

12h30: Je demande s'il y a moyen de passer en premier au ravitaillement et de me faire prélever dans un second temps.

12h32: Visiblement, il doit y avoir des petits malins qui ont déjà tenté l'affaire. Ici tu passes à la caisse d'abord et ensuite tu croutes. 

12h34: Je rebrousse chemin et vais m'acheter un mini-sandwich. Pour tenir le coup. Et une part de flan. Parce que je le vaux bien.

12h45: J'entre hyper à l'aise dans le camion blanc, en mangeant peinard ma part de flan. Ambiance "je suis trop habituée".

12h46: Je me demande si ça se voit que je fais ça depuis des années. 

12h47: Pour que ça se voie, je vais direct m'asseoir dans la file en attendant qu'on vienne me chercher. Genre je maitrise. A mes côtés, une petite brune attend elle aussi. Je parierais ma part de flan que c'est sa première fois. J'ai envie de la rassurer et en même temps, non. C'est important, je crois, de passer par là. ça fait partie du processus.

12h48: La dame de l'accueil me demande si j'ai déjà donné. 

12h49: Je suis un peu gênée, je n'aime pas me la ramener avec ça. La générosité, c'est aussi cette capacité qu'on peut avoir de faire profil bas. "OUI ! PLEIN DE FOIS", je réponds, avec un air super détaché tout en regardant ma voisine avec une légère comisération. La pauvre, elle doit se sentir toute petite. D'autant qu'on sent bien qu'elle a peur.

12h50: La dame me dit que je dois malgré tout remplir le questionnaire de douze pages.

12h51: Je me sens un petit peu offensée d'avoir à me plier aux mêmes obligations que les puceaux du don mais je comprends aussi qu'on ne peut faire confiance à personne.

12h52: Je coche "non" à toutes les questions et je réalise que ma vie est d'une tristesse affligeante: pas de voyage hors continent européen dans les deux derniers mois, pas d'aventure extra-conjugale, pas d'expérience homosexuelle, pas de stupéfiants. Ah, si, enfin un oui. Une gastro dans les quatre derniers mois. Putain je vais me faire refouler du don du sang pour une gastro. A choisir j'aurais préféré que ce soit à cause d'un cinq à sept torride et sans capote avec le réparateur de chez Darty. Celui qui savait si bien s'y prendre avec la courroie. 

12h53: Je suis à deux doigts de mentir pour la gastro. 

12h54: Je réalise que mentir sur ma gastro juste pour avoir le plaisir de raconter à la terre entière que j'ai donné mon sang ne me grandit pas nécessairement. 

12h55: Je visualise cet accidenté de la route à qui on donnera mon sang et qui en prime va se retrouver avec une septicémie par ma faute. J'envisage de me livrer aux autorités pour qu'on en finisse.

12h56: J'entoure trois fois le "oui" pour la gastro. Si ça se trouve, comme ça remonte à plus de trois semaines, on est bons.

12h57: J'arrive devant la dame avec mon questionnaire. Ma voisine à côté a coché non à tout. Elle est aussi chiante que moi, sauf qu'elle au moins n'a pas eu la colique il y a moins de trois mois.

12h59: La dame me demande à quand remonte mon dernier don.

13h03: Je réponds à voix – très – haute que c'était il y a moins d'un an. "Mais je me sens très en forme, je pense que je peux donner malgré tout".

13h05: Ma voisine me regarde avec admiration. Je pense que je suis en train de lui donner une sacrée leçon de vie. J'hésite à lui parler de mon blog.

13h06: La dame ne me retrouve pas dans ses fichiers.

13h07: Ah si.

13h09: "C'est normal que j'ai mis du temps, c'est parce que votre don remonte à janvier 2009", elle dit, à voix – trop – haute.

13h10: Je m'étonne un peu quand même.

13h11: La dame est formelle et ajoute qu'il est improbable que j'ai pu donner ailleurs qu'ici et que ça ne figure pas dans ce fichier centralisé. Ok, ok, ok, on ne va pas y passer la nuit non plus. Moi au moins madame, j'ai donné en 2009. Une année où en plus les caisses étaient totalement vides, je m'en souviens parfaitement. Et moins d'un an après un accouchement qui avait tout de même été une véritable boucherie, est-il besoin de le rappeler. Donc bon.

13h12: Ma voisine a un drôle de sourire qui, dans un autre contexte, pourrait me faire penser à de la condescendance. Ce qui serait tout de même consternant. Se tirer la bourre dans un centre de don du sang ça frise l'indécence. Je dis ça, je ne dis rien.

13h15: Le dernier don de ma voisine remonte à 8 semaines. "Pile poil dans les délais pour recommencer, madame. Les gens comme vous sont rares. C'est notre principal problème. On donne une fois puis on oublie pendant deux ou trois ans".

13h17: Elle me cherche. Elle me cherche et elle pourrait me trouver.

13h18: Le médecin vient me chercher. "COMME VOUS N'AVEZ PAS DONNÉ DEPUIS 2009 ON VA VOUS FAIRE UN TEST D'HEMOBLOBINE AU PREALABLE" me crie la dame de l'accueil.

13h21: Je me demande si de l'autre côté de la place d'Italie ils sont au courant que j'ai lâchement abandonné l'EFS pendant trois ans.

13h23: Je ne demande qu'une chose. Que madame parfaite qui se fait pomper le dard tous les deux mois dégage avant qu'on m'apprenne qu'en plus d'être une déserteuse je n'ai pas assez de globules rouges pour donner. Je ne le supporterais pas.

13h26: Le médecin me pique le doigt et fait couler une goutte de sang sur une lamelle, qu'il rentre dans un appareil magique. Dans deux minutes je saurai si je suis apte. "A 12 c'est ok. Au dessous, vous rentrez chez vous".

13h28: 12,1. "Sur le fil du rasoir", plaisante le médecin. Je ne m'étais pas sentie aussi performante depuis ma réussite au permis après cinq tentatives.

13h29: Je me demande, en même temps, si ce 12,1 ne signifie pas que je suis anémique.

13h30: Je suis évidemment très enthousiaste à l'idée de sauver mon prochain, mais il ne faudrait pas non plus que je déconne. J'ai trois enfants. Dont une en bas âge.

13h31: Je demande au médecin si tout ceci est raisonnable. Je veux dire, à 11,9, on me collait dehors, à 12,1, on est prêt à me siphonner. On ne marcherait pas un peu sur la tête ? Il y a une marge d'erreur avec leur bazar, là ?

13h32: Le médecin dit bien – trop – fort que je suis évidemment complètement libre de renoncer et ce à n'importe quelle étape du processus. "ET CE, BIEN QUE VOUS SOYEZ EN PARFAITE SANTÉ. PERSONNE NE VOUS JUGERA ICI".

13h34: L'autre connasse jubile sur son siège. Elle doit avoir 123 d'hémoglobine la garce. A ce compte là c'est facile, hein. C'est quand on n'a rien et qu'on donne quand même, madame, que le geste devient héroïque.

13h36: Je rétorque au médecin que non seulement je ne renonce pas mais que ma seule préoccupation était de donner un sang de bonne qualité. Et que par ailleurs, je viens de décider, comme j'ai du temps, de faire la totale: plaquette, plasma et même moelle osseuse tant qu'on y est. Au tapis par KO, madame parfaite.

13h37: Le médecin me rétorque qu'en raison de ma prise d'ibuprofène récente et de cette gastro, nous allons en rester au sang. Par contre ma voisine est quand à elle une candidate idéale pour les plaquettes, ajoute-t-il à l'intention de miss fayote.

13h39: Puisque c'est ça je prends tous les formulaires pour le don d'organe. M'étonnerait que l'autre pimbêche envisage, comme je suis justement en train de le faire, de donner un rein DE MON VIVANT. Et ma rétine, aussi, pendant qu'on y est.

13h42: On m'allonge avec tous mes formulaires sur un brancard. Et on me demande de serrer le poing. 

13h43: Je n'ai absolument pas peur.

13h44: Par contre je me sens le devoir – vis à vis de ma famille – de prévenir que j'ai un tout petit 12,1 d'hémoglobine et que par conséquent on n'a qu'à dire que pour cette fois-ci, on peut se contenter d'une poche format junior.

13h45: L'infirmière trouve que je suis super drôle.

13h46: Elle relie le tuyau à un réservoir qui à vue de nez équivaut à mes sacs poubelles de 50 l.

13h48: Seule la perspective de voir une fois encore s'afficher sur le visage de madame parfaite ce putain de petit sourire satisfait m'empêche de demander à l'infirmière si elle ne vient pas de me raccorder par erreur à la recharge de la fontaine à eau.

13h50: Je ne sens pas la piqure. 

13h51: Je suis en train de sauver une vie.

13h52: Ou d'aider à trouver un nouveau médicament contre la couperose.

13h53: j'aurais du dire non à la question "acceptez vous que votre sang serve à la recherche ?".

13h54: A tous les coups, avec ma chance, mon précieux liquide va finir dans une éprouvette, pendant que celui de ma voisine sauvera dix rescapés du Concordia. Parce qu'en plus d'être très prétentieuse, elle est évidemment O négatif, ça se voit sur sa figure si contente d'elle. 

13h57: Ce racisme anti A+ est révoltant, quand j'y pense. d'autant qu'on en parle nulle part. Ah ça les médias, quand il s'agit de parler de la discrimination à l'embauche, y'a du monde. Mais pour ce qui est du rabaissement SYTEMATIQUE des rhésus A+, on les cherche. ça ne se dispute pas au portillon, les pulitzer, hein ?

13h59: L'infirmière m'a oubliée. 

14h02: Ma voisine a déjà terminé et moi j'ai une tendinite à force de presser ce ridicule coeur en silicone.

14h04: Si ça se trouve je suis tombée sur une psychopathe. Elle est en train de me laisser me vider intégralement de mon sang et va feindre l'étonnement dans deux heures, quand je serai devenue aussi blanche que mon frigo.

14h06: Je ne sais pas si c'est à cause du 12,1 mais je me sens tout de même très mal.

14h07: Je demande faiblement à l'infirmière de m'épargner.

14h08: L'infirmière explose d'un rire sardonique. "Ah ah ah, vous avez cru que je vous avais oubliée ? Il y en a toujours une pour se faire ce film. Ne vous inquiétez pas, c'est juste que votre sang coule lentement".

14h10: Même en don du sang je suis nulle en sport.

14h11: J'ai enfin fini.

14h12: Quel dommage tout de même qu'on ne soit pas en été. Personne ne va voir mon bandage.

14h15: Je fais mine de refuser l'en-cas, rien que pour en remontrer à ma rivale, qui elle sirote un thé, les joues roses comme si elle revenait d'une ballade en plein air.

14h16: Le monsieur du pic-nic ne l'entend pas de cette oreille. "LA PETITE DAME TOUTE BLANCHE VA ME FAIRE LE PLAISIR DE MANGER UN CROISSANT ET DE BOIRE UN THÉ", qu'il crie. (ils sont tous sourds dans ce camion, je ne vois que ça). "C'EST VOTRE PREMIERE FOIS N'EST-CE PAS ?". 

14h18: Au point où j'en suis de ma perte de dignité et aussi parce que dès que je fais mine de me lever j'ai l'impression qu'on m'a amputée, je m'enfile un croissant mais aussi deux galettes saint michel, un thé, un jus de pomme et un carré de chocolat.

14h42: Je repars fièrement après quatre tentatives avortées, lestée de deux ou trois kilos. Avec pour recommandation de ne faire aucun effort physique violent dans les deux heures qui suivent. C'est ça le plus dur je crois, dans cette histoire de don du sang.