Catégorie : La ronde et l’homme

Mon homme, mon soleil

  Bon, je ne vais pas te dire que je suis au sommet de mon hilarité aujourd'hui, je te rappelle qu'on est lundi.

 

Attends, tu es épanouie le lundi?

 

Ben moi non plus, voilà.

 

Mais comme on est là, moi je dis, c'est parti pour le show qui, quoi qu'il arrive, must go on.

 

Alors let's dance baby, en route pour de nouvelles aventures. Et comme j'ai envie de te surprendre, je ne te ferai pas de top faïve aujourd'hui.

 

Ah, je sens que tu es surprise. Et ça me plait. 

 

 

Aujourd'hui, donc, je me contenterai de te parler de l'homme qui partage mes nuits. Et mes jours.

 

Mon soleil.

 

Oui, j'ai envie de lui rendre hommage, alors même qu'il traverse depuis peu une crise de la préquarantaine qui l'a conduit depuis deux semaines à se mettre au régime.

 

On le soutient comme on peut à la maison mais c'est dûr.

 

Rends toi compte.

 

Par exemple, dimanche, à l'Italien, il s'est privé de pizza et a préféré se rabattre sur un diététique plat de lasagnes maison. Son abnégation m'a émue aux larmes. Et ce n'est pas tout. Au moment du dessert, il a consenti – mais uniquement pour qu'on ne s'inquiète pas pour lui – à manger du bout des lèvres un tiramisu, renonçant héroïquement à ses habituelles profiterolles au chocolat. Quand je pense que certaines femmes sont assez dûres pour penser que jamais les hommes ne pourraient endurer la moitié de ce qu'on s'inflige pour leur plaire, j'ai envie de mordre. Elles n'ont jamais vu mon homme au régime pour tenir des propos pareils.

 

En plus, tiens toi bien, il ne se contente pas de sculpter son corps à coups de lasagnes.

 

Non, il a également décidé de s'occuper de sa peau.

 

Probablement incité par la vendeuse de chez C….*, que je soupçonne d'ailleurs de n'être pas pour rien dans tous ces efforts soudains, la garce. Cette charmante demoiselle lui a fait acheter la moitié de son magasin pour mon anniversaire et notamment tout un tas de crèmes délicieuses contre les vergétures. Re-garce. 

 

De toi à moi, en plus, niveau vergétures, les dés sont jetés depuis un bail. A ton avis, est-ce qu'une crème au monde peut quelque chose contre ça ?

 

 

Bref, revenons à nos mulets. Cette adorable jeune femme – catin – ne s'est pas contentée de suggérer  à l'homme que sa femme était un vieux tas qui devait lutter séance tenante contre capitons, relachement des seins et autres craquèlements de peau. Elle lui a aussi obligeamment fourgué quelques échantillons de produits pour homme, histoire qu'il conserve ce teint si lisse et juvénile, "non parce que vraiment, à vous regarder, impossible d'imaginer que vous allez avoir votre troisième enfant, hi hi hi hi hi hi".

 

Pute.

 

Depuis, mon cher et tendre s'est donc pris au jeu de la cosmétique masculine. Bon, il a encore quelques difficultés à assimiler les modes d'emploi. Hier matin il est par exemple ressorti de la salle de bains la peau écarlate comme le cul d'un babouin me demandant s'il devait bien mettre la crème de jour par dessus le gommage. Et pas l'inverse. Et si c'était normal, ces rougeurs.

 

J'ai aquiescé, le rassurant sur l'ordre des choses et les dites rougeurs, lui conseillant d'ailleurs la prochaine fois de frotter encore un peu plus vigoureusement, particulièrement autour des yeux. Et de surtout ne pas se formaliser s'il était précisé sur le packaging "gommage corporel", le visage c'est aussi le corps, après tout.

 

Et puis, comme je suis taquine mais pas cruelle, alors qu'il commençait à se badigeonner le visage de crème amincissante, j'ai précisé, à tout hasard, qu'un gommage se rinçait. "Beuh, évidemment", m'a-t-il répondu crânement avant de redisparaitre dans la salle de bain et de s'asperger à grande eau, l'air de rien.

 

Je sais, ce n'est pas très chrétien de ma part. Mais c'était ça ou une expédition punitive dans la boutique de cette trainée. Au final ça revient au même, encore une semaine au même régime et il devrait avoir lui même envie d'aller lui expliquer sa façon de penser.

 

* Pour ne pas être condamnée à verser quoi que ce soit à qui que ce soit, je préfère protéger l'indentité de cette grande marque de cosmétique française.

 

Edit: Quoi mes hormones ? Tu crois ? T'es sûre que ça pourrait altérer mon jugement ? Voire me faire prendre très mal des choses insignifiantes ? C'est toi qui a reçu TROIS crèmes contre les vergétures à ton anniversaire ? Non. Alors. Non mais.

Un ami pour la vie…

 La scène se passe au lit parce que définitivement et là je crois que c'est la dernière fois que je prends la peine de vous le dire, le carrelage de la cuisine c'est froid et dur. C'est le soir et elle ne tient pas à proprement parler la forme des grands jours. Les raisons sont multiples et sans vouloir m'avancer parce qu'après tout ce n'est pas de moi qu'il s'agit bien sûr mais cette baisse soudaine de moral vient peut-être du fait qu'elle réalise l'ampleur de sa légère erreur de calcul ce jour là Deauville

 

Elle, se blotissant contre lui: Je ne me sens pas très bien…

 

Lui, un peu effrayé: Tu vas vomir ?

 

Elle: Non, mais du calme ! je ne vomis pas non plus TOUT LE TEMPS hein. J'ai juste pas trop le moral. Je suis angoissée.

 

Lui, tendre: Rohh, mais pourquoi ? Viens là… (Puis après quelques secondes de silence, prenant sa voix de quand il a une idée derrière la tête). Et puis quand on a des seins pareils c'est pas la peine de s'angoisser…

 

Elle: Heu… Le rapport ?

 

Lui: Ben non, mais tu vois, je trouve ça super excitant, tes seins, là. Ils sont énormes… Tu n'as vraiment pas à t'en faire, je te désire vachement, en ce moment.

 

Elle: Non mais quand je dis que je suis angoissée tu vois, je ne pense pas au fait que tu pourrais avoir peur de mes seins supersoniques. Encore moins que tu pourrais éventuellement avoir une baisse de libido. Non, ça, pour tout te dire, ça ne m'angoisserait pas trop en ce moment. Ce qui m'inquiète, là, c'est plutôt tout ce qu'implique l'éducation d'un troisième lascar avec toutes les dépenses que ça va engendrer, et puis aussi mon travail, je vais être placardisée, c'est sûr, après ils me vireront comme une malpropre et je finirai sur le trottoir, avec trois marmots, seule…

 

Lui (excité): Sur le trottoir, rrrrrrhhh, non, pas seule, je peux te l'assurer…

 

Elle: Arrête.

 

Lui: Allez…

 

Elle: Non mais je suis sérieuse là. Arrête de me peloter. J'ai besoin de tendresse, tu ne comprends pas ?

 

Lui: Ben, je suis tendre, non ?

 

Elle: Non. Je suis au regret de te dire que malaxer mon sein gauche ce n'est pas tendre, c'est sexuel.

 

Lui: Tu chipotes. C'est la même chose. En plus j'éprouve une vraie tendresse pour ton sein gauche.

 

Elle: Mais moi je veux du réconfort, tu comprends ? Que tu me parles, que tu me rassures, que tu me serres fort contre toi, que tu me dises qu'on trouvera des solutions… Pas que tu me sautes dessus. Je veux que tu sois mon ami, là.

 

Lui, résigné: Bon, viens, je vais te serrer fort contre moi. Et puis t'inquiète pas, on va trouver des solutions. Je suis ton ami.

 

Elle: Quelles solutions ?

 

Lui: … Des solutions.

 

Elle: Mais genre ?

 

Lui: Ben on trouvera. On verra. Mais en tous cas il ne faut pas que tu t'inquiètes parce que je suis ton ami et que je te serre dans mes bras.

 

Elle: …

 

Lui: T'es rassurée là, hein ?

 

Elle: Je baigne dans la sérénité. Tout ça grâce à toi. Tu es un ami formidable.

 

Lui: Vraiment ?

 

Elle: La vérité ?

 

Lui: Non, restons amis.

 

Elle: Voilà.

 

Lui: Et, heu, pour toutes ces choses sexuelles qu'on envisageait de faire avant que je sois ton ami, y'aurait moyen de…

 

Elle: Non, là, je crois que ça gâcherait quelque chose.

 

Lui: C'est ce que je me disais.

Mon été chez les tous nus, suite et fin

Alors alors…

 

J'en étais donc qu'après avoir fait connaissance avec la petite bande et s'être exclamés sur la beauté du lieu et la philosophie complètement à part des vrais naturistes – rien à voir avec les nudistes d'ailleurs je te ferais dire, rapport que le naturisme c'est comme qui dirait un way of life à part entière où tu communies vraiment avec la nature alors que le nudisme ça consiste juste à se mettre nu sur la plage, m'a expliqué hyper sérieusement une fille - quelqu'un a évoqué l'idée saugrenue qu'après un long voyage comme ça on avait sûrement envie d'aller piquer une tête.

 

Un sprint.

 

La seule chose que j'avais envie de piquer c'était un sprint.

 

 

Mais sachant qu'il était impossible d'alpaguer l'homme qui – malin – restait bien au milieu du groupe pour que je ne puisse pas l'isoler et lui intimer l'ordre d'inventer n'importe quel prétexte pour qu'on s'en aille et qu'à l'époque à part trois mecs en France qui avaient un be-bop on en était toujours à l'ère de la bonne vieille cabine téléphonique ce qui rendait nul tout espoir de pouvoir appeler mon papa au secours, je me suis résolue à l'idée de me trimbaler en tenue d'Eve parmi les pins.

 

J'ai donc demandé où c'est que je pouvais me déshabiller. Les autres ils ont un peu ricané rapport que dans un camping naturiste c'est un peu où tu veux que tu te mets à poil. Hin hin hin. Peut-être, que j'ai répondu, mais on ne fout pas 26 ans d'éducation en l'air en deux minutes et way of life ou pas, je ne me déshabille pas n'importe où. Les copains de l'homme m'ont regardée un peu étonnés mais ont eu l'air de se dire que niveau communion j'en étais juste au baptême et que bientôt j'allais être en phase avec les arbres et le soleil. L'homme qui commençait à réaliser que ça n'allait pas forcément super bien m'a suggéré tout miel d'aller derrière une tente.

 

Ce que j'ai fait, après lui avoir jeté le regard qui veut dire "là je suis bien coincée alors je la ferme mais tu ne perds rien pour attendre ça crois-moi je vais te réduire en charpie dès qu'il n'y aura plus de témoins". Crois moi, on avait beau être au printemps de notre histoire d'amour, il a bien décrypté le message et s'est gardé de tout commentaire.

 

Alors que j'enlevais mon jean, je me suis dit que bon, c'est vrai, l'avantage par rapport au camping textile – ouais c'est comme ça qu'on les appelle les pauvres matérialistes qui mettent des maillots de bain – tu te contorsionnes pas dans une tente de 60 cm de hauteur pour mettre ton bikini. Genre t'es à la cool derrière la tente et ton bikini tu le mets en totale détente. Sauf que tu le mets pas, bien sûr. Ce qui rend la chose encore plus easy.

 

Toute à mes pensées, je n'avais pas réalisé que ça y'étais, j'étais nue. Derrière la tente. Jusque là, pas de problème. Sauf qu'en fait, si. Impossible de sortir de ma planque. Au bout d'un moment, l'homme est arrivé et m'a dit que tout le monde m'attendait. Là, d'un coup, tout mon mécontentement que j'avais bien refoulé, il est remonté. Je lui ai répondu que s'il tenait à la vie il me ramenait fissa un paréo et que ça saute. Et aussi que si je chopais UN échange visuel ou verbal entre lui et Nadja Audermann je n'hésiterais pas à m'attaquer aux parties molles qui en plus étaient faciles à repérer vu le contexte. A cet instant précis, je crois que l'homme a compris que sa période d'essai à lui était terminée. Et que là, à poil de chez à poil, je ne rigolais plus du tout. Il est parti sans un mot et m'a ramené un paréo dans lequel je me suis enroulée façon nem.

 

Et nous voilà partis pour la plage. Les fesses à l'air. Sauf moi dans mon paréo. Que j'ai fini par ouvrir un peu histoire que tout le monde constate que je jouais le jeu vu que de culotte y'avait point. Mais que je ne lacherais pas avant d'être allongée les bras en arrière sur le sable, je m'en étais fait le serment. Et oui, moi j'avais choisi mon camp, j'étais nudiste un point c'est tout.

 

Je dois le reconnaître, pendant ce chemin de croix, l'ex a été fair play. D'abord, clairement, y'a pas qu'à moi qu'on avait oublié de dire des trucs. Et genre elle était moyennement au courant de ma venue. Voire de mon existence. Et à priori elle n'avait pas très très envie de renouer des liens avec l'homme. Que je lui aurais pourtant bien refilé à ce moment là. Du coup, quand elle a rigolé à la première pique – première d'une longue série, la vengeance étant un plat qui se mange froid et mon mécontentement n'en finissant pas de remonter – que j'ai balancée à l'amnésique tout zizi dehors, je me suis dit qu'elle était peut-être sympa. Malgré ses jambes. Et ses seins parfaits. Et son ventre plat tout doré. Putain, c'était une bombe. Mais une bombe triste. Et pas pimbèche. Une bombe sympa. Manquait plus que ça. J'allais devoir reporter toute mon aigreur ailleurs. La victime fut vite trouvée tu t'en doutes. Mais même ça c'était trop facile vu qu'en quelques heures l'homme venait de faire son premier véritable apprentissage de la vie amoureuse: quand ta nana pète un plomb tu courbes l'échine et tu attends que ça passe. Surtout si tu n'es pas blanc comme neige. Et même pas en rêve tu tentes une rébellion. Surtout quand tu es tout nu sur un chemin plein d'aiguilles de pin. Je dis ça je dis rien.

 

Bref, dans cette ambiance de coït spirituel avec la nature, on est arrivés à la guérite de la plage. Là un gardien tout nu mais avec une casquette et un sifflet m'a expliqué que soit j'enlevais le paréo, soit je n'avais pas accès à la mer. J'ai eu beau invoquer la discrimination, le racisme anti-textile, le froid, l'allergie au soleil, le gars m'a répondu que la règle était la même pour tout le monde. Pas question que des gens habillés viennent mater les autres. En un sens ça se tenait. L'homme se tortillait, super gêné, et m'a ENFIN proposé qu'on s'en aille si je n'y arrivais pas. Evidemment, du moment où il avait prononcé ces mots magiques, j'ai pris ça comme un défi. D'où que j'y arrivais pas ? Alors que la nature et moi c'est plus fort qu'entre Peter et Sloane ? Besoin de rien envie de toi, quoi.

 

Piquée au vif dans mon orgueil et aussi il faut bien l'avouer, touchée que mister zizi à l'air ait fini par prendre mon malaise en considération, j'ai fait valser le paréo et j'ai avancé la tête haute dans les dunes en priant pour que tout de même la petite troupe ne soit pas en plus du style à marcher pour le principe pendant deux kilomètres pour dénicher THE place to be, sachant que rien ne ressemble à un coin de plage qu'un autre coin de plage. Heureusement, pour la première fois de la journée, mes prières ont été entendues. On a donc étendu les paréos et tout le monde s'est assis avec dans l'idée de faire une belote. Tout le monde sauf moi qui suis passée en quelques secondes – des années d'entrainement qui font la différence – de la position "debout ventre rentré" à "allongée les bras en arrière". Epuisée comme après un marathon. Et ayant peine à croire que je venais de me trimballer sur 50 mètres dans le plus simple appareil. Et que je n'en étais pas morte. Enfin presque.

 

L'homme s'est mis à côté de moi et m'a dit que j'étais belle. Et aussi qu'on s'en irait quand je voudrais. Et aussi qu'il était drôlement impressionné que j'ai si vite tombé la culotte rapport que lui la première année il était resté tout le mois dans la tente par peur de se montrer nu. Encore un truc qu'il avait oublié de me dire, Alzheimer. Je lui ai ordonné de se taire et de me laisser faire l'amour avec le soleil et qu'en passant il ferait bien d'en faire autant vu qu'avec moi c'était mort pour une durée indéterminée.

 

Après, j'ai regardé à droite à gauche et j'ai vu que personne n'avait l'air effrayé par mes bourrelets. J'ai surtout réalisé que les gens ne se regardaient pas. Qu'il s'agisse d'Adrianna et son corps parfait ou du vieux monsieur tout frippé plus loin. Ou de la femme obèse qui aurait eu du mal à trouver un maillot à sa taille et qui se dirigeait sans baisser la tête vers l'océan en balançant sa cellulite de droite à gauche dans un mouvement gracieux.

 

Cet après-midi là, pour la première fois de ma vie je n'ai pas passé mon temps à tirer sur mon maillot vu que… bref. J'ai même fini par aller dans les vagues et j'ai trouvé ça délicieux.

 

Voilà. Je ne peux pas dire que j'ai été vraiment convertie. Je ne suis jamais allée faire la vaisselle toute nue ni au supermarché. J'ai gardé mon paréo sauf sur la plage et j'ai pris garde de ne JAMAIS m'allonger aux côtés d'Adrianna parce que quand même. Mais petit à petit, elle et moi on s'est apprivoisées. On n'a jamais parlé de l'homme et à force on est devenues amies avec tout ce que ça a d'irréel et d'incompréhensible.

 

Au bout d'une semaine on est repartis. On est repassés quelques étés mais sans grande conviction, je crois qu'en fait la nature et nous c'est pas tant l'amour fou. Surtout, tous ces zizis, moi au bout d'un moment, ça finissait par m'écoeurer. Du coup on a loué une maison à côté et on est allés sur la plage textile. Mais je dois bien l'avouer, dans ma perception du corps, quelque chose depuis a changé.

Mon été chez les tous-nus

Aujourd'hui j'ai envie de te raconter mon expérience chez les tous-nus. Chais pas, ça doit être le soleil, la chaleur et tout et tout.

 

Donc, me demande pas pourquoi mais j'ai envie de te parler du naturisme. Enfin, de mon histoire de naturisme.

 

Tu veux bien ? 

 

Alors voilà. En gros, quand j'ai rencontré l'homme, quelques mois après, c'était l'été. Et il m'a dit, "tiens, si on rejoignait des copains qui campent dans le sud-ouest ?"

 

 

"Ben bien sûr !", que j'ai répondu. De toutes façons, je n'en revenais déjà pas qu'on soit encore à roucouler rapport que je sortais d'une longue période de loose amoureuse ou les mecs ils me disaient "on se rappelle" et qu'une fois qu'ils étaient partis je me rendais compte qu'on ne s'était pas échangés nos numéros, qu'il m'aurait proposé d'aller trecker dans l'Atlas que j'aurais dit oui. Alors que bien sûr aujourd'hui, même pas en rêve que c'est lui qui choisit les vacances, faut pas déconner.

 

Donc nous voilà partis, en amoureux, sur la route du bonheur. 

 

Et puis à cinquante bornes du camping, l'homme me dit qu'il ne sait plus s'il m'a précisé un truc pas super important, mais au cas où, il préfère me le redire, que là où on va, c'est naturiste. "Ah ben pas de problème", que je réponds, la nature j'adore, moi. Là, l'homme est un peu obligé de m'expliquer que "naturiste" est un faux ami de "nature", vu qu'en vrai ça veut dire nudiste. Et puis ensuite, très vite il ajoute qu'il se demande s'il a pas aussi oublié de me dire que dans la bande de copains y'aura son ex mais qu'on s'en fout puisqu'il m'aime.

 

Bon ben là, tu imagines bien que je n'ai pas pour ainsi dire sauté de joie, surtout que comme tu peux t'en douter, il avait réellement oublié de m'informer, et sur l'ex et sur le truc avec la nature que t'aimes tellement que tu te mets tout nu pour la célébrer. En plus, je sais pas si tu vois la perversité du mec qui te balance deux bombes en même temps que du coup t'arrives même plus à savoir ce qui te met le plus en rogne. Mais je te rappelle qu'on était en pleine période d'essai de l'amour et que le gars n'avait pas encore été mis au courant que j'étais comme qui dirait du genre à péter les dents de l'ex et à détester l'idée d'aller au supermarché avec le kiri à l'air. Du coup, j'ai ravalé bien au fond de moi tout mon mécontentement et j'ai fait un sourire un peu tordu, en espérant qu'il se mette à flotter histoire qu'au moins le problème du naturisme soit réglé.

 

On a fini par arriver, et malgré mes prières pour la pluie, il faisait une cagna d'enfer. Dès qu'on a passé les barrières du camping, j'ai vu des fesses et des zizis partout. Tant que j'étais bien à l'abri dans la voiture, je trouvais ça plutôt amusant, voire intriguant. Voire… Et puis j'ai vite arrêter de trouver quoi que ce soit de positif à cette histoire dès l'instant où j'ai vu l'ex. Elle et ses deux mètres de jambes. Détail qu'il avait également oublié de me préciser, l'amnésique.

 

A ce moment là, je dois t'avouer que je n'étais pas au mieux de ma forme. J'ai bien essayé de me remonter le moral en me disant qu'au moins une chose était sûre, il ne m'avait pas choisie moi en raison de ma ressemblance avec celle qui lui avait brisé le coeur un an auparavant. Genre comme Nicolas avec Carla et Cecilia. Ok en 96 on savait à peine qui était Nicolas. Lequel je te rappelle en était encore à croire en Balladur. N'empêche que tu vois ce que je veux dire. Bon après j'ai réfléchi et il m'est venu à l'esprit que peut-être il m'avait choisie en REACTION. Un peu comme les enfants de soixante-huitards décident de se faire baptiser sur les coups de 13 ans, histoire de coller la honte à leurs vieux et aussi de leur montrer comment ils se sont détachés de leur influence.

 

Ouais. C'était sûrement ça. Ou pas. Après tout limite ce n'était pas grave. Ce qui l'était en revanche c'était que dans dix minutes il allait falloir enlever ma culotte et me mettre toute nue sur le sable à côté d'Adrianna Karembeu. Et avant ça il allait falloir marcher A POIL sur 200 mètres pour atteindre la plage, sans soutien gorge ni pareo. Tu vois le cauchemar où tu débarques au boulot sans vêtements ? Genre que tu es face à ton patron et que tu réalises que t'es comme un ver alors tu saisis le premier bloc-notes que tu trouves pour cacher ton intimité sauf que le bloc-notes il est transparent ? Tu le visualises ce rêve, que pendant en plus tu es persuadée que c'est la vraie vie et que donc tu es humiliée sur trois générations ?

 

Ben là c'était la vraie vie. La seule différence avec le cauchemar c'est que le patron c'était l'ex et qu'elle était à poil elle aussi. Ce qui bien sûr était pire.

 

A suivre…

Vélib et mariage ne font pas bon ménage…

Ce n'est un secret pour personne désormais, le sport n'est pas à proprement parler mon fils ma bataille. Toutefois, comme en revanche je suis une personne très curieuse et ouverte dès qu'il s'agit de se lancer dans une nouvelle aventure – bon, d'accord, je pense qu'en fait ce jour là je faisais un bad trip de saint-moret - j'ai récemment traversé Paris sur un Velib. Un vrai moment nutella.

 

Pour commencer, il a fallu que j'écoute les conseils donnés sur un ton professoral par l'homme qui m'a expliqué en long en large et en travers que la règle numéro 1 quand tu prends un Vélib c'est de BIEN VERIFIER le matériel. Rapport que s'il est crevé, genre, t'es obligé d'attendre dix minutes avant d'en reprendre un autre. Bon, il aurait pu me le dire en deux mots, il me l'a dit en cent. J'ai bien senti qu'il n'avait aucune confiance dans ma capacité à déceler un dysfonctionnement cycliste en un simple coup d'oeil. Du coup j'ai eu aussi droit à une démonstration en règle, l'analyse détaillée du vélib et des différentes avaries dont celui-ci peut être victime.

 

Je me dois de préciser que l'homme n'a pas, contrairement aux apparences, son master vélib. Avant cet épisode, il en avait fait une fois un jour de grève et avait réussi l'exploit de se faire renverser… par un piéton. Mais comme une bonne épouse se doit de montrer parfois un peu de déférence envers son mari, j'ai aquiescé à tout son baratin en essayant de masquer le mieux possible mon début d'exaspération. Non parce que bon, faut pas être sorti de l'Ena pour repéré un pneu à plat.

 

Qu'à cela ne tienne, donc, j'ai scrupuleusement choisi mon engin, après avoir un peu pataugé à la borne entre mon pass navigo du métro et ma carte bleue, introduisant systématiquement l'une à la place de l'autre dans la machine. Après que l'homme se soit également acquitté de son inscription – avec autant de difficultés que moi et ce bien sûr après avoir ricané au sujet de mon manque absolu de sens pratique – et qu'il ait lui aussi pris son vélo, on est partis à l'assaut de l'avenue d'Italie.

 

Qui contrairement à ce qu'on pourrait penser quand on est à pied, monte.

 

N'écoutant que mon courage, j'ai pédalé de plus belle en pestant contre l'absence de vitesses et la lourdeur du vélo. Arrivée à la place d'Italie j'avais décidé de voter Pannafieu en 2008.

 

En même temps j'étais malgré tout plus vaillante que mon compagnon. Qui avait manifestement oublié dans son scrupuleux check-up de vérifier la selle. Dont la vis de serrage ne fonctionnait plus. Je dois avouer que le spectacle de l'homme pédalant tant bien que mal les genoux au menton et s'arrêtant à chaque feu rouge pour remonter son assise qui redescendait inexorablement quelques mètres plus loin m'a fait me gondoler tant et si bien que j'ai dévalé le boulevard de l'hôpital sans souci – qui certes est en pente. Je prenais toutefois garde de freiner avant chaque feu histoire de ne pas donner l'occasion à l'homme de me soudoyer pour que je prenne son vélo avec selle au plancher. J'étais en effet plus que certaine qu'il avait déjà fait le rapprochement entre ma physionomie "courte sur pattes" et le léger défaut de sa monture.

 

Sauf qu'à un moment j'ai mal calculé mon coup et pof, on s'est retrouvés arrêtés côte à côte. Pas loupé. Il a pris son air de panda et m'a demandé si ça ne me dérangeait pas d'essayer. Dois-je insister sur la mauvaise grace avec laquelle j'ai consenti à lui laisser mon vélo impeccable pour hériter en échange d'une selle non seulement descendante mais également pivotante ?

 

Las, ma mansuétude légendaire a rapidement trouvé ses limites. Au feu suivant j'ai décrêté que l'amour ne justifiait pas tout, en tout cas surement pas de me luxer le cul sur son velib tout pourri que même pas il avait mis en pratique ses conseils à la con.

 

Il a d'abord fait semblant de ne pas entendre et fait mine de repartir.

 

Là, ni une ni deux j'ai laché l'engin et je lui ai annoncé que je prenais le métro. Lui rappelant que c'était avec SA carte bleue que son handivélib avait été loué. Et lui laissant le soin de calculer ce que pouvait lui coûter un abandon de bicyclette sur la voie publique avec risque en plus qu'un homme de petite taille en fasse son affaire et se balade à ses frais pour le restant de ses jours.

 

L'homme n'est pas près de ses sous mais il est également conscient que pour garder une épouse aussi merveilleuse que moi même il doit prendre garde à ne pas être ruiné.

 

Donc il m'a rendu très gracieusement mon vélo. 

 

Après on est repartis amoureux comme au premier jour jusqu'à la mairie du 11è. L'homme sur son tricycle et moi, élégante, racée et enjouée sur mon fier destrier.

 

Bon vous vous en doutez, en fait Paris n'est qu'une succession de montées que jamais on redescend et que ça en est suspect. Un coup de l'UMP à mon avis. On a mis près d'une heure pour arriver à destination dans le onzième et j'ai eu mal aux fesses pendant deux semaines. Limite en plus ça te collerait une systite à la longue. Quand à l'homme il lui a fallu près de de trois jours avant de m'adresser à nouveau la parole. En revanche je ne suis pas sûre qu'à l'heure où je vous parle il ait retrouvé sa dignité.

 

Depuis j'ai donc décidé de m'offrir à Noël un vélo électrique. Et je prévois par ailleurs très sérieusement d'en épouser l'inventeur. Parce qu'avoir imaginé de créer une bicylette qui t'aide à monter les côtes tout en ressemblant quand même à un vélo, je trouve ça juste génial. Même qu'en plus tu as bonne conscience rapport que du moment ou on pédale, je défie quiconque me prouver qu'on ne fait pas du sport.

Le premier geste

Je ne sais pas toi mais moi ce sont les minuscules gestes, les micro-événements qui m'ont toujours le plus marqués. C'est aussi ce qui me fascine quotidiennement lorsque j'observe les gens. Parfois, au détour d'une rame de métro ou dans un café un peu enfumé, on saisit des instants un peu suspendus, pendant lesquels une larme est écrasée furtivement, une caresse décisive est donnée, ou un baiser coupable échangé.

 

En général, il ne m'en faut pas beaucoup plus pour m'imaginer tout et n'importe quoi, écrire l'histoire dans ma tête de cette jeune fille un peu triste ou de ce vieil homme fatigué. Les petites histoires, voilà ce que j'aime. Et souvent, je me rappelle ma petite histoire à moi, ou plutôt la notre.

 

Tu sais, ce "premier geste", celui qui fait que d'un coup, on bascule. Cet infinétisimal rapprochement qui transforme deux êtres jusque là amis ou à peine en amants.

 

Ce geste là, entre l'homme et moi, ce fut une main posée sur la mienne…

 

Après une soirée relativement catastrophique qui avait commencé chez lui par un whisky coca, LE truc que je déteste, peut-être juste après le pastis. Whisky coca malgré tout avalé en dix secondes, premièrement pour ne pas sentir le goût, deuxièmement pour calmer ma nervosité parce que bien sûr, on brûlerait vifs l'un et l'autre plutôt que l'avouer mais nous avions tous les deux une grosse idée derrière la tête ce soir là. Et que moi, ces idées là, elles me rendent nerveuses. Pas toi ?

 

Le problème c'est que l'alcool, ça me rend bavarde. Et que dans ce genre de contexte, bavarde + nerveuse, ça donne: je pars en live. Et donc ce soir là, je me suis mise à raconter n'importe quoi. Et surtout à aborder THE sujet que normalement tu gardes pour toi dans ce genre de circonstances.

 

L'ex.

 

Qui m'a tant fait souffert. Heu, souffrir. Que c'est pas sûr que je puisse l'oublier. Enfin, heu, si, bien sûr, mais disons que tout de même, il a vachement compté. Bon, pas tant que ça et autant le dire, la place est libre désormais, hin hin hin…

 

Un désastre.

 

D'autant que celui qui devait devenir L'homme ne fut pas en reste et que tant qu'à faire, il se mit lui aussi à vanter les mérites de celle qui l'avait laissé le coeur broyé sur le bitume… deux mois auparavant.

 

A ce moment là je me suis dit que c'était mort, j'était celle qui passe après et qui essuie les platres. Et moi, je ne voulais SURTOUT pas être celle là. Limite je ne lui ai pas proposé d'en prendre une autre, de bien la faire souffir et ensuite de me rappeler pour débuter une vraie histoire. En même temps, bourrée comme j'étais, avant de repartir la tête haute, il valait mieux manger.

 

Le problème c'est qu'après l'apéro au whisky coca, il y eut la première et dernière tentative culinaire de l'homme.

 

Une omelette aux pommes de terres.

 

Crues.

 

Les pommes de terre.

 

Jetées dans la poële deux secondes avant les oeufs battus, sous mes yeux effarés. Sans que je n'ose hurler bien sûr. Je rappelle que nous n'avions toujours pas couché et que c'est seulement APRES l'acte sexuel que tu franchis le pas de la critique, genre "non mais t'es malade ! tu les cuis pas AVANT les patates ?". A ce stade de mon histoire, comme tu es bien gentille d'être restée pour m'écouter, je te livre un de mes fameux conseils de femme mariée: Si tu critiques le mâle avant, jamais il ne te saute. C'est comme ça, les hommes sont en général rebutés par les castratrices. Après ça n'a plus d'importance, ils sont pris au piège, terminé, trop tard. Mais avant, tu ta fermes. Et tu avales son truc dégueu.

 

Je parle de l'omelette aux pommes de terre, espèce de dévergondée. 

 

Du coup, donc, j'ai mangé cette horreur jusqu'à la dernière miette. Mélangée au whisky coca, ça a provoqué de drôles de trucs dans mon ventre.

 

Pas découragés ni l'un ni l'autre, ni par ma loghorrée verbale, ni par les bruits un poil gênants de mes intestins, on a finalement continué à passer la soirée.

 

A écouter Barbara.

 

Plus sinistre c'était difficile.

 

Mais je pense qu'il aurait pu me lire l'annuaire, saoule comme j'étais je l'aurais trouvé hilarant.

 

Et puis est arrivée l'heure fatidique. Celle du dernier métro. Et toujours rien. Pas le moindre effleurement, pas le moindre indice qui aurait pu éventuellement m'indiquer que le metro, on en avait plus rien à cirer.

 

Coups d'oeil pas discrets à ma montre, toujours rien. Alors j'ai fini par lancer un subtil et aviné: "oh, mais dis donc, il est l'heure du dernier métro… faudrait peut-être que j'y aille…" On se serait crus dans le mythique "Voisin-Voisine" (allusion que seuls peuvent comprendre ceux qui connurent feu la 5 et qui en plus à l'époque étaient insomniaques. Ou fans des Nuls).

 

Bon, là, t'es un garçon normal, si tu veux conclure, tu sautes sur l'occase non ? Par exmple, tu dis qu'on s'en cogne du métro, genre ? Ou si tu ne veux pas conclure, tu sautes aussi sur l'occase et tu vas chercher le manteau de la fille. En tous cas tu envoies un signal clair.

 

Et ben Sabre laser, lui, il a répondu: "T'inquiètes, y'a une station de taxi juste à côté".

 

Ah.

 

Là je vais te dire que ça a phosphoré grave dans mon cerveau plein de whisky. Premièrement, je n'avais pas un radis. Deuxièmement, je n'était absolument pas en état de me déplacer. Troisièmement, moi, j'avais envie de sexe. Quatrièmement, est-ce que la réponse sus-citée était plutôt encourageante ou non ? Bref, j'étais perdue.

 

Et puis comme je suis une fille pleine d'orgueuil, je me suis dit: ma cocotte, soit il veut t'attraper et si tu te lèves et fais mine de partir prendre ton métro, il se manifestera. Soit il n'a aucune intention malhonnête – le con – et tu ne vas quand même pas en plus payer le taxi.

 

Alors j'ai rassemblé toutes mes forces et ai amorcé un début de mouvement – pour l'élégance on repassera, j'étais à ce moment là avachie sur son lit, seul endroit en même temps où il était possible de s'asseoir, vive les studios – en bredouillant, qu'il valait mieux que je courre jusqu'à la station de métro. Je peux de l'avouer, onze ans plus tard, c'était un sacré coup de poker. Parce que vu mon état, jamais je n'aurais été plus loin que le pallier.

 

Mais là, justement, il a fait ce minuscule geste. Celui dont je me souviendrai toujours, celui qui fut le premier et qui nous sortit du marasme dans lequel on pataugeait depuis 20h30 à peu près.

 

Il a posé sa main sur la mienne et dit ces quelques mots: "je n'ai pas envie que tu partes". Bon, ok, il a plutôt bégayé un truc qui devait vouloir dire ça, je n'étais pas la seule à avoir gobé du whisky. N'empêche qu'à cet instant, ça m'a semblé super romantique.

 

La suite, bien sûr, je te l'épargne. Mais voilà, en quelques dixièmes de secondes, tout a changé…

Espèce de féministe !

"Je ne suis pas féministe mais…", "c'est bon, le temps des féministes hargneuses, c'est fini, calme toi", "Allez, remets ton soutif, on n'est plus dans les années 70"…

 

Je ne sais pas vous mais ces derniers temps j'entends très – trop – souvent ce genre de réflexions. Comme si maintenant, il fallait s'excuser avant d'avouer un peu honteuse qu'on est féministe ou comme si ce mot était devenu un juron.

 

Ok, il existe des féministes hystériques qui cultivent une haine de tout être pourvu d'un sabre laser, à la limite du pathologique. Ok, ces dernières n'ont pas redoré le blason de l'anti-sexisme.

 

 

Il n'empêche que lorsque j'entends des femmes de ma génération ou même plus jeunes m'expliquer que tous ces combats sont terminés et d'arrière garde, et bien je suis fumasse. Fumasse parce qu'on a le droit de voter que depuis 1946. Fumasse parce que ma grand-mère devait avoir l'autorisation de son mari pour travailler. Fumasse parce qu'à compétence égale, les salaires des femmes et des hommes ne sont pas près d'être égaux. Fumasse enfin parce que sorties de nos petites frontières européennes, il existe des contrées – pas si éloignées – où la femme est encore considérée comme un sous-homme.

 

Alors voilà, moi je le dis haut et fort, je suis féministe. Sans le "mais". J'imagine qu'aux yeux de pures et dures, je ne le suis pas assez ou pas comme il faut. Mais je n'en ai cure, mon féminisme à moi il me va.

 

Mon idée du féminisme, en quelques mots, le voilà. D'abord, ce ne sont pas que des droits mais aussi des devoirs. Le droit de travailler par exemple, pour moi, c'est aussi un devoir. Attention, je ne suis pas en train de jeter l'opprobre sur les femmes au foyer. Mais en ce qui me concerne, dépendre financièrement de mon homme, ce n'est pas envisageable.

 

Pourquoi ? Parce qu'il n'y a aucune raison, c'est tout. D'autant qu'en plus je suis une souillon doublée d'une faignasse et que les travaux ménagers, c'est zéro pointé. Alors jamais je ne pourrais compenser mon inactivité par une maison bien tenue. En plus, j'adore mes enfants mais voilà, ce n'est pas un scoop, avec eux tous les jours, 24h/24, je m'ennuie. C'est dit.

 

Parce que par exemple, quand je craque comme une écolière devant des love bottes que je ne mettrai en tout et pour tout que deux heures dans ma vie sous peine d'asphyxie de la cheville, et bien la seule personne qui puisse me blamer, c'est moi même.

 

Aussi parce qu'on ne sait pas ce que la vie nous réserve et que je veux pouvoir choisir. Choisir de pouvoir partir. Ou de ne rester que pour de bonnes raisons. Et si c'est lui qui part, savoir que ce sera dur mais possible de me relever.

 

Outre cet élément financier capital, le féminisme c'est tout simplement pouvoir dire non à mon homme lorsque je n'ai pas envie de m'agiter sous la couette. Refuser de faire un enfant. Décider de ne pas le garder. Etre chef d'une équipe d'hommes. Ou de femmes. Et puis aussi m'habiller comme une cagole pour le rendre fou. Le rendre fou et lui faire l'amour. Sans pudeur ni manières.

 

Et puis le féminisme, c'est aussi une grosse pincée de mauvaise foi. Aimer qu'on me tienne la porte même si c'est macho. Trouver évident qu'il porte ma valise tout en refusant qu'il me demande des comptes sur ma dernière soirée en célibataire. Etre soudain très fragile et considérer que lui, en face, ne peut être que très fort. Réaliser finalement que le fort n'est pas toujours celui qu'on croit. Savoir se faire douce et aimante quand c'est son tour d'être plus faible.

 

Etre féministe, c'est enfin élever sa fille en la persuadant que rien ne lui sera interdit sous prétexte qu'elle est une femme. Etre féministe, c'est aussi faire grandir son fils en lui apprenant à ne pas avoir peur des femmes.

 

Voilà, c'est mon féminisme à moi, sans "mais" et sans honte. Je le tiens de ma mère. Mais aussi de mon père. Oui, de mes parents qui m'ont élevée dans la certitude d'être avant tout un être humain. Grace à eux, je ne me suis jamais demandé si être une fille pouvait être un handicap. Grace à eux j'avance dans la vie avec cette certitude que l'homme est mon égal. Un égal différent mais ô combien aimable.

 

 

Les love bottes m’ont tuER

La scène se passe à la maison après un resto entre amis. Elle se masse les pieds en grimaçant. L'homme la regarde avec une légère pointe d'exaspération, probablement due au fait qu'il a entendu ses gémissements durant toute la soirée…

 

 Lui: Y'a un truc que je ne comprends pas. Comment ça se fait qu'elles ne t'aient pas fait mal dans le magasin ?

 

Elle: …

 

Lui: Heu… Ote-moi d'un doute. Dans le magasin, elles ne te faisaient pas mal n'est-ce pas ? Non parce que je veux dire, une grande fille intelligente comme toi, si des chaussures à DEUX CENT VINGT EUROS lui font mal alors qu'elle n'a pas encore marché avec, elle ne les achète pas, HEIN ?

 

Elle: …

 

Lui: Elles te faisaient déjà mal, c'est ça ?

 

Elle: Un tout petit peu…

 

Lui: Et tu ne t'es pas dit que ça allait s'empirer, vu que même avec des Birkenstock tu as besoin d'une période d'adaptation ?

 

Elle (reprenant du poil de la bête): Oh ça va hein. D'abord c'est mon argent. En plus, ce ne sont pas les chaussures en elles-même qui me faisaient mal. C'est la cambrure. A cause du talon trop haut. Et j'ai pensé que ma cheville s'y ferait. Et bon, ben elle s'y fait pas ça je te le concède.

 

Lui: Ah ben je te le concède aussi. Non seulement elles t'ont coûté un tiers de ta part de loyer mais je te signale qu'elles continuent de nous plumer ces saletés vu qu'il a tout de même fallu prendre un taxi pour aller de la PLACE D'ITALIE à LA PORTE D'ITALIE ce soir, rapport que tu ne pouvais pas faire un pas avec.

 

Elle: Oui, bon, ben voilà, j'ai fait une bêtise. C'était affectif, tu ne peux pas comprendre. J'ai eu un coup de foudre. Je les ai vues et instantanément je les ai aimées. Et je voulais tellement qu'elles m'aiment aussi que je me suis persuadées qu'elles pouvaient m'aller. C'est comme si elles m'avaient suppliée: "achète moi achète moi…"

 

Lui: Heu… En effet, je ne peux pas comprendre. Tu es consciente qu'une paire de chaussures ça ne parle pas hein ? Et que ça ne peut pas avoir de sentiments ? Tu le sais ça, n'est-ce pas ?

 

Elle: Dis moi, chouchou, tu veux qu'on reparle des larmes que tu as versées quand on s'est débarrassé de la voiture ? Non parce qu'aux dernières nouvelles, une bagnole, ça ne pense pas non plus…

 

(Il perd instantanément son air supérieur, se racle la gorge et…)

 

Lui: Non mais en même temps, tu as raison, elles sont très jolies. Et puis si ça se trouve, dans quelque temps…

 

Edit: Ces chaussures, ce sont les fameuses low-boot de chez Comptoirs des cotonniers. Elles ont été mises une seule fois. Payées 225 euros. Je les vends à qui veut. Elles sont très confortables mais trop hautes pour mon pied (6 cm). Taille 38. Pour le prix, me contacter. Sans rire, je ne le fais jamais, je suis réfractaire à Ebay, mais si quelqu'un ici est intéressé, je me fais un plaisir de faire plaisir.

Tu sais ce qu’elles te disent mes hormones ?

La scène se passe il y a quelques jours, un soir de semaine. Non, pas dans un lit, ni sur le parquet, ni encore sur le carrelage de la cuisine parce que vous savez bien que c'est trop froid. De toutes façons, comme vous pourrez le constater, l'humeur n'est pas à la bagatelle…

 

– Elle: Bon alors, pour samedi, on fait comment pour regarder le match ? Tu crois qu'on va trouver un baby-sitter ? Non parce qu'à mon avis, tous les moins de 25 ans de notre entourage vont aller dans un bar avec des potes eux aussi. On a intérêt à s'y prendre dès maintenant.

 

– Lui: Heu…

 

– Elle: Quoi, "heu" ? T'as pas envie qu'on aille voir le match dans un bar avec les autres ? T'es un peu casanier je trouve, tu sais.

 

– Lui (gêné mais pas trop non plus): Ben non, c'est juste qu'en fait, on a décidé qu'on le regarderait entre mecs.

 

– Elle (piquée): Ah je vois. Super sympa.

 

Lui: Non mais tu peux comprendre quand même.

 

– Elle: Ben non, en fait, pas trop. C'est quoi le problème ? Mes hormones vont les faire perdre à distance ?

 

– Lui: Oh, arrête, c'est juste que c'est cool de faire ça entre hommes.

 

– Elle: Et moi, vu qu'il me manque un zizi, je reste à la maison avec les enfants, c'est ça ?

 

– Lui: De toutes façons t'y connais rien au rugby, en plus tu n'aimes pas ça.

 

– Elle: Ne t'éloignes pas du sujet, tu veux bien ? En plus j'ai tout à fait compris l'essentiel du jeu crois-moi. Y'a pas non plus besoin d'avoir fait polytechnique pour comprendre que l'objectif final c'est de se rouler dans la boue avec le ballon et si possible derrière la ligne du fond auquel cas ça te donne des points en plus. Alors, c'est bon, j'ai les compétences ? Y'a un test officiel tu crois ? Non parce que moi je veux bien aller passer mon certificat de spectateur, si y'a que ça.

 

– Lui: Non, mais écoute, une prochaine fois… C'est bon, c'est qu'un match en même temps.

 

– Elle: Qui ne revient que tous les quatre ans tout de même. En plus c'est une question de principe. (Puis, tentant la culpabilisation) Je me sens rejetée.

 

Arrivent pupuce et chouchou alertés par le ton qui monte.

 

– Pupuce: Pourquoi vous vous disputez ? Vous me faites triste moi…

 

– Elle: Non, ce n'est rien ma chérie. Maman est juste triste parce que ton papa ne veut pas d'elle samedi soir pour regarder le match. Il préfère ses amis tu comprends ? Mais ne t'inquiète pas, ta maman va rester avec vous, parce qu'elle vous aime, elle.

 

– Pupuce: Oh, pauvre maman…

 

– Chouchou (toujours très préoccupé par l'équilibre des forces au sein de la famille): Ben moi je comprends un peu papa quand même…

 

– Lui: Ah, merci mon grand, au moins un de mon côt…

 

– Elle (l'interrompant): Et en plus tu montes les enfants contre moi ! Je trouve ça vraiment dégueulasse.

 

Edit1: Pour qu'il n'y ait pas de malentendu, que les choses soient claires, ce qui a déclenché l'ire de cette femme que nous nommerons donc Fadela – sauras-tu deviner pourquoi ? – ce n'est pas l'idée que son homme passe une soirée avec ses amis. Non. C'est l'idée le fait qu'un individu soit exclu d'une soirée uniquement pour défaut de testostérone.

 

Edit2: Je sais, on pourrait penser que dans l'histoire, c'est elle la mégère. Sauf que la Fadela, même si elle peut avoir à un moment ou à un autre une pincée de mauvaise foi, elle est quand même restée à la maison au final. Par conséquent, pas de conclusions hatives, s'il vous plait.

 

Edit3. Ok, elle en a profité pour se siffler une bouteille de vin avec un copain. Mais ça n'est pas le problème.

 

 

 

 

Tu chipotes

La scène se passe un samedi après-midi, dans le salon. Il est en train de remplir des papiers de sécu, elle pianote sur son clavier, l'ambiance est calme. Du genre de calme qui pourrait précéder une tempête, en même temps…

 

 

 

Il: Je te remplis ta feuille aussi ?

 

Elle: Ouais, si tu veux bien, merci

 

Il: Ok. Bon, donc, date de naissance, 21 mars 71…

 

Elle (regard noir):…

 

Il: Ben si, c'est ça ?

 

Elle: Ben non, c'est pas ça.

 

Il (commençant à comprendre que ça sent le roussi): Attends, tu es bien née en 71 ?

 

Elle: Oui.

 

Il: Et en mars, ça j'en suis sûr aussi.

 

Elle: hin hin.

 

Il: Ben alors ?

 

Elle: Ben alors y'a 31 jours en mars, hein. Et il se trouve que je ne suis pas née le 21.

 

Il: Le 22 ?

 

Elle: Génial.

 

Il: Ben dis-moi ! Je suis sûr que je ne suis vraiment pas loin, en plus.

 

Elle: Non mais t'inquiète, à force de faire tous les jours, tu tomberas dessus.

 

Il: Le 20 ! C'est le 20 ! Oh, franchement, je m'étais trompé d'un jour. On ne va pas en faire une maladie, hein ? A UN jour près, je trouve que tu chipotes.

 

Elle: …

 

Il: Si ? On va avoir LA conversation ?

 

Elle: Je ne vois pas de quelle conversation tu veux parler. Je n'ai qu'une chose à te dire. Que tu te sois trompé d'un jour ou de deux mois, c'est pareil. Onze ans qu'on est ensemble. Onze ans. Manifestement pas assez pour retenir UNE date.

 

Il: Donc on va avoir LA conversation.

 

Elle: De toutes façons, ces choses là ne comptent pas pour toi, j'ai bien compris. Je suis sûre que tu ne te souviens même pas de quand on s'est embrassé pour la première fois.

 

Il: A y'est. On est en plein dedans.

 

Elle: Alors ? Tu t'en souviens ? Et la demande en mariage ? Hein ? Et le jour de notre mariage ? Il y a moins de six mois, ça n'a peut-être pas eu le temps de disparaitre de ton disque dûr, si ?

 

Il: Mais tu sais bien que ça ne veut rien dire. Je suis comme ça, les dates, les anniversaires… C'est pas important, si ?

 

Elle: Non, tu as raison Jean-François.

 

Il: Heu, Jean-Philippe tu veux dire ?

 

Elle: Oh, tu sais comme je suis… Les prénoms et moi ça fait deux. Et puis à trois ou quatre lettres près je trouves que tu chipotes hein.